vions du bord une série de pics qui terminent des chaînes
granitiques : leur base est couverte de sables apportés
par les vents. En s’avançant vers l’Akaba, on
marche dans une plaine de sable cimentée par les
pluies et les détritus des montagnes voisines. Ces m ontagnes,
en partie composées d’amas de silice et d’argile,
ressemblent à des sels cristallisés ; toutes les arêtes
sont anguleuses, et ressemblent à des cristaux superposés.
Nous reprîmes la mer le 14, et le 17, nous mouillâmes
à Tor, dont la rade est formée par un banc de
récifs qui s’étend à l’entrée comme un môle à fleùr
d’eau : quelques travaux suffiraient pour la rendre
excellente. Des bouquets de palmiers donnent à la
côte un aspect verdoyant, et font concevoir du pays
une opinion bien démentie par la réalité.
Un moine grec exerçait les fonctions d’agent consulaire
pour toutes les nations : il servait à la fois les
intérêts des Français, Anglais, Russes, etc. C’était
un brave homme, manchot et boiteux , et sans aucune
prétention. Chose extraordinaire, sa modestie
était en raison inverse de la pluralité de ses titres consulaires
, et ses appointements suivaient la même proportion;
car ils ne lui permirent pas de nous offrir
gratuitement un repas composé de fruits du pays
et d’eau-de-vie qu’il distillait lui-même. Après cette
collation, il voulut nous conduire au jardin du couvent
de Terre-Sainte, situé à deux milles au nord de la
ville. Pour faire cette promenade , il n’était pas fâché
de nous louer des baudets ; mais les Arabes ayant manifesté
les mêmes prétentions, il se vit réduit à employer
les formes diplomatiques à leur égard, en nous
priant de simuler une promenade à pied, tandis que les
montures nous attendraient à une portée de fusil de la
ville.
Ce jardin est tout simplement une plantation de palmiers,
le seul arbre qui vienne ici avec succès : on y
voit aussi des poiriers, mais rarement des poires, ce
qui ne peut tenir qu’à l’état salin de cette côte ; car
le sol est bien arrosé par une source thermale, qui jaillit
entre des roches calcaires, au pied des montagnes qui
limitent le territoire de Tor.
Nous partîmes le 18, et jusqu’au 2 8 , jour de notre
entrée dans le port de S u e z , nous fûmes obligés de
procéder parle même genre détestable de navigation.
Nous trouvâmes à l’ancre un bâtiment à vapeur de la
compagnie des Indes, qui attendait pour repartir la
malle d’Angleterre : on nous dit que le précédent avait
fait naufrage par le travers de l’île Naman.
Les embarcations qui viennent de la rade peuvent
accoster la ville en deux endroits : d’abord sur la
plage en dehors du port, ou bien par un canal compris
entre la côte et un banc de madrépore qui lui est
parallèle. Ce canal a un mille de longueur ; il aboutit à
un môle en pierre de taille qui ferme le quai de la
ville. C’est sur ce quai que le pacha faisait édifier
un magnifique hôtel pour les voyageurs de l’Inde. La
compagnie des Indes avait demandé à le construire à
ses frais; Méhémet Ali a préféré en faire la dépense.
Le quai commence à cet édifice et se prolonge
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