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22 D I S S E R T A T I O N SUR LA
primes fous le joug des Turcs ne leur permectoic plus de s'embaraflèr des vctilleufès
controverts qui féparoient depuis fl long tems les deux Eglifcs, & la
vénalité du Patriarchat, qui commença environ huit ans après la prife de Conftantinople
par les Turcs -, en forte qu'on l'a vu depuis ce tems là abandonné
au plus offrant, fembloit ôter toute efperance de fe raprocher jamais. Cependant
il y eut encore quelques Patriarches unis de fentimens aux Latins, malgré
la haine obftinee que fe peuple avoit pour le Pape & pour (à Comunion.
Mais tous les projets de reunion furent abandonnés ou fufpendus dans les defordres
que les Sentes & les Herefies multipliées caufêrent entre les Chrétiens d'Occident
, pendant le feizieme fiecle. Je vais rafTcmbler quelques points d'Hiftoire
eflentiels fur ce qui refte de cette matière du Schifme des Grecs.
On die que Jeremie devenu Patriarche de Conftantinople en l'année 1 5 7 2.
fut follicité par les Luthériens de fe reunir à la Confeffion d'Augsbourg, &
que n'ayant pû le gagner, ils trouvèrent le moyen de le faire dépofèr. Jeremie
étoit au contraire difpofé à fe reunir aux Latins : du moins la reponlc
qu'il fit à la Confèffion de foi d'Augsbourg montre qu'il trouvoit leur dodrine
fur l'Euchariftie obfcure, & fa deuxieme répliqué, qu'il n'étoit point Luthérien
(iir divers autres articles. Les controverfès ont exerce leur chicane fur
la croyance de ce Grec.
Cyrille Lucar,qui devint, à ce qu'on prétend, Patriarche de Conflantinople
avec le (ecours de l'argent des Hollandois Ôc par les intrigues du Parti
Calvinifte, voulut efiîiyer une reunion avec cette Sede. Il donna une Conftffion
de Foi conforme £72 tout au fevtiment de Cah'm} ce qui caufa m grand é~
tamiement à î'EgUfe d'Occident. (<«) C'eft ainfi que s'exprime la Relation que je
cite. Pour developer cette circonftance, on doit favoir que (/>) Cyrille Lucar
avoit beaucoup voyage en Hollande & en Angleterre. C'eH: là qu'il goura
la doctrine des Protelîians en hlànt leurs Livres & en conférant avec eux. Cette
leéture ces liaifons purent lui {c) fournir un plan de reforme, & produifirenc
une Confeffion de Foi prefque entièrement Calvinifte, qui a été imprimée à Geneve,
comme un monument autentique de la C^/) Conformité de croyance entre les
Grecs & les Proteilans fur les principaux points du Chriftiani(îne. Chaque parti a
dépeint Cyrille, félon fes idées ou fes préjugés. S'il faut en croire les Catholiques f ^ )
c'étoit un Calvinifte déclaré,un ennemi du Pape, un hypocrite penfionnaire des Proteftans,
dont il fuivoit la Dodlrine par intérêt, &: non pas par connoiflance
de caufê, qui s'éleva au Patriarchat par leur argent & par leurs cabales.
Se-
(a) Ambaffade à la Porte en 1^65. de Gauiier LeJUc.
(h) Il vivoit au commencement du dix-repticme fiecle. Les Turcs le firent mourir en iS^S.
(c) Voici ce que dit de Cyrille le Chevalier Ricaut dans la Préface de fbn Etat de l'EgUJi Crec<jue,
felon la traduftion imprimée en i(588. à Amflerdam. „ Je fsis . . . que Cyrille ayant paffc quelque
„ tems en Angleterre, goûta fort l'état floriffant où fe trouvoit la Rclifîion au commencement du rcgne
„ de Charles I & conçut une haute eftime pour l'Egljfe Anglicane. Cela lui fournit peuté-
„ tre un plan pour reformer l'Eglife Grecque, pour y reduire la longueur des Oiîces , la mulritude
„ des Ceremonies, & le nombre des Fêtes, pour y fixer la doctrine de l'état des Ames après la mort,
„ pour y retrancher certaines Ceremonies fuperftitieufes, qui fentoient trop le Paganifme & pour y ren-
„ dre venerable le Sacrement de l'Iîuchariftie, fans en penetrer les redoutables profondeurs. . . .
{d) Les Grecsi dit le Chevalier Ricaut dans la même Préface, déteftent cette ConfeJ]ïo». . . . Je legarde
comme un paradoxe hiftorique ce qu'il dit enfuitej on accufe Us JefuUes d'être les auteurs de cette
CoHfeJfio» , haijfant mortellement ce digne Piélat lui fufciterent de terrihUs perfecwions ^ pourraient
bien s'être efforcés de lut attirer la haine des Turcs ^ des Juifs , ^ ds faire lancer k la fais contre lui les
foudres de l'ancienne de la nouvelle Rame. On verra par ce qui fuit, que cette Confcffion de Foi e'coit
véritablement de Cyrille.
( e ) Arnaud Perpétuité de la foi & autres. Le P. Simon iafi j.
