dont je pris une vue ainsi que des points environnants.
Nous fîmes ensuite nos préparatifs de départ pour aller
rejoindre nos gens chez Abba Mali.
Le ravin de Debra Libanos court du sud au nord ; la
rivière qui coule au fond s’appelle Ouéna; elle reçoit
celle de Selmi et celle de Tchagalë, puis elle va se
joindre à la rivière Djemma. Le talus sur lequel est
bâti la ville se nomme Zigamale, le talus opposé Kabi.
Celui-ci appartient à un plateau très-étroit qui se relie
au plateau général par une chaussée qui l’est encore
p lu s, ce qui en fait une forteresse facile à défendre.
-On y voit plusieurs villages.
La première maison de Guerare que nous aperçûmes
était entourée d’une palissade élevée. Nous en conclûmes
que c’était là la demeure du seigneur de Selalé
Moguère; effectivement nos domestiques ne tardèrent
pas à en sortir pour venir au-devant de nous; un soldat
d’Abba Mali accourut aussi a notre rencontre.
Notre tente était dressée dans la cour, et à côté s’en
trouvait une autre pour nos gens ; nous entrâmes immédiatement
dans la première pour faire notre toilette,
et nous jugeâmes favorablement notre hôte à la précaution
qu’il avait eue de faire placer à notre porte un
bâtonnier, chargé d’empêcher l’approche des curieux
indiscrets.
Nous eûmes le temps de nous reposer, et nous fûmes
invités à venir chez Abba Mali. Nous le trouvâmes assis
sur un alga garni d’un tapis assez large pour recouvrir
le sol à quelque distance en avant. Il avait revêtu son
grand costume de cérémonie, et trônait comme un souvèrain
; sa physionomie était avenante et spirituelle,
malgré ses lèvres épaisses et son nez épaté. Il nous
questionna avec beaucoup de convenance sur le but et
les motifs de notre voyage ; il nous demanda si notre
roi était le même que celui de MM.Harris et Beke. Enfin
il nous dit : k Je suis le maître ic i; je suis riche, que
vous faut-il? parlez ; je vous donnerai tout ce que vous
voudrez. Reposez-vous pendant quelques jours et n’ayez
nulle crainte pouf la suite de votre voyage ; car vous
pouvez compter sur moi pour vous faire traverser le
Nil en toute sûreté. » Nous le remerciâmes, et lorsque
nous fûmes rentrés sous notre tente, il nous envoya un
boeuf, un mouton et cinq pots de miel. Nous avions
oublié, en partant d’Ankober, d’emporter notre provision
de café. Pensant que c’était chose commune au
pays galla, nous en avions demandé un peu à Abba
Mali. Il parut d’abord ne pas nous comprendre; mais
il se ravisa bientôt et nous dit : a Je vais en envoyer
chercher. » Quelque temps après un cavalier partait
au grand galop. Quand il r e v in t, le cheval était en
sueur; mais la figure réjouie du messager témoignait
de la réussite de sa mission. Il entra chez nous d’un
air triomphant, et déroulant sa ceinture, il en détacha
un coin qui contenait trois grains. « Voilà, nous d it-il,
ce que vous avez demandé.» Qu’on juge de notre hilarité.
Nous renvoyâmes notre homme avec un cadeau,
lui disant que nous le remerciions de son z è le , mais
qu’il nous aurait fallu une plus grande quantité de
cafe, attendu que nous en faisions une boisson et non
un médicament, comme il le pensait. Le soir même