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218 m. D I S S E R T A T I O N SUR LA
„ Auguftin, & felon les Conflitutions de St. Dominique. Celui qui donna
„ occafion à cette reformation tant de la Religion que du Monacliilhie, fut
„ un certain Religieux de l'Ordre de St. Dominique , nommé Barthelemi,
„ qui fit de grands progrès dans l'Armenie pour l'Eglife Romaine fous le
„ Pape Jean XXII. ayant attiré à lui par (es prédications plulieurs Moines,
„ dont il lê fervit pour reunir enfemble les deux Eglifes. Ce fut en cc
„ tems-là que l'Ordre de St. Dominique fut établi dans l'Armenie, &c l'on
„ appelle ces Moines Freres mis, à caufc de la nouvelle reunion. Cet Or-
,, dre, qui n'avoit été établi que pour détruire l'ancien , s'acquit en peu de
5, tems be.lucoup de reputation ; de forte que les Frères unis bâtirent des Mo-
„ nafteres non feulement dans l'Armenie &; dans la Géorgie, mais même au
„ delà du Pont-Euxin, principalement à Caffa, qui étoit alors de la dcpen-
„ dance des Génois. Mais depuis que les Turcs & les Perfans fe font ren-
„ dus les maitres de ces païs-Ià, le nombre de Freres unis ell beaucoup dé-
„ chû, & il en relie aujourd'hui aflez peu, qui fe font retirés dans la Provin-
„ ce de Nafcivan en la grande Arménie ; & étant enfin réduits à la derniere
„ extrémité, ils fe font unis avec les Religieux Dominicains de l'Europe. Ils
j, font maintenant fournis au General de cet Ordre , qui y envoye un Supe-
3, rieur Provincial.
„ Pour cc qui eft de leur Office, ils le font en la Langue Arménienne,
î, qui eft une Langue a0cz rude & fort peu connue. Le nouvel Armenien
„ eft cependant différent de l'ancien, & le peuple n'entend pas facilement la
5, Liturgie, ni les autres Offices qui font compofés en ancien Armenien, ils
„ ont aulfi toute l.i Bible traduite en leur Langue, & leur Tmduâion a été
„ prife du Grec des Septante. Cette Verfion de la Bible fut Êiite vers le tems
„ de St. Jean Chryfollome par quelques-uns de leurs Doéleurs qui avoient ap-
„ pris la Langue Giecquc, ôc entre autres par un certain Moïfe nommé le
„ Grammairien, & par un certain David furnommé le Philofoplie. L'on re-
„ marquera ici; que les Armeniens font auteur de leurs carafteres, un St. Her-
„ mite nommé Mefrop, qui les inventa dans la ville de Bain proche de l'Eu-
„ phrate; & ce Mefrop vivoit en même tems que St. Jean Chryfoftome.
(Pour fuppléer à ce que le P. Simm dit des Armeniens, je devrois mettre ici
la Confelfion de foi de l'Eglife Arménienne , telle que Ricaiit la donne. Je
vais en extraire ce qu'il y a de plus remarquable avec toutes les obfcurités fi
ordinaires, pour ne pas dire fi elTcntielles, aux Symboles, (a) Ils croient comme
nous la Trinité, wow trois Dieiix, mais un foui Dieu, feul en volonté en
gouvernement & en jugement &c. Une des trois Perfonnes engendrée de fon
Pere a-vimt toute éternité eft defcendue dans le tems à Marie, & en a refu du fang,
ayant été formée dans fm fein, (h) La Divinité y fut mille mec la Nature humaine,
fans aucune tâche vi fouillure. Elle demeura fatiemment neuf mois entiers
dans le ventre de Marie, é" naquit enfuite à la maniéré des hommes avec une ame,
m entendement, m jugement m corps. . . . De ce mélange, ou de cette 11-
nion a refulté la compofitim d'une Perfmne.. Cette Perfonne, après avoir vécu un
certain tems parmi les hommes, y eft morte par rapport à fon corps, quoique,
comme Dieu, toujours vivante. Elle a été enlevelie, & fa Divinité seß
mêlée avec elle dans le tomheau. Son ame defcendue aux Enfers Se toujours acia)
On conferve les expreOions du Ttadufteur de Riem.
(l>) Ici fe trouve le prétendu Eutychianifiue.
R E L I G I O N D E S GRECS. 219
compagnée de (â Divinité ^écha aux ames qtti étaient dans les enfers , é" "pris
les en avoir retirées, reflufcita le troifième jour, (a) A l'égard de la Procedioii
du Saint Efprit, perfonne n'ignore qu'ils font de l'opinion des Grecs. Du relie,
ils font ennemis jurés de ceux-ci, jufques-làquefelon Tmrnefort, {h) „ Si un Grec
„ entre dans une Eglife Arménienne, ou un Armenien dans une Eglile Grecque,
„ les uns & les autres la croient prophanée & la benillènt de nouveau ".
