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demanda aiilli la continuation des uiàges reçus auparavant. De plus il (è forma
des Schifmes Se des divilions dans le Clergé, cjui rendirent bien-tôt toutes les
deferences de l'Empereur aux vues &c aux volontés du St. Siege inutiles & infrudueufes.
D'ailleurs il ne faut p.is oublier nu'il y avoit beaucoup d'attifice
dans les démarches de Michel 6: de (on Patriarcne Jean Veceus. Celui ci envelopa
de beaucoup de paroles obfcures & inutiles la grande tjueiiion de la procellion
du St. EÏprit dans la profelFion de foi qu'il envoya au Pape fe,ili X X I .
Cependant il excommunia tous ceux qui refuferoient de recmnoitre la St. Eglife
Roma'me pour mere ^ chef de toutes les autres Eglifes. Nicolas IH. qui parvint
au Pontificat après Jean X X I . demanda que le Patriarche & les autres
Prélats, de même que le Clergé de chaque Ville, Bourg ou Village, fiffent chacun
en particulier leur profeflion de foi fuivant le formulaire donne par l'Eghlc
Romaine j que les Grecs & les Latins difiènt uniformément le lymbole avec
r.iddition ; que le Clergé s'engageât à ne rien enfeigner ni tolerer de contraire
à la profeffion de foi i qu'on n'oblêrvat des Rites établis durant le Schilnre que
ceux que l'Eglife Romaine jugeroit à propos de tolerer, comme n'étant contraires
ni à la f o i , ni aux canons. Nicolas fit infinuer aulli, que les Grecs dévoient
fe faire abfoudre des cenfures encourues à caufe du Schifme ; que le
Patriarche & les autres Prélats réunis devoient demander à l'Eglife Romaine d'être
confirmés dans leurs Dignités : enfin que la préfence d'un Cardinal Légat
mmii d'une fleme autorité feroit d'une utihte indiljjenCible à Conftanlinople.
L'Empereur battit en retraite, & foit qu'il craignit eifeûivcment la rebellion de
Ces proches 6c de fes ftijets, ou qu'il fut bien aile de trouver un prétexte pour
s'empêcher d'en trop faire, il déclara devant le Clergé, qu'il ne iôuffriroit aucun
changement aux ufages, ni la moindre addition au fymbole.
A des menagemens fi fpecieux, qui, comme on peut le voir, étoient l'effet
d'une crainte juftement fondée fur l'obftination des Grecs Schifmatiques, l'Empereur
joignoit avec beaucoup d'artifice une deference extérieure pour le Pape,
laquelle lèmbloit faire valoir hautement l'autorité lùprcme du Siege Remain. Ce
Prince y joignoit aulTi les mauvais traitemens & la cruauté contre ceux qui l'accufoient
de renverfer la Religion, ou qui témoignoient leur mécontentement de
la reunion. D'autre côté le Pape Martili IV. reconnut bien-tôt le peu d'avantage
que le Siege Apoftolique retireroit d'un reconciliation forcée, qui Ce bornoic
à Michel, à fon Patriarche Veccus & à quelques autres EcclefialKques de leur
parti : (a] Jugeant donc que cette reunion étoit illulôire, il refula de donner
audience aux Ambaflàdeurs de ce Prince & l'excommunia lui-même en 1 2 . 8 1.
Michel Paleologue étant mort en l'année 1 1 8 2 . . dans la communion de (f)
Rome, lèlon Maimbourg, quoi qu'excommunié par le Pape, Andronic (on fils
commença par renoncer à la reunion avec les Latins : enfuite on fit une purification
fôlemnelle, comme fi l'on avoit été prophané par la reunion : on fufpendit divers
Ecclefialliques, on en dépoli d'autres & l'on impofa des penitences aux Laïques.
Veccus fut condamné & depofê dans un Concile de Conflantinople. Toutes
ces procedures furent fuivies de Jépofitions d'Evêques & de beaucoup de
delôrdres dans l'Eglile Grecque, dont le detail ell trop long pour le rapporter
ici. Les divifions perpetuellcs, qui s'éleverent dans cette Eglife & les mauvaifes
affaires de l'Etat attaqué de tous côtes par des ennemis formidables entretinrent
les elprits dans une dangereufe incertitude & dans la perplexité.
Le
(a) Voy. Fachjmert L, V I . ch. ^o.
ih) MuimbsHr^ Schifme &c. L. V . Fachjmtrt n'en dit rien.