R E L I G I O N DES G R E C S . 25
Selon les Proteflans, (a) il faut convenir que c'étoit un ennemi des Latins^mais
il l'étoit furtout des fmx Grecs (c'cll à dire des Grecs Latinifés,) Il s'attira l'inimitié
des Latins,parce qu'il refilk courageufernent aux promeilcs & aux menaces qu'ils lui
firent pour l'attirer à leur- parti. Ses vues étoient celles d'un véritable Chrctien,Sc
toute fa conduite a fait 'voir, qui! a cru devoir travailler au rctahliffement d'une piété
parfaite dans fon Eglife , en soppofant de tout fon pouvoir an progrès des erreurs
des fuperßitiüns ^'c. qu'il n a point retenu la vérité «?» injußice, ni trahi les
nmvemens de fa cmfcience é-'C- enfin qu'il n'a eu d'autre liaifon avec les 'Ambafladcurs
d'Angleterre & de Hollande que celle qui s'étoit formée par une conmi(
fance mutuelle y qui fe convertit enfuite en quelque familiarité ^ quand ils furent
envoyés à Conßantinople ^ qu'ils l'y trouvèrent &c.
Sans autre détail,il paroit par diverfès Lettres de Cyrille, que ce Grec s'étoit
rais en tête de faire une reunion de Ton (c)Chefavec lesProtelhns, ou plutôt
avec les Calviniftes ; qu'il a mêlé (a croyance particulière à celle de {d) fôn Eglife,
que malgré cela (es fentimens étoient encore bien éloignes du pur Calvinirme,
au moins dans le tems qu'il écrivoit à un célébré {e) Arminien ; qu'il
avance des EiufTetés, comme celles ci (ƒ) que les Georgiens, les Chaldéens
& les autres peuples qu'il nomme perfeverent cotißamment dans Ja foi de Chnl},
^ qu'on ne s'y aperçoit d'aucune innovation dans ce qui concerne la foi-, qu'il ell:
• fort ignorant,comme par exemple,quand il dit que les Coptes font appellés ainjiy
parce qu'ils fe circoncifoient y au lieu qu'il auroit dû favoir,que Copte ou Ctfte eft
un mot corrompu d'j£gyptus. J'ajoute que ce Grec étoit violent & palîionné,
ce qui paroit par fes déclamations continuelles contre l'Eglife Romaine,
les Jefuites, les Moines &c.
(g) L'inftrudion donnée par la Cour Romaine à Canacchio Roß prouve
que Cyrille étoit Calvinifte feul. C'eft lui qu'on accufe en particulier d'avoin
une croyance erronée, d'envoyer de jeunes Grecs étudier en Angleterre, de répandre
le Calviniflne p.ir leur moyen dans le Levant, de diltribuer des Catechif
(a) Claude Réponfe à la Perpétuité de la foi. Liv. III. chap. ti. où il rapporte quelques particularités
curieufes touchant l'cftime que les Grecs de Conftantinople avoient pour Cyi iJle, Bc les regrets qu'ils'
lui témoignèrent après fa mort. Au refte je ne vois pas que cela prouve beaucoup en faveur ae la conformité
de la croyance de Cyrilleavec celle de fon Eglife. Outre que la haine des peuples fe convertit facilement
en regrets & en pitié; je dis que l'ignorance des Grecs (je parle du peuple^ étoit trop groffiere , pour
qu'ils euflent connoiffance d'une Confeflion de Foi de leur Patriarche , & que de là ils en priffent des
motifs de haine ou d'cioignement. Il n'eft donc pas impoflîble que le peuple ait confervé beaucoup d'eftime
& d'affeâion pouj-Cyrille fans s'embaralTer de cette Confcdîon. Peut être auflî que cette affeclion,
qu'on nous donne poui' fi generale, ne doit être attribuée qu'à ceux qui tenoient fon parti.
(l>) Voy. Monumens Mte»ti(^ucs de la Relitricn des Grecs,p^r îe Sr. ^wow.prem. Lettre à k Republique
de Geneve; Je reçois votre doctrine &c. je détefie les Dogmes de l'Eglife Romaine &:c.
(c) Qnclla (Confejfme) ho fcritio per ,d,chiaraiioie di me ßfjfo é fir palefe al mondo tjnel che credo e pro»
fejfo &c. Lettre 1. à Mr. Diodxti. Quant à ce qu'il die dans cette ]cme,ejif'en fait de Religion fon Eglife
ne veut aucune communion avec Us P.tpiftes, cela ne «garde que le Schifme.
{d) Dans les Ahnumcns &c. Lett. z. à Mr. Diodaii,\\ s'exprime ainfi, la Conftffme miu 6 de l.iChiefa
Greca. Cependant on a remarque que divers points de cette Confeflîon font oppofés à la croyance
de plufieurs Grecs, qui n'etoient millemcnt fufpefts de s'être LatiniféSi Claude repond Liv. Ill, chap,
12. de fa Rcponfe h la Pcrpccuité,qu'i] n 'y a rien d'arrêté précifement touchant ces points &c. Mais
on ven-a mieux dans la fuite en quoi cette Confeflîon eft oppofce l'Eglife Grecque. Il ne faut pas
oublier, que dans cette même Lettre, citée à !a Note précédente Cyrille d i t , qu'il a rcdigé cette Confef.
fion de fort propre mouvement Scc. I! ne faut pas oubUer non plus, que dans un fragment de Lettre de
Cyrille cite au Tom. I I I . de la Perpétuité il déclare eju'U déttfle les fuperßitioas des Grecs : nouvelle
prcuve que fa croyance ne fe conformoit pas abfolument à celle de fon Eglife. Cette même preuve fepeu:
tirer aufli de ce qu'il dit des Grecs à la fin de fa Lettre à Uytenhogart.
(e) Vpertbogart en i f i i j . Voyés auftî une Lettre qu'il écrit à Mr. de Wdhm Jans les Monumm aft^
tenticjuts &c.
( ƒ ) Ibid. On verra le contraire dans la fuite de ces Diflèrtations.
(g) Voy. dans les Memmcns mtentiques Q-C.
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