une goutte d’eau. La pluie ne cessa qu’à minuit; elle
avait été amenée par lés vents d’E. S. E. et tint le thermomètre
à \ 5° ; les vents ayant ensuite passé à l’ouest,
il baissa successivement jusqu’au matin, à six heures,
où il était à \ 0°.
Je fis lever mon monde de grand matin pour ordonner
les apprêts du départ, pensant que, suivant la coutume
des Abyssins du Tigré, on se remettrait en route
de bonne heure ; mais le roi avait à recevoir les chefs
gallas qui, pendant la nuit, étaient arrivés de tous côtés,
en faisant trembler le sol sous le galop de leurs chevaux.
A dix heures seulement, trois coups de baguette sur
le nagarit donnèrent le signal de seller les mules et de
démonter les tentes : cinq minutes après le roi se mit
en marche. Nous prîmes alors la direction du S. 57° O.
A une heure je relevai au S. O. la petite chaîne de Ka-
raberak, qui me parut être à douze milles de distance
: du point où j ’étais placé, elle prend la forme
d’un profil humain. A deux heures trois quarts, nous
vînmes camper dans la prairie de Lebou. Le terrain
n’avait guère varié de hauteur depuis Angolola, et le
pays était toujours complètement déboisé. Les soldats
brûlaient de la bouse de vache pétrie avee de la paille et
séchée au soleil. On portait du bois pour l’usage du roi
depuis Angolola.
Le camp fut levé le lendemain à neuf heures et
demie : on se dirigea vers la hauteur de Tchollé. Arrivés
sur le mamelon de Fich é, où se trouve une
ferme du roi, nous aperçûmes la plaine de Guermama,
terminée par la chaîne fort remarquable de Hierère,
où l’on voit ençore les ruines du palais des anciens
rois d’Éthiopie. Nous descendîmes un gradin qui nous
mena à la rivière Guermama : cette descente a nom
Lebou Agademette. Pendant quelque temps, nous suivîmes
la rive droite du Guermama. Ce terrain est légèrement
accidenté et parfaitement cultivé ; il fait encore
partie du territoire Abitchou. La plaine qui borde la
rive gauche appartient à la tribu de Guermama, qui
s’étend jusqu’aux premières collines de la province
Boulga. La vue se termine à l’est par un chaînon appelé
Gara, qui fait la limite de la tribu de Finefinie.
Nous commencions à distinguer au loin, vers le sud,
l’ancien volcan de Zoukoala, dont le cratère est rempli
d’eau. A une heure le roi fait une halte pendant laquelle
la cavalerie, s’inquiétant fort peu d’etre sur un terrain
ami, galoppe en tous sens pour piller du bois et de la
paille dans les villages que les habitants ont prudemment
abandonnés. Line demi-heure après on se remet
en route.
Toutes les chaînes qui se trouvent devant nous sont
couvertes de nuages épais qui s’y sont accumulés, et
bientôt un vent violent, accompagné de grêle, vient
forcer l’armée à s’arrêter : tous les animaux refusent
d’avancer et présentent la croupe au vent. Les tentes
étaient en arrière, et je n’eus, pour ainsi dire, d autre
abri que ma blouse de voyage : aussi, jamais de ma v ie,
n’éprouvài-je un froid aussi vif que celui qu il me fallut
endurer là pendant deux heures, accroupi sur 1 herbe.
A quatre heures, la grêle étant passée, et le vent chassant
la pluie avec force, quelques soldats voulurent se