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„ parties promettent d'obferver inviolablement fous les peines & amati-
„ des y contenues. . . . fi les arbitres ne font pas d'accord . . . le Modcra-
„ teur des Eglifes devient le Super-arbitre, ou à fon défaut le Pafteur de l'E-
„ glife . . . fi les differens ne le terminent pas par cette voye, l'affaire Ce
„ porte aux Colloques & enfin aux Congregations. . . . "
Autrefois, dit le même Leger, le Modérateur des Egliiës des Vallées avec
fon adjoint & un Ancien à ce député faifoit une fois l'année la vifirc de toutes
les Eglifes, & donnoit, ou fon adjoint, un prêche à chacune des Eglifes. Il eximinoit
& cenfuroit felon qu'il le trouvoit neceffaire. Enfuite il fiiifoit fon
rapport au Synode. Depuis l'année i tf ; o cela eft changé, ou du moins I2
diicipline n'a plus la même feverité qu'auparavant.
Chaque village a fon Ancien ; quelquefois même un village en a deux ou
trois. On indique un jour de Catechifme general qui fe fait parlePafteur dans
la maifon de l'Ancien, & auquel affiftent hommes, femmes & enfans, jeunes
& vieux, valets & fervantes. Les cenfures (è font à certains jours dans les Confiftoires.
On s'y cenfure mutuellement Fadeurs & Anciens, & l'on eft obligé
par ferment de ne point s'épargner les uns les autres. Deux chofes y font obfervées,
ou doivent l'être ; l'une de ne cenfurer que par un principe de charité,
fans aigreur, fans jaloufie &c. l'autre de ne point reveler la cenfure, ni les
fautes qui en ont été les objets.
J'obfcrve en general, que tout ce qui s'appelle crimes & péchés Icandaleux
mérité non feulement la cenfure, mais auifi l'excommunication. Selon Leget
on fulpend pour long tems de la Cene ceux qui font coupables de ces péchés,
& alors il ne leur eft point permis de préfenter un enfant au Baptême,
ni même d'y affilier comme témoins de ceux qui demandent ce Sacrement.
Enfin, après avoir donné long tems plufieurs marques réitérées de leur repentir
„ on les admet, dit Leger, à la paix de l'Eglife avec ces reparations préa-
„ labiés. . . . Il faut que trois dimanches de fuite les pénitcns fe tiennent à 1»
„ (âce de toute raflèmblce devant la chaire fur un fiege à part pendant tout le
„ prêche Après le prêche avant que de donner la benediftion , le
„ Palleur advertit le peuple, qu'un tel . . . . eft admis à faire publique re-
„ paration. . . . Le pénitent fe met à genoux & en cet état écoute les re-
„ monllrances du Palleur, qui pour le premier Diitianche lui doit faire voir
„ l'horreur de fon crime & des jugemens de Dieu qu'il a mérités. La deu-
„ fième fois il lui reprefente la néceffité Se le fruit de la vraye rcpenrance, &
„ la troifième enfin, le pénitent continuant à demander à haute voix pardon
„ à Dieu & à l'Eglife, & promettant de l'édifier d'autant plus à l'advenir,
„ qu'il l'auroit fcandalifcc par le paffé, le Palleur enfin, au nom & de la part
„ de Dieu, lui annonce la remillion de fes péchés & la reunion à l'Eglife Sec ".
Entre les crimes capitaux Se qui demandent cette pénitence publique on compte
l'impureté quelle que ce foit : (pour une fimple fornication on ne fait cette
pénitence que deux Dimanches, quelquefois qu'un feul, & fort fouvent même
un jour ouvrier) le blafpheme, la profanation du Dimanche, l'abjuration de
fa Religion, c'ell-à-dire de la Religion des Vaudois. Ceux qui abjurent h
Romaine font l'abjuration en face d'Eglife. Les jeux de hazard, les danfis,
le cabaret font mis au rang des péchés crians. La Difdplinc des anciens
Vaudois, dont Leger rapporte des extraits, appelle la danlê fa froceßon cîu Diahîe.