R E L I G I O N DES GRECS. 17
^ Le projet de reunion fut repris par le moyen d'un nommé Sanuto en l'an--
née 1 3 1 ( > . mais ce projet n'eut aucune fuite. Quelques années après (a) l'Empereur
Andronic le jeune témoigna quelque envie de fe réunir. Le Pape Jean
X X I I . envoya des Nonces à Conllantinople pour traiter de cette union : mais
par l'avis de Nicephore Gregoras on ne dilputa point avec eux : ainfi le voyage
de ces deux Nonces relia fans effet. Une tentative faite en {h) l'anné«
1 5 5 7 . n'eut pas des fuites plus heureufes.
Deux ans après Barlaam fiit aulfi envoyé à Benoit X I L de la part de l'Em»
pereur Andronic. Il fit de nouvelles propofitions de reunion, qui trouvèrent
comme auparavant le Pape dilpofé à les recevoir, moyennant qu'elle fuffent avantageufes
à l'autorité du St. Siege : mais par les demarches des envoyés de
l'Empereur, on voit qu'il n'étoit difpofé à accorder ces propofitions, qu'autant
qu'elles lui fourniroient le moyen de fe maintenir contre les Turcs & fes
autres ennemis. Ces dilpofitions ne pouvoient jamais procurer qu'une reconciliation
precaire & mettre de grans obllacles à une folide paix. Elles y en mirent
encore. Selon Maimbourg, h peuple laß de fes miferés deßroit ardemment cette
réunion-, non par conviftion, ce qu'on ne doit point attendre du peuple,
mais parce qu'il fe flatroit que le fecours des Latins joint à la reunion le délivreroit
de fes maux. Barlaam commença par propofer un Concile general hbre,
convoqué unanimement avec l'approbation du peuple & celle des quatre Patriarches
d'Orient; ce qu'on ne pouvoir pas dire de la reunion &ite à Lion, puifqu'elle
avoit été l'ouvrage de l'Empereur (c) feul ! mais il dem-inda en même
tems des lècours pour reprendre la Natolie fur les Turcs, comme un moyen,
difoit-il, d'ouvrir le paffage à la Terre Sainte, & de difpofer les Grecs à écouter
les propofirions des Legats du Pape. Cell ainfi, continuoit-il, que l'Empereur
pourra perfuader les Grecs de la bonne foi & de la fincere amitié des Latins.
C'étoient donc la mifere de l'Empire & la ruine, dont il étoit menacé qui
parloient pour la Religion. Barlaam le faifoit affés connoitre en difant au Pape,
qu'il n'étoit pas tEn-voyé du peuple des Grecs , mais de l'Empereur Andronic feul, ^ui
ne pouvait n'ofoic fe déclarer pour (union, fi les Latins ne lui en'voyoient aiipara-
•vant du fecours. Le Pape n'approuva ni l'expedieiit d'un Concile general, ni
l'examen des controverles qui feparoient les Grecs des Latins, ni la tolerance
que propofa Barlaam ; fous pretexté ^ue ne pas refifîer à l'erreur c'eß en quelque
maniéré l'approuver. Il offrit des commiffaires pour conferer avec ceux des Grecs,
non pour diffuter avec eux, mais pour inllruire les Schifmatiques. Tout ce que
Barlaam répondit enfuite prouve que le projet n'avoit d'autre but que d'obtenir
du fecours du Pape.
Au milieu des defordres qui troublèrent Conllantinople après la mort d'Andronic
le jeune, defordres qui furent dûs en partie aux fauffes contemplations
de certains (d) Quietilles qui s'éleverent parmi les Moines du Mont Athos,
Jean Cantacuzene, qui s'étoit intrus dans la fouveraineté, renouvella le projet de
reunion, dans la vue de s'acquérir la bienvieillance de Clement VI. Il y eut des
Ambaffadeurs & des Nonces envoyés de part & d'autre. Un Concile à portée
du Pape & de l'Empereur Gtec fut propofé & accepté, mais la,mort du Papo
fît échouer le projet. La mauvaife fituation de cet Empereur preffé de fes enne-
U) En i j , ;.
(b) Sous le Pontificat de Benoit X I I.
( 0 L'Empereur Michel Paleologue.
On les nomma Palamites, du nom de Grégoire Palamas leur Chef. V . Teai
"ean Cantacuzene Hilt.
d'Andronic Liv. II. 6t IV. V. auffi Fleury Tome XX. & Maimbourg SiHfmt &c.
Tome III. Part. I,