
I I I!
I'll
'iffi'li 3 2 D I S S E R T A T I O N S U R LA
,, rapportons à Caucus, qui attribue cette créance non feulement aux Grecs
„ de Corfou , mais auflî aux autres Grecs qui font fépares de l'Eglifê Ro-
,, maine.
,, Mais Cl nous voulons écouter (a) Leo Allatius, Caucus eft un ignorant,
„ un calomniateur, Se un homme fans jugement, qui a crû obliger le Pape
5, en multipliant les erreurs des Grecs, èc qui a attribue à tous, ce qu'il a
„ vu & appris dans Corfou. Cependant il n'eit pas difficile de juftificr Cau-
,, eus dans la plus grande partie des opinions qu'il attribue aux Grecs, à la re-
„ (êrve peut-être de ce qui regarde la Morale, dont le relâchement vient plu-
,, tôt des particuliers, que d'une créance commune & approuvée ; & il efl à
„ craindre qu'on ne reproche à Allatius. d'avoir adouci beaucoup de chofes
j, dans les fentimens des Grecs par un efprit de conciliation, & pour être a-
„ greable au Pape Urbain VIII. qui avoit alors forme le delTcin de reunir les
„ Grecs avec l'Eglifè Romaine par des voyes d'adouciflêment. £n efïet , fi
j, l'on examine avec foin les erreurs que Caucus attribue aux Grecs daujour-
„ d'hui, l'on trouvera qu'il y a peu de perfonnes qui les ayent remarquées a-
,, vec plus d'exaditude. Au/Ti le Pape lui avoit-il ordonné de le faire, & il
„ n'y a gueres d'apparence, qu'il eût voulu tromper le Pape dans une afiàire
„ de cette importance. Comme il n'étoit pas favant dans la Théologie des
„ Anciens, il a tout rapporté à la Théologie Scholaftique & aux décidons du
„ Concile de Trente, qu'il a crû être la regie fur laquelle il devoir condam-
,, ner d'erreur tout ce qui n'y étoit point conforme 5 & c'eft en quoi la (înce-
„ rite paroît davantage. Car il s'eft informé pendant long tems de ce
„ qu'ils avoienc de commun avec l'Eglifë Romaine , & de ce qui leur étoic
,, fingulier, condamnant néanmoins trop hautement ce qui ne s'accommodoic
5, point aux u(àges de fon Eglife. Mais voyons en particulier, fi Caucus eft
,, un fi grand calomniateur, & s'il a tant impofc aux Grecs, que Leo Alla-
,, tius l'a voulu feire croire aux autres.
,, Premièrement, pour ce qui regarde la rebapti^tion des Latins, il eft cerj,
tain qu'ils l'ont fait en d'autres endroits que dans Corfou ; &c cela par l'ini-
„ mitié qu'ils ont contre eux, regardant toutes leurs cérémonies comme abo-
„ minables. C'eft pour cette même raifôn qu'ils condamnent aufti la Mcfic
,, des Latins, qu'ils lavent leurs autels après qu'un Prêtre Latin a célébré la
„ Mefp.
François Ricourd attribue aux Grecs dans fa Relation de Tlfle de Sant-Erini, imprime'e î
Paris en 1 6 5 7 . Les Grecs, J i c - i l , s'e'tant fe'pare's de l'Eglife Romaine, commencèrent à former le figne
de la Croix de la droite à la gauche. Ils continuent dans cette eireur , & je me fouviens qu'un
jour je fus interrogé d'un Latin . . . pourquoi nous formions le figne de la Croix portant la main i
la gauche & puis à la droite. Je lui répondis que nous le faifions de la forte, pour donner à connoître
que parla vertu de la Croix,d'ennemis nous étions devenus amis de Dieu , du mal nous paffions
au bien . . . qu'enfin nous efpérions par fon mérite au jour du jugement, quand la féparation fe fera
des élus & des reprouvés, de pafTer de la gauche à la droite & d'être du nombre des Bien-heureux.
U n Grec qui étoit préfent goûta cette raifon. . . . , & pourquoi, d i t - i l , nous autres faifons nous le
contraire? . . . . à quoi un de nos écoliers prenant la parole lui dit tout haut. P^ous avù droit de former
votre Croix de U droite à la gauche, pour moMnr que depuis fie vous vous êtes féparés de l'Eglife Ro'
maine, vous avis pafe' du bie» au mal y de U vertu au vice er de la grace au péché & il tfi a craindre
tjue vous fie foyés dt* côté gauche, quand nous ferons à la droite au jour du jugement dernier. Une fi terrible
réponfe fembloit devoir convertir le plus fier Schifmatique de la Grece. Cependant le Miffionnaire
dit feulement, que le Grec demeura fi étourdi, qu'il n'eut aucune parole pour repliquer. . . . D'nutres
Grecs, continue-t-il, ne forment pas entièrement le figne de la C r o i x , & ne touchent qu'à une
épaule, pour fignifier cjue U St. Efprit ne proeéde que du Pere.
