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„ dernière Colleflc, comflenda, [a) qui reffent le (àcrifice, on lira dans le mê-
„ me ton, quod ore fmnpjttms, Domine: on pourra dire auffi, corpus tmm,
„ Homme, quod fmpfmut &i.c. en mettant le fingulier au plurier, Domims vo-
„ hifcum & c . Au lieu d'ite Mift ejl, on dira, Benedicamm Domino avec l'Al-
„ leluja en Mufique, qu'on prendra, fi l'on veut, du Benedicamm des Vê-
„ pres. On donnera la Benediûion accoutumée, ou celle que Dieu a lui-
„ même didce au Chapitre 6 des Nombres, le Seipieiif nous benife ^ nous
,, confirme &c. " (Les Reformés fefervent auffi de cette Benediftion pour congédier
leurs Fidelles après les exercices publics de devotion) Luther laiffe enfuite
la liberté des habits, pourvu que ce Ibit fans pompe & fans luxe. De là paflant
aux Meffes privées, il les condamne abfcilument comme inutiles, peu édifiantes
& entièrement contraires à l'inftitution de J . C. qui appelle toute affemblee
des fidelles à la Ccne. Dans les Meffes privées le Miniftre de l'Autel
fe prépare folemnellement un feftin qui appartient à toute l'Eglife : ce^ une
table lien drefée, mais on n'y -voit point de conviés. Il veut auffi qu'on examine
avec foin ceux qui fe prékntent à la Communion & qu'on exclue également
Se ceux qui font indices de communier pat leur ignorance, & ceux qui le
font par leurs mauvaifes moeurs. Sur la Confeffion privée avant la Communion
, il dit, „ elle n'eft point nécelfaire & ne doit point être exigée ; cepen-
„ dant elle eft utile & il ne faut pas la méprifer . . . je fouhaite, dit - il
„ auffi, que le peuple chante des Cantiques en langue vulgaire à la fin de la
„ Meflè. . . . L'Evêque pourrok regler les chofes de telle maniéré qu'on les
„ chanteroit tout de fuite après le chant en Latin, ou que l'on pourroit audi
j , les chanter, felon les jours, tantôt en Latin & tantôt en langue vulgaire,
„ jufqu'à ce que toute la Mefle fe dife en une langue entendue de tous les fi-
„ delles". , 1 .
Tel étoit le formulaire que le Reformateur Saxon avoit dreffé pour l'Eglilê
de Wittemberg, & auquel il fèmbloit qne toutes les-Eglifês du Luthéranisme
auroient dû fe conformer entièrement. Cependant cela n'eft pas abfolumenc
arrivé. Non feulement tous les Païs Luthériens n'ont pas le même Rituel, mais
ils ont auffi des diiTérences dans les Liturgies, bien que dans le fond la doûrine
refte la même. On trouve de ces différences dans la Liturgie Danoife compofée
par Bugenhague furnommé (Pomeranus) & approuvée par Luther ; (J)
mais augmentée de plufieurs articles en 1 5 4i,changéeenfuite, augmentée encore
& corrigée fous le Regne de Chretien V. On trouve auffi des différences
dans les Liturgies de Suéde, & l'on en trouveroit enfin (c) dans celles des
autres Etats, fi l'on prenoit la peine de les examiner attentivement les unes après
les autres. Dans plus d'une Communion l'on prétend fe juftifier à l'égard
de cette variation , & les Lutheriens ne s'oublient p.is fur cet article.
Quoiqu'il en foit , il ne convient point de faire ici la defcription de toutes
ces diverfités. Je me contenterai de rapporter en peu de mots l'eflentiel des
Liturgies de Suede, fur quoi le lefleur pourra juger de la vérité du fait.
Perfonne n'ignore que la Reformation de la Suéde fuivit de fort près celle de
la Saxe ; que le Luthéranisme fut porté dans ce Royaume par Laurent Si Olaus
(.1) Oiiit fere facrSficittm finar pag.
i h Elle fut publiée eu Latin en 1 5 Î 7 . & en Danois en 1 5 5 9 . En 1 5 5 1 . elle f u t introduite en I f -
lande.
fo Schulmgms a montré le peu de concert, ou plutôt l'oppofition qui fe trouve entre les
(livres qui contiennent la DifciplineJ de Saxe, de Lipftg , de Wittemberg, de Nuremberg, de Magdebourg,
de Lunebourg & c . Cette Remarque eft prife dans le P. li fir«;, ubi fup. pag. 189.