. . . Autant de pas que ïhmtme fait en danfant, font autant de fauts qu'il
fait vers l'enfer. . . . Selon cette même difcipline la dmfe eß la pompe (<j) la
Meß
(A) Lu pomptt e U Mefa dtl Diavol,
i l s s f î -â J:; S,i i
RELIGION DES PROTESTANS. 323
Mejfe duDiahle: dnCialler auhalc't& aller i laMefi du Diaile. Tel eft le plailànt
caraflere que cette Difcipline donne aux bals. Ilfaiidroit copier tout l'article pour
montrer combien à force de déclamer contre la danfe tout y ell comique & origiri.
il. Celui qui concerne le cabaret n'eft gueres moins remarquable. Cell
l'école du Diable: il y fait des miracles à f a mode & contraires à ceux que Dieu
fait: car Dieu illumine les aveugles, fait parler les muets, entendre les fourds, marcher
des laiteux: au cabaret le Diable ôte prefqiu la vue é" fouie, il fait heguayer,
marcher de trmiers. Les cabaretiers eux-mêmes y participent auffi aux leçons
du Diable, à caufe du mal qu'ils fouffrent qu'on dife chez eux , de Dieu , de
{a) la glorieufe Vierge, des Saints é" 'les Saintes du Paradis: & cela pour vendre
un denier de vin. Aujourd'hui on a perdu de cette extrême feverité : cependant
au tems que Leger écrivoit, quand quelqu'un croit convaincu d'avoir joué
à des jeux de hazard, il croit encore expofé à la cenfure k d la reparation, plus
ou moins rude, felon les circonßances du tems, du lieu é ' des perfmnes. Pour avoir
danfe on palfoit par une cenfure publique : tout au moins il fallait ployer
le genouil devant le Conßfioire, é" mime ceux qui allaient noir les danfes papißes n'étoient
point exempts de cenfure.
^ Les propolàns ne font reçus au minillere qu'après avoir fubi des examens
très-rigoureux, & après plufieurs propofidons reïterées, rendues en Latin, en
François & en Italien dans le terme tout au plus de vint & quatre heures. Je
ne parle point ici de l'impofirion des mains, qui fe lait à la maniéré des Reformés.^
On n'admet perfonne pour Ancien qu'après une examen exaft de S
capacité, de fes lumières & de fes moeurs. On publie fon éleftion par des annonces
; c'ell ainfi que les Reformés appellent les bans. L'Ancien eft à vie.
Il n'y a qu'un Diacre dans chaque Eglife: il ne diftribue rien que par les ordres
du Confiftoire , ou par un Mandat du Pafteur.
Enfin toutes les Eglifes des Vallées font obligées d'avoir un nombre d'Ecoles
bien réglées,où l'on enfeigne les principes de Ta Religion Reformée. Il y a
aulli (c'eft après Legerque je parle) une Ecole generale entretenue par toutes les Vallées
, où l'on envoye les plus beaux efprits, & entre lefquels on choifit enfuite ceux
qu'on deftine au minillere. Aujourd'hui les beaux efprits des Vallées du Piemont
vont prefque toujours étudier à Geneve & dans les Academies de la Suiffe.
S E C T E S m ê l é e s p a r m i les anciens V A U D O I S.
Dès les commencemens de la Seûe des Vaudois, ou du moins une centaine
d'.-innces après Valdo Chef des Leonißes, autrement dits pauvres de Lion, il
s'étoit réfugié dans ce parti des gens plus Hérétiques & plus dangereux que les
Vaudois. {h) C'eft ce melange, qui dès-lors fit divifer les Vaudois en plufieurs
branches: au lieu qu'il falloir toujours diftinguer la doftrine des purs Vaudois
d'avec ces prétendus Vaudois. Je vais donner ici les erreurs des plus remarquables
de ces branches.
(c) Les Runcaires ajoutoient , dit-on, à la dotflrine des Vaudois cette opinion
monftrueufe, à en juger par la manière dont les auteurs de ce tems-là l'ont:
expofee ; que Je la ceinture en has il ne f e commet point de péché mortel, fous prétexte
qu'il ell écrit, qite la fornication vient du coeur.
Les
Cet endroit mérite d'ctré remarqué.
( 6 ) On en a déjà parlé plus haut.
{c) Raiiùer cité dans ['Hiß. Ecelef du P. Akxandre ubi fup.
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