rendre compte. Néanmoins, comme les prévisions de
cette nature portent le cachet éminemment hypothétique
, et sont à un bien plus haut degré discutables
que des principes d exécution fondés sur des renseignements
positifs, nous avons cru devoir établir cette
différence dans la division de cette notice, en réservant
pour la fin quelques idées qui, même dans notre
conviction, ont bien plus d’incertitude que les détails
pratiques fournis dans les chapitres antérieurs.
U n’est peut-être pas maintenant, dans le monde, de
lieu qui se trouve plus avant compromis dans les intérêts
européens que la mer Rouge, et conséquemment
les pays circonvoisins : songer à exercer une action
commerciale en l’un quelconque de ces points, c ’est
affecter une initiative qui n’est pas sans embarras,
excepté toutefois pour la nation qui a tellement identifié
son commerce à sa politique, que les deux ne font
phis qu’u n , et que la diplomatie des États ses rivaux
n a jamais à se tromper, pas plus sur les motifs de ses
actes, que sur leur signification réelle. De son côté,
1 Angleterre gagne à cette unité une sûreté, une rapidité,
une étendue d’action qui rendent sa concurrence
en quelque sorte irrésistible sur le champ commercial :
dans le cas de conflit, jamais de demi-mesure, jamais
un pas en avant suivi de deux en arrière ; toujours, au
contraire, un progrès sur un autre : comment le succès
ne serait-il pas au bout?
Nous avons déjà eu l’occasion de le dire, quelque
blessante que soit souvent cette manière d’agir pour le
droit commun et pour ce qu’ou appelle l’équilibre européen,
il ne serait pas rationnel d’en faire l’objet d’un
reproche au gouvernement anglais : avant tout, c’est
une nécessité qu’il subit ; et qu’on ne croie pas qu’elle
ne lui soit pas quelquefois gênante, car toute nécessité
a ses inconvénients. Le commerce et la politique de la
France sont placés dans d’autres conditions relatives,
et il est assez singulier de voir les gens qui déblatèrent
contre le système suivi par l’Angleterre, partir du
même point pour blâmer celui de la France : la critique
est si conciliante! Or, il est une chose qu’on n’a jamais
remarqué que pour en tirer des conséquences extrêmes,
par suite absurdes; c’est que la majeure partie du revenu
public, en France, provient de l’industrie du sol,
et en Angleterre, du commerce extérieur, et qu’il né
saurait en être autrement. Les faits, même les plus
généraux, ont leur mauvais côté qui indique le sens des
améliorations; mais cette généralité ne doit-elle pas
poser des limites infranchissables au contrôle à exercer
sur eux?
Toujours est-il que cette dualité d’action du gouvernement
français le contraint, en certaines circonstances,
à mettre en seconde ligne les intérêts de son
commerce, et que là surtout où les tentatives de ce lui-
ci doivent attirer la concurrence acharnée des Anglais,
ce serait à la politique de la France le mépris de
toute prudence que de se jeter dans la lutte : car l’issue
du conflit commercial ne pouvant être douteuse, ce
serait y engager en pure perte un drapeau qui n’y est
pas compromis.
Le rôle de la France est, comme nous l’avons dit,