était alors presque à sec. A ce torrent succédèrent
quelques champs de maïs, et enfin la rivière Méllé, qui
suit les sinuosités des pays de collines circonvoisins au
lac Aïk : sa pente est très-rapide, et il doit être impossible
de la traverser. Après deux heures de marche, nous
vînmes dans un col étroit, qui débouche dans la plaine
de Djari. Nous rencontrâmes là une foule de gens qui
se rendaient au marché de Sirba, et qui menaient devant
eux grand nombre de bestiaux; d’autres conduisaient
des mules chargées de coton ; enfin il y en avait
qui apportaient du grain, mais en petite quantité ; d’où
il ne faudrait pas conclure que le pays est infertile,
mais seulement que chacun cultive ,pour son compte.
Je m’étais écarté un moment du sentier pour conduire
ma mule dans une prairie, et l’y faire reposer en
attendant mes compagnons, qui étaient restés en arrière.
Je marchais sans m’inquiéter des cris que poussaient
quelques laboureurs, lorsque tout à coup le terrain
manqua à ma mule, qui s’enfonça presque tout entière
dans une fondrière. Fort heureusement, je me
rejetai en arrière par un mouvement simultané, et
tombai sur la terre ferme, d’où je pus, avec l’aide de
quelques-uns de mes g e n s , dégager ma monture. Il
est à remarquer que rien ne révélait-ce danger : le
terrain était uniforme dans toute l’étendue de la prairie,
et plusieurs troupeaux y paissaient tranquillement
: mais l’instinct de ces animaux les avertissait
sans doute du péril, car aucun d’eux ne s’approchait
de la fondrière, quoiqu’à cet endroit les graminées,
dont ils sont friands, fussent en plus grande quantité
que partout ailleurs. Quelques-uns de mes gens me dirent
qu’on rencontrait beaucoup de fondrières analogues
dans le Godjam, particulièrement au pays de
Metcha, et que bon nombre d’individus y périssaient.
Laissant à l’est la plaine de Djari, nous inclinâmes
à l ’ouest, vers la chaîne q u i, à cet endroit, prend le
nom d’Amba Sel ; nous allâmes visiter une source d’eau
chaude, nommée Berberi Ouaha, qui sort d’un ravin. Durant
cette excursion, nous vîmes plusieurs plants de
cafiers qui nous parurent être semblables à ceux de la
Martinique. La source thermale jaillit à côté d’un torrent
d’eau froide ; le terrain d’alentour est un schiste
argileux coloré par l’oxyde de fer, et on trouve dans le
torrent des blocs roulés de porphyres, mêlés de carbonate
de chaux cristallisé.
Un grand nombre de malades, hommes et femmes,
se baignaient à cet endroit. Ils consentirent obligeamment
à me laisser y plonger mon thermomètre, qui
monta à 35°. Je pris en même temps la hauteur barométrique
et la hauteur méridienne du soleil, tandis que
le docteur remplissait ses fonctions de naturaliste. Cela
fa it, nous revînmes dans la plaine de Djari, où nous
fîmes halte pour tenir conseil et décider si nous irions
le jour même jusqu’au lac Aïk; mais comme personne
de nous ne connaissait la route, il fut résolu que
nous nous arrêterions dans un village que nous apercevions
à petite distance, sur le sommet d’une colline
qui borde la plaine. Nous y fûmes bien a ccue illis, et
lorsque nous eûmes dressé notre tente dans une cour
spacieuse, appartenant au chef de l’endroit, nous re