RELIGION DES PROTESTANS. 357
laus Petri que {a) Guftave Roi de Suéde contribua de tout (on pouvoir à cette
Reformation ; mais que le Roi Jean fon fils & fon [h) fucceffeur travailla
à la détruire autant qu'il lui fut poffible & que la faâion oppofée du Luthéranisme
le lui permit. Pour ramener les derniers & pour tâcher en même rems
de contenter les Catholiques, on drella une Liturgie qui déplut prefqu'cgalement
aux deux partis: aux Lutheriens, parce qu'elle retenoit des choies qu'ils
rcjettoient comme des abus: aux Catholiques, parce qu'elle en rettanchoit qui
felon eux étoient effentielles au Chrillianisme. Lorsque des opinions nouvelles
ont commencé de changer la Rehgion d'un Etat & que le peuple s'eft frappé
du mérite de fes nouveaux Docteurs, il arrive presque toujours que l'adrelTc
& la fubtilité qu'on employe à rétablir l'ancien çulte, pendant qu'on y mêle
en même tems beaucoup de menagemens pour ceux qui fuivent le nouveau,
fortifient celui-ci & hâtent la ruine de l'autre. C'eft ce qui s'eft vil dans les
Revolutions de Religion en Angleterre &c en Suede. Comme le parti Luthérien
s'étoit rendu confiderable pendant le regne de Guftave, on n'ofi pas propofer
fous celui de Jean une Liturgie toute Cathohque. [c) „ Le Pere Herbert,
„ Laurent Nicolai, Fettenius Se plufieurs autres en retrancherent l'Invocation
„ des Saints, les prières pour les morts, la mémoire du Pape , le mot de
„ Sacrifice, les fignes de croix. On mit à la tête (de la nouvelle Liturgie)
,, des prieres pour fêrvir de préparation, & d'autres qu'on devoit dire en s'ha-
„ billant. Après ces prieres on trouve l'Inttoit, la Meffe des Catechumenes,
„ un Canon plus long Se un autre plus court, des Préfaces & des prieres pro-
„ près au tems, & le refte de la Meffe, le tout changé & tranfpoic, de peur
„ qu'on n'y reconnut la Liturgie de l'Eglife Romaine. Les auteurs de cette Li-
„ turgie y ajoutèrent des fcholies compofées pour la plijpart de paffages des Pe-
3, res, qui faifoient affés connoitre les articles qu'on ne vouloir pas, ou qu'on
„ n'ofoit pas exprimer. . . On y hit voit pourtant, qu'il eft convenable que
„ les Prêtres gardent le Célibat, S' qu'ils ne s'occupent que du fervicede Dieu,
„ fins fe mêler des affaires du monde. . . . On appella cet ouvrage Liturgie
„ de l'EgUfe de Suede, conforme i l'Eglife Catholique dr Orthodoxe. On l'imprima
„ en Latin ôc en Suédois, afin qu'on pût dire . . . la Meffe dans les deux
„ langues . . . (dans l'intention cependant) que lots qu'on y feroit accoutumé,
„ on n'employât . . . que la langue Latine. . . . Les Ecclefiaftiques (Lu-
„ theriens) de Stocholm cenfurerent cette Liturgie par la bouche d'Abraham
„ Reûeur de l'Ecole. . . . Le Roi indigné les priva de l'exercice de leurs
„ fonaions. . . . Ils en appellerent à l'affembléegenerale de l'Eglife de Suede".
Four abreger, la Liturgie rencontra tant de contradidion de la part des Lutheriens
& de leurs fauteurs, que le Roi fut obligé d'en dépouiller plufieurs de
leurs Benefices, & même de les exiler. On fit fi bien que les Ordres feculiers
du Royaume foufcrivirent à cette Liturgie, mais cela n'empêcha pas que l'on
ne la cenfurât toujours de vive voix H par écrit. Du côté des Catholiques
on fe plaignit des égards & des menagemens que le nouveail formulaire demi-
T.utherien ^ demi-Catholique affedoit pour des Heretiques. Le Pape vouloir auffi
que le Roi fê déclarât ouvertement. Enfin pendant que la Liturgie continuoit d'avoir
le fort de fe fiire defiprouver des uns & des autres, l'Archevêque d'Uplâl
(Laurent) que le Roi avoit gagné, fe repentit de l'avoir fignée Se protegée: 6c
les
( * ) Guftave £ncyÔa qui mourut en 15(So.'
( i ) Apres E r i c fon frere aine qu'il détrôna.
0) Tué du P. /< fir«« Tom. IV. des Liturgies:
Tame III. Part. II. X x x x
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