
' I l l f :
7 0 D I S S E R T A T I O N S U R LA
„ elles prennent le foin de leur ménage, de leurs enfans, & même de leurs
,, parens. Il avoue néanmoins , qu'il y en a quelcjues-unes qui vivent en
3, communauté ^ mais que ces dernieres font plus mitcrables que les premie-
„ res; que les unes & les autres vont par tout où il leur plaît : & qu'enfin
3, elles ont plus de liberté fous cet habit de Religieufes, qu'elles n'en avoient
,, auparavant, (^i)
„ Les jeûnes des Grecs font allés différens de ceux des Latins : car les jeûnes
„ de ces derniers feroient des jours de tete & de bonne chere parmi les Orien-
„ taux, d'autant qu'ils ne s'abftiennent pas feulement de manger de la chair,
„ & de tout ce qui en eft tiré, comme le beurre & le fromage ; mais ils ne
„ mangent pas même de poilTon , fe contentant de fruits & de legumes,
„ où ils mettent un tant foit peu d'huile, & ils boivent fort peu de vin. Les
„ Moines jeûnent .encore plus étroitement, parce qu'ils ne goûtent jamais
„ de [b) vin ni d'huile, fi ce n'eft le Samedi & le Dimanche, Il eft néanmoins
„ permis aux Mofcovites de manger du poiiTon, parce qu'ils n'ont ni (c) vin,
„ ni huile. Le Mercredi & le Vendredi ils s'abftiennent de manger de la vian-
„ de & de tout ce qui en peut forcir 5 mais il leur eft permis ces jours - là de
„ manger du poifton. Je ne dirai rien de leur Carcme, ni de leurs jeûnes
„ particuliers. Je me contenterai de remarquer, que les Grecs & les autres
„ Levantins blâment fort le jeûne du Samedi parmi les Latins, parce qu'ils di-
„ fenc
(a) Le P. Simon a répété cet article dans le Chap. de fa Bibliothtcjue Critique Tom. I. Il ajou-
• te feulement „ que ces Caloyeres demeurent près de l'Eglife pour y recevoir l'aumône de ceux qui vont
„ y faire leurs prieres, ou pour y gagner leur vie en rendant quulque fervice aux Autels, comme à
„ blanchir le linge, à balayer &c.
(b) Chriftophle Angélus dans fon Livre de Statu Gracorum, a décrit affés au long les jeunes de ces
Moines Grecs. Ils doivent jeûner trois jours de la femaine, favoir le L u n d i , le Mercredi & le Vendredi.
Ces jours-là à deux heures après midi ils vont à la priere , après cela ils prennent leur repas,
qui confifte en feves avec un peu de bouillon, fans huile ni beurre , ou en quelques autres legumes
affaifonnés de vinaigre. Le foir ils retournent à h priere ; enfuitc ils s'alfeyent autour de l ' E -
glife , & le Cellerier leur diftribue i chaciin une piece de pain avec tin feul veiTC d'eau. Encore cette
diftribucioo ne fe fait elle cju'aux jeunes Moines ; les plus âgés ne reçoivent rien. Après une petite
paufe ils rentrent dans l'Eglife pour y prier pendant demi heure , & quelquefois même une heure.
E n foitant ils palTent en revue devant leur Supérieur, (yiyovfina^) qui eft à la porte de l ' E g l i f e ,& lui demandent
la benediftion: le Supérieur la leur donne, ajoutant ces m o t s . Dieu wus foit propice mon fih.
Après cette benediction, chacun fe retire dans*fa cellule, & il ne leur eft plus permis de parler à perfonne.
La regie veut qu'ils prient une heure entiere à genoux chacun en particulier. Cet exercice de
la priere eft luivi d ' u n repos fort court : ils fe relevent à une heure après minuit & fe raffemblcnt
• p o u r l'Office du matin. Cet Office qui dure jufqu'au matin étant fini l'on fort de l'Eglife & chacun
reprend fes occupations jufqu'à peu près au rems du diner: mais avant ce repas il faut fe raflembler
encore une fois dans l'Eglife. A l'ifTue du repas les Moines demandent la benedidion à leur
Supérieur, qui cft au bout de la table. Si quelque Moine a le malheur de venir trop tard à l ' O f -
fice de Matines, pour punition de fa parelTe on le condamne à fc tenir debout à l ' e x t r é m i t é de la table.
E n cet état il doit repeter plufieurs fois tout haut ces paroles, avec beaucoup de contrition , j^ycs pitié
de moi Seigneur, Jele» votre grande mifericorde , julqu'à ce que tous les autres Moines fe lèvent
de table pour s'en aller. Alors le pénitent fe profterne la face contre terre implorant leur mifericorde
dans cette pofture humiliée & criant, prie'i, Peres Saints, pour ce pareffcux ijui A péché : à quoi tous
les freres d u Convent repondent : Dieu vous pardonne , mort frere. Alors tous ces Moines s'en vont
mais le parefeux refte là & dine feul après tous les autres. Cette peine eft égale pour t o u s , & il n ' y a de
d i f t i n d i o n ni pour le rang, ni pour l'âge. Tout ce détail tiré d.'A'igclus regarde les Moine-: du premier
& du fécond Ordre. Cet Auteur appelle Monafleriaci ceux du premier Ordre , c'eft-à.dire
fomiant de grandes communautés, & Anachoretes les autres, c ' e f t - i - d i r e , qui vivent deux ou trois
enfemble à une petite diftance du Monaftere & felon la même regie , avec le fccours d ' u n morceau
de terre qu'ils cultivent pour leur fubfiftance. A l'égard du troifième Ordre de M o i n e s , q u ' A n g e -
lus appelle j4fcetes, c'eft-à-dire qui s'exercent (à la vertu) ce font de veritsbles Hermites femblables
aux nôtres : l'oifiveté leur eft défendue, comme à tous les autres, & ne l'eft pa« moins aux Moines
de notre Occident. Les Afcetes ne doivent manger qu'une fois le j o u r , excepté dans les jours de Fetes.
