Chafa, sur lequel est bâtie la ville de Koterme. Nous
reprîmes notre route dans la même direction, entre les
villages Gouretti, Anka, Solima, a gauche, et Sa-
ramba, Ougama, à droite. Il était une heure après midi
quand nous arrivâmes à Madjétié. C’était jour de
marché; quantité d’étrangers venus des pays gallas et
adals se trouvaient mêlés aux habitants. Au lieu d’etre
dans une plaine ouverte, comme dans les autres endroits
d’Abyssinie, ce marché se tenait dans une enceinte
fermée par des palissades, et à la porte étaient
apostés des gardes qui en faisaient la police. Cette
précaution évitait des disputes et facilitait la collecte
des octrois.
Ne voulant pas donner dans la foule, nous nous détournâmes
un peu à gauche, et continuâmes d’avancer
malgré les cris de quelques soldats ; ce ne fut que lorsqu’ils
nous eurent sommés par la vie du roi, que nous
nous arrêtâmes en leur demandant ce qu’ils nous voulaient.
Le sous-gouverneur d’Éfrata, celui qui remplaçait
le gouverneur Ato Badelou, gendre du roi,
vint lui-même nous déclarer qu’il avait 1 ordre de ne
laisser passer avec nous que deux domestiques; les autres
devaient attendre à Madjétié qu’une décision fut
prise à leur égard.
Force fut de se soumettre à cette condition. En attendant
que nous pussions convenir de nos faits, le gouverneur
intérimaire nous donna un guide pour nous
conduire au village de Sembelète, où nous devions
passer la nuit. Nous descendîmes d’abord dans la plaine,
à l’endroit où se termine le plateau de Guemza; nous
passâmes un ruisseau considérable nommé Mouke
Ouaha, et, un peu plus loin, un de ses affluents, Tou-
kour Ouaha. Arrivés dans la plaine, nous tournâmes
un peu sur la droite, en nous dirigeant dans le lit d’un
torrent qui vient du sud. A droite nous avions le plateau
de Guemza et la grande chaîne qui prend le nom
d’Éfrata, à gauche une série de monticules vers lesquels
nous nous dirigions ; avant de les atteindre il nous
fallut traverser successivement les ruisseaux Zima
Amba, Gueule Ouanze et Sembelète.
En arrivant dans le village de ce dernier nom, notre
guide somma le chef de nous héberger : une maison nous
fut donnée immédiatement. En attendant le souper,
complément indispensable d’une journée de voyage,
j’allai parcourir les environs. Il était presque nuit
lorsque le gouverneur vint nous rejoindre, pour convenir
du nombre de domestiques qui nous suivraient
Un logis spacieux fut accordé à ceux qui restaient,
et on devait veiller à ce que rien de ce qui est nécessaire
à la vie ne leur manquât. Nous obtînmes
d’emmener quatre domestiques au lieu de deux, ce
qui, avec l’alaka Ouelda Kidane, portait notre nombre
à sep t, sans compter le guide et les deux hommes du
Choa. Le lendemain nous prîmes congé du sous-gouverneur
et de nos hôtes de Sembelète. Notre guide, qui
était justement de la maison d’Ato Badelou, nous raconta
comme quoi à quelque six mois de là, un voyageur
européen leur avait causé bien du trouble à Madjétié.
Nous lui demandâmes quel était cetEuropéen : au portrait
qu’il nous en fit, je reconnus sur-le-champ M. Évain.