d’aller la visiter, chose d’autant plus fâcheuse que les
habitants prétendent qu’au-dessous de la voûte il y a
une pierre énorme, qui s’y tient suspendue sans être
attachée.
Ce village était alors un séjour fort dangereux par
sa proximité des réfugiés politiques, qui ne vivaient
que de pillage ; mais la recommandation de notre
guide, qui était connu des habitants, fut toute-puissante
, et jamais nous ne reçûmes une hospitalité plus
'empressée.
La montagne de Cobate est à la même hauteur que
celle de Dafate; aussi y faisait-il le même froid : nous
fûmes obligés, pour nous en préserver, d’allumer un
grand feu. Je ne pouvais comprendre pourquoi, dans
ce pays, encore plus exposé que le Tigré aux intempéries
de l’air, on construit des maisons ouvertes à tous
vents. Depuis notre entrée dans le Lasta, nous n’avions
pas encore vu une muraille en pierre; toutes étaient
construites avec des bûches fichées en terre et reliées
par des branches flexib les, ce qui laissait de grands
interstices, comblés, il est vrai, avec un peu de mortier,
mais si négligemment qu’il tombait bientôt, et
que la maison restait à jour. Outre l’inconvénient du
froid, le Lasta nous offrait encore celui d’une exécrable
nourriture : on y mange presque exclusivement de la
purée de graines de lin , et avec tant d’épices que nos
domestiques mêmes ne pouvaient y goûter sans grimace.
En quittant le village de Cobate, nous descendîmes
dans une vallée aussi large que celle que nous avions
traversée la veille. Elle était sillonnée de chaînes de
collines qui semblaient des ramifications des monta-
enes latérales. Ces collines sont très-boisées : on ne
o
trouve des cultures que près des villages.
Nous arrivâmes à onze heures du matin au village
de Mezgar Amba. La première personne que nous rencontrâmes
fut une jeune fille qui, en reconnaissant
notre guide Ouelda Semato, lui sauta au cou et cria
de toutes ses forces : « Messeratehe. « Aussitôt tous les
habitants vinrent nous entourer. Ce fut l’occasion d’une
grande joie dans le village que ce retour; car après la
bataille de Zobel, les parents de Ouelda Semato avaient
perdu l ’espoir de le revoir : aussi fûmes-nous grandement
choyés; la meilleure maison nous fut donnée , et
chacun des parents de Ouelda Semato nous apporta un
tribut de sa reconnaissance. Nous profitâmes de cette
bonne disposition pour rester deux jours à Mezgar
Amba. Je relevai les sources du Tellaré à l’ouest, 15°
sud ; la ville de Tlascalaré, une des plus importantes
du Lasta, nous restait au sud 25° ouest. Les productions
de ce pays sont le tabac, le b lé , l ’orge, le lin.
La nature du terrain est volcanique.
Nous reprîmes notre route le 41, en nous dirigeant
sur une crête dont le point culminant est Abouéye
Méda. Nous avions fait à nos hôtes et à notre guide
quelques faibles cadeaux qu’ils reçurent avec reconnaissance.
Ils vinrent tous nous conduire, et nous quittèrent
en exprimant des voeux sincères pour le succès
de notre voyage. Quatre milles nous séparaient encore
d’Abouéye Méda. Nous nous arrêtâmes à la première
rampe pour faire reprendre haleine à nos animaux, et