Je renvoyé à la Differtation fuivante ce qui refte à dire des Moines.
(c) Mais heureufement pour eux ils ont de l'eau de vie. On a partout des moyens ingénieux pour
adoucir la févcrité de la Difcipline.
R E L I G I O N D E S G R E C S . 7 1
fcnr c]Lie ce jour-là efî: nn jour de fête, aufTi bien que le Dimanche ; ce
qu'ils prouvent par les anciens Canons & par la pratique des premiers fiecles.
Enfin, pour ce qui regarde les ceremonies, on peut dire en general,
qu'il n'y a point de Nation qui en ait tant parmi les Chrétiens. On peut
conftiltet là-deflbs leui" Euchologe, ou Rituel, avec les Notes du P. Goar.
Le culte qu'ils rendent aux Images ert fi exceffif, que dans un Manufcrit
que j'ai lîk touchant les erreurs des Latins , ils leur reprochent (.i) de ne
point porter de refpeft aux Images; ce qui ne (e peut entendre ailement, fi
ce n'eH que les Latins ne font point une infinité de ceremonies devant leurs
Images, qui font obfcrvces par les Grecs, (h) Quand il eft la Fête d'un
Saint, l'on met fon Image au milieu de l'Eglife, & cette Image, ou peinture,
repréfente l'Hifloire de la Fête qu'on célébré ; par exemple, de la
nativité ou de la relurreflion de Nôtre Seigneur : alors ceux qui font préfcns
baifent l'Image; ce qui s'appelle en leur Langue, -a-inrauiel, & en Latin
, adorm. Cette adoration ne (e fait pas à genoux, ni avec quelque
inclination, ou autre gelle du corps, mais fimplcment en baifant l'Image.
Si c'ell: une Image de Nôtre Seigneur, on lui bailê ordinairement les
pieds: fi c'eft une Im.ige de la Vierge, on lui baife les mains : & enfin
fi c'eft l'Image de quelque Saint, on la baife à la face.
„ Ces fortes de ceremonies, & quantité d'autres que les Grecs obfervenc
en l'adoration de leurs Images, (e (ont beaucoup augmentées depuis le II.
Concile de Nicce, où les défenfeurs des Images remportèrent une grande
vidoire fur les Iconoclaftes. C'eft principalement depuis ce tems-là, que
les Grecs ont public les hiftoires miraculeufes de leurs Images, dont ils ont
, rempli leurs livres : & comme s'ils n'en avoient p s eu alTes parmi eux, ils
, ont été chercher les miracles qui fe font faits à Rome & dans les autres
, lieux par la vertu des Images.
„ Les Grecs ctablilTent la plupart de leurs ceremonies (ur leurs Traditions.
, Ils le fondent fort peu d'examiner, fr ces Tradidons font anciennes, ou non.
, Ils fufEt qu'elles foient en uGige,pour dire qu'elles font Apoftoliques. Etcom-
, me ils ont préfentement peu de perfonnes habiles, il ne font pas capables
, de juger, fl leurs Traditions font véritablement appuyées fur l'Antiquité.
, Une des ceremonies qui a le plus étonné les Latins eft celle qu'ils ob-
, fervent avec un grand apparat à l'égard des myfteres , lors qu'ils font fur
, le petit autel, qu'ils appellent l'autel de la Prothefe ; & cela avant la con-
, fécration. Car ce qui eft p ) é t o n n a n t , ils rendent des honneurs extraordinai-
, res au pain & au vin avant qu'ils foient confacrcs, & fur lefquels on n'a en-
, core fait qu'une fimple benediaion. On peut mettre au nombre des cere-
, monies qui ne font appuyées que fur la Tradition, mais Apoftolique, la
, plus grande partie de leurs Sacremens : parce que, comme nous avons re-
, marqué ci delVus, ils ne croyent p;is que Jefus Chrift en foit immédiatement
, l'Auteur. Tous ces Sacremens font accompagnés d'un grand nombre de
, ceremonies, parce qu'ils font perfuades, qu'on ne peut trop refpeaer ex-
„ terieurement les choies frimes. C'eft pourquoi ils celebrent la Liturgie &
„ leurs autres Offices avec bien plus d'apparat qu'on ne fait dans l'Eghfe
„ Ronuine. Ils ont de plus un grand nombre de hvtes de leurs Offices,
„ fans
U) Ms. Bikiolh. Bodut. O.W). Tit. Tà t w Aart'vwv ffCptf^^xor«.
S i
^ ) Aletrnph. Criiop,
(c) Voyés tout ce qui a été déjà dit ci-defTos.
i r i
t-t