vent changeait souvent de direction, et des nuages
épais s étaient amoncelés dans le sud-ouest. Bientôt
nous aperçûmes une averse tomber sur la ville d’Angolola,
tandis que nous ne reçûmes pas une goutte
d’eau.
Le 1er mars, je demandai au roi la permission d’aller
chasser l’hippopotame : ce n’était qu’un prétexte pour
poursuivre mes travaux. Le roi y consentit et me
donna un guide. M. Rochet se mit de la pa rtie, et le
lendemain nous quittâmes Angolola à dix heures du
matin. J emportai mon cercle à réflexion, mon chronomètre
, une boussole et mon carton à dessins. M. Rochet
portait de l’esprit-de-vin pour conserver, s’il y
avait lieu , un foetus d’hippopotame. Il avait en outre
une carabine et un sac de cartouches qui faisait la
charge d un homme. Après avoir traversé une grande
prairie, nous arrivâmes à la rivière Tchatcha. Nous
avions, à 400 mètres à droite, le village de Fatcho,
à l’ouest celui d’Abadara, et en face celui de Kalia
Tchatcha. L AmbaMendida nous restait au nord-ouest.
Nous passâmes près du village de Godetti, et une demi-
heure après, en descendant les collines qui bordent
la Tchatcha, nous laissâmes Ouoyou à droite, et
au sud 35° est, le bouquet d’arbres de l’église de Tcher-
kos; puis nous passâmes successivement devant les
villages Ipso, Korké, Ouokaîo Santo. Jusque-là notre
route fut le nord 30° ouest. Nous traversâmes un ruis-'
seau appelé Abitchou Ouanze, qui vient du sud-ouest
et va se jeter dans le ravin de Tchatcha. Les collines
que nous laissâmes à droite et qui bordent le ravin,
font partie du territoire de la tribu d’Abdalla; à trois
lieues environ, de l’autre côté du ravin, on aperçoit
un pays appelé Ouorkégour. Le district que nous traversâmes
alors se nomme Ouaiou ; à un mille sur la
droite nous apercevions Adisamba, à deux milles sur la
gauche Gamenia.
Après cinq heures de marche, nous parvînmes au
village Terrater, où notre guide nous fit arrêter et nous
conduisit dans la maison du chef. Notre route jusque-
là avait été sur un terrain de production volcanique,
recouvert d’un humus végétal assez épais. Ce pays est
extrêmement peuplé; la culture y est très-soignée et
produit le b lé , l’org e, les len tille s, et une espèce particulière
qui ressemble à la vesce et qu’on appelle
chimbera. Les arbres y sont rares; on n’y voit que des
mimoses. Quoique ce village n’eût été que récemment
soumis, tout le monde y parlait la langue amarah.
Une femme d’une physionomie spirituelle et agréable,
quoiqu’elle ne fût plus jeune, vint causer avec nous et
examiner nos vêtements. Comme nous entretenions la
conversation pour avoir le loisir d’examiner le s ien ,
d’autres femmes, qui se tenaient à distance, la plaisantèrent
en lui demandant si elle n’avait pas dessein d’aller
dans notre pays. «Pourquoi pas? répondit - elle
sans hésiter, si je trouvais quelqu’un qui voulût m’y
emmener. » En voyant cette femme si européanisée,
nous pensâmes qu’elle avait dû recevoir ces idées de
sociabilité de l’ambassade anglaise. Quoiqu’elle annonçât
trente ans, la vivacité de ses y e u x , ses longs
cheveux noirs tressés gracieusement et retombant à la