Édefe Ouaha lorsqu’elle a pris son cours dans la plaine.
Nous nous dirigions alors vers la chaîne de Daonte, en
suivant la vallée Yedjou.
11 était onze heures lorsque nous rencontrâmes deux
Abyssins, dont le costume annonçait des habitants du
Choa. Nous prîmes langue avec eu x , et ils nous apprirent
que, revenant du camp de Ras Ali, ils retournaient
porter à leur maître Sahelé Sallassé la réponse au message
dont il les avait chargés pour le Ras. Cette rencontre
était trop heureuse pour que nous ne cherchassions
pas à la mettre à profit ; nous leur demandâmes
l’honneur de leur compagnie, et comme de leur côté
ils entrevirent un cadeau, ils répondirent que tout
l’honneur était pour eux. Désormais sûrs de ne plus
nous fourvoyer dans ces chemins inextricables, nous
nous remîmes en marche d’un pas beaucoup plus
allègre.
Une heure après nous nous arrêtâmes au bord du
ruisseau Dabissa, dont la source est à Maye E tti, et
qui se jette dans la rivière Édefe Ouaha. Nous étions à
la bordure du district de Ouaré Kallo : mais il faut
distinguer ce pays, qui fait encore partie de la province
Yedjou, de celui du même nom qui est à la
frontière du Choa. La population de ce dernier est
galla, tandis que nous allions entrer sur âne terre
habitée par des Amaras.
Après le Dabissa, nous trouvâmes la rivière Mersa,
dont le cours est très-sinueux. Quoique nous fussions
dans la saison sè ch e , son lit, large d’environ quarante
pieds, et profond de deux ou trois, était plein. Notre
route était semée de hameaux et de villages dont les
maisons étaient, à l’instar de celles des Azébo Gallas,
entourées de haies vives de kolkouals. Tous les pays
circonvoisins étaient musulmans, et comme ce jour-là
était un vendredi, les croyants, réunis dans les mosquées,
déployaient une ferveur qui se prolongea jusqu’à
six heures du soir; car jusque-dà nous entendîmes leurs
chants et ne rencontrâmes âme qui vivë.
Cependant nous fîmes décharger nos mules à l’entrée
d’un gros bourg, près de la rivière Reguebo:
cette rivière se joint à celle de Mersa, et fait comme
elle mille contours dans la plaine. A l’issue delà prière,
les hommes qui sortaient de la mosquée nous ayant
reconnus pour chrétiens, par le fait que nous nous
étions abstenus d’entrer dans leur temple, firent semblant
de ne pas nous apercevoir. Une femme vint cependant
nous apporter quelques pains et une jatte de
lait, en nous exprimant le regret de voir ses compatriotes
comprendre aussi mal la loi du prophète, qui
ordonne la charité envers tous. A huit heures, ce fut
encore un pauvre homme qui nous apporta, lui aussi,
du lait et quatre pains : il s’excusa de ne pas faire
mieux , sa misère ne lui permettant pas de nous offrir
un gîte. Il blâma également la conduite de ses compatriotes
à notre égard. Nous veillâmes toute la nuit
pour écarter les hyènes, qui rôdaient en grand nombre
autour de notre tente ; mais, grâce à cette vigilance,
nous n’eûmes aucun accident à déplorer. Le m a tin ,
quelques instants avant notre départ, nos domestiques
établirent, avec les matrones du lieu; un petit marché