(A) Caucus yenetus jOrchiepifcopus Corcjrenfis, vir mlhus plane doBrint vil }udicii... hlxllo edito de Grscorum
rectniiorum H^refibus, Grtcos omnes non fîne evidenti calumnia diffamavit . . . an mindticio , an fcelere,
an fraude, anfallaciit . . . fummorum Pomifcum gram demsnnda cfi? Leo Allât, lib. I I L dcConfenf.
cap. 10.
R E L I G I O N D E S G R E C S. 3 3
Mefle, comme s'ils avoient été profanés, & qu'ils confîdérent les pains azymes
confacrés par les Latins, comme des chofes impures. On en peuc
voir les preuves non {èulement dans nos Ecrivains, mais même dans le Droïc
Oriental, & principalement au titre [a] Réponfe des Patriarches, où la plupart
des cas qui regardent les ceremonies des Latins, font propofés, & en
même tems refolus contre ceux qui faifoient paroîrre tant d'averfion pour les
, ceremonies des Latins. D'où l'on peut voir, que le plus grand nombre des
, Grecs rejettoit les ceremonies qui s'obtêrvent dans l'Eglilê Romaine, comme
, impures profanes, & qu'il n'y a eu parmi eux que quelque Savans, qui
, ont tâché de modérer cette grande averfion pour toutes les ceremonies des
, Latins. Ce qui ne nous doit point furprendre, ^uis que les Latins n'onc
, pas été plus favorables au Baptême & au pain lève des Grecs, felon ce qui
, paroît de pluficurs {h) lettres des Papes qui ont écrit en leur fiveur. Outre
, qu'il s'eft trouvé des Théologiens Scolaftiques, qui ont douté de la validité
, de leur Baptême &; de leurs autres Sacremens, comme il ièroit ai(è de le
, prouver. -
„ En fécond lieu, ce qui a fait dire à Caucus, que les Grecs ne reconnoif-
, fent point le Sacrement de la Confirmation & de l'Extrême-Ondion, c'eft
, qu'il les a confidercs par rapport à ce qui s'obfèrve dans l'Eglilè Romaine,
, où le premier de ces Sacremens eft donné feparément du Baptême; & me-
, me aujourd'hui une des grandes occupations des Evêques, eft d'adminiftrer
, dans leurs vifites ce Sacrement qui leur eft refervé. Le fécond n'eft jamais
, donné dans l'Eglife Romaine, qu'à ceux qui font à l'extrémité; d'où ce Sa-
, crement a été appelle Extrcme-Ondion. Mais les Grecs donnent ce premier
, Sacrement en même tems que le Baptême, & l'Eglife Orientale s'eft tou-
, jours conlèrvée dans cet uûge, qui eft différent de celui de l'Eglife d'Occi-
, dent. De plus, le Prêtre adminiftre ce Sacrement parmi les Grecs, auffi
, bien que dans tout le refte du Levant, comme l'on peut voir dans la Differ-
, cation que (c) Lucas Holftenius a fiite fiir ce fujet, & que le Cardi-
, nal François Barberin a fait imprimer à Rome. Ce (avant homme aflure,
, que cet ufige eft fi ancien dans l'Eglife Grecque, que le pouvoir de con-
, hmier eft devenu comme ordinaire aux Prêtres, ôc de droit commun. Pour
, ce qui eft de l'Extreme-Ondtion, les Grecs n'attendent pas, ainfi qu'il fe
, pratique dans l'Eglife Romaine, que le malade fbit à l'extrémité : aufti n'ap-
, pellent-ils pas ce Sacrement Extrême-Ondion: au contraire, les malades
, vont le recevoir à l'Eglife, quand ils peuvent y aller commodément, & on
, le leur adminiftre toutes les fois qu'ils font malades, parce qu'ils croyent que
, St. Jaques dans fôn Epître parle des malades, & non de ceux qui font à
, l'extrémité.
„ (Au refte le P. Simon a montré dans fa Bihlioîh. Critique Tome I. que
, par l'Euchologe & quelques Auteurs Grecs, il paroît que les Grecs étabîif^
, fent fept Sacremens).
„ En troifième lieu, pour ce qui eft de l'adoration qu'ils ne rendent point
, au Saint Sacrement après la confêcration, cela ne fe doit pas aufTi entendre
, généralement, parce qu'il eft conftant qu'ils adorent ce Sacrement; mais feu-
, ïement par rapport i l'adoration que les Latins rendent à rEuchariftie,aufn-
„ tôt
(a) Réf. Demetrii Archiep. Bulg.
{h) Epifi. Clement, f f l . apud yilUt. lib. de Interjf.
(c) Luc. Holjien. Diffcrt. de S.icr. Confirm, apud Cracos.
Tome m . Part. I. I
iîTi^