Ce que le P. Simon a rapporté, que les Armeniens font foumis à deux Pa^
triarches, pourroit induire à erreur. Voici comment il faut reäificr cet endroit.
Les Armeniens ont quatre Patriarches, qui fe donnent tous le ritre de Catholiques.
(c) Ces Patriarches font celui i'itdmiazin , celui de Cis , celui de
Canßialiar & celui ^Âchtamar. Les trois derniers , dit Ricaut, reconnoiffent
le premier pour leur chef, &: ont même recours .à lui dans les affaires épineufcs,
fins pourtant dépendre de lui dans le gouvernement de leur Eglife. Il
ajoute, „ que l'Ordre de Pretrifc ne (ê conféré point, fans que les quatre Pa-
„ ttiarches affiftent à la ceremonie en perfonne ou par procureur "i Pour ce
qui eft des Patriarches Armeniens de Conftantinople & de Jerufalem, „ ce font,
„ continue-t-il,des Patriarches titulaires établis par ménagement pour les Turcs"
5c ceux-ci font bien ailes de conferver cette dignité chez eux, afin de profiter
des inveftitures : mais felon le même Ricaut, „ ces Prélats titulaires ne font pro-
„ prement que les Députés du Patriarche . . . . ou, pour les traiter plus ho-
,) norablement, ce font autant d'Evêques qui relevent des P.itriarches ".
Le Grand P.itriarclle, c'eft-à-dire celui d'fe/jwMïoe, eft élu à la pluralité des
voix des Evéques , qui fe trouvent ,à Itclmiazin, avec l'agrément du Roi de
Perle. Cet .igrémént s'achette fous le nom (pécieux de préfent, & fouvent
auffi le Patriarchat eft mis .à l'cnchere, & adjugé au dernier encheriUéur. Ce
Patriarche s'attribue un pouvoir abfolu f u r j e Clergé, avec le droit de nommer,
conClcrer &: dépofer même les Prélats de fa dépeniince: mais cc droit
„ eft bien referré par le fàir, &: fe réduit à confirmer les éledions qui fe font
„ par les Eglifes particulières, ou les nominations qui viennent de la p.irt du
,, Grand Seigneur ou du Roi de Perfe". Les revenus de ce Patriarche montent
au moins à (e) deux cent mille écus. Au rapport de Toumefort , chaque
Armenien qui paffe quinze ans donne au grand Patriarche cinq fols par an,
& les riches lui -donnent jufqu'à trois ou quatre écus. „ Cependant , a-
„ joute-t-il, ce P.atriarche eft véritablement pauvre , parce qu'il eft obligé
„ de payer la Capitation pour retenir dans fon troupeau ceu.x qui ne font
„ pas en état de fitisfiire au tribut". Malgré cela la grande autorité le
rend un des plus confiderables Prélats du monde. Tout le troupeau tremble
, quand il menace d'excommunicarion, & l'on alTure que quatre vingt mille
Villages le reconnoiffent.
Je rapporte ici, fur la foi du P. Monier , line particularité affez finguliere
de
0 ' ) Ajoutés ici les opinions fuivantes, que Taurntfon leur attribue; que toutes les ames ont été créées
"au commencement du monde; qu'après le Jugement univerrd J . C. reliera pendant rnille ans fur la terre
avec les l'rédellinés.
• (i) ^oyngts du lAvMt Lettre XX.
ic) Brcrnueod ne parle que de deux Patriarches, & en cela s'accorde avec le P. Sir/ion. Ces deine Patriarches
font Ilchmin^iu pour la grande Arménie, & Cis pour la petite. Tourtiefare parle du Patriarche
de NafLtv.m reconnu par les ./Armeniens Catholiques Romains, & de celui de C.tminiec en Pologne, qui reconnoic
aulTi te Pape, depuis la reunion des Armeniens de Pologne à l'Eglife I.atine faite en 1666.
(d) Le P. Manier Relation de l'Armenie.
CO Selon Toumefort à fix cent mille. Les revenus des Patriarches confiftent felon Ricaut, en quelques
fonds de terre, & dans les contributions volontaires des fidelles. Voy. dans VEtat de PEgiiß jirmenien^
ne le détail qu'il donne de ces contributions. Cependant il ne faut pas oublier que Ricaut ne parle guéres
que fur le témoignage des Armeniens de Conftantinople.
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