lier dans le Choa que dans l’Amara, où les pains de sel
servent à la fois de monnaie et d’aliment.
Le 6 février nous apprîmes que la précaution d’envoyer
un double messager n’était pas inutile, car le
choum d’Éfrata avait gardé notre lettre ; celui de Yas-
sani, certainement informé de ce qui se passait, n’en
continuait pas moins de nous faire bonne mine, et redoublait
au contraire de prévenances, sans doute pour
nous dorer la pilule. Mais, certains que notre homme
parviendrait à Angolola, nous comptions rendre au
choum, quand nous nous en irions, ce qu’on appelle
vulgairement la monnaie de sa pièce. Jusqu au 11 nous
n’eûmes aucune autre nouvelle, et l’impatience commençait
à nous gagner, car nous perdions là un temps
précieux. Nos domestiques, qui trouvaient partout des
gens qui leur donnaient à boire pour les faire causer,
étaient d’un avis tout différent, et ne paraissaient pas
désireux de changer de résidence. Mais enfin le 4 1 ,
à midi, un courrier nous apporta une lettre du roi
qui nous autorisait à venir le trouver à Angolola.
Pas de réponse deM. Rochet : peut-être ne l’avait-on pas
trouvé.
Nous nous couchâmes tout heureux, et nous nous
endormîmes bientôt du sommeil du juste; mais a
minuit nous fûmes réveillés par un tapage horrible,
cliquetis d’armes, piétinement de chevaux. Bientôt
notre logis fut envahi par une foule bruyante. Au
premier c r i, chacun avait couru à sa lance. Fort heureusement
les envahisseurs avaient les intentions les
plus pacifiques du monde : c’étaient les officiers du
gouverneur d’Éfrata qui ayant reçu l’ordre le soir
même de nous faire arriver à Angolola au plus vite,
n’avaient pas cru devoir mettre une nuit de retard
à son accomplissement. Ils voulaient donc nous faire
lever le camp à l’instant même; on pense comme nous
les reçûmes à pareille heure : nous ne bougeâmes pas,
et les envoyés voyant l’inutilité de leurs instances, se
résolurent à passer la nuit dans la cour, après avoir
mis en réquisition tous les lits du village. Plusieurs
même exigèrent davantage, et il paraît qu’on les
satisfit en tout, car le lendemain ce fut à notre tour
de les faire lever.
Nous quittâmes donc Cassebié le 12 février pour
nous rendre à Madjétié, notre première halte. A deux
cents pas nous traversâmes le ruisseau d’Aguera Ma-
riam, qui tombe en cascade dans la plaine de Chafa :
sur le bord opposé, nous étions dans le district de
Moguéra. Nous passâmes successivement près des villages
de Beurat âfer et Chéréta, et traversâmes un torrent,
après lequel nous descendîmes par une pente
facile le territoire de Djé Goubi; nous remontâmes
ensuite, etapereûmes, au sud! 5° est, le colde Madjétié.
Laissant à droite le couvent célèbre de Dirlik Amba,
et à gauche le village de Aléré Amba, nous franchîmes
un autre torrent, le Bissano, dont les deux sources sortent
de chaque côté d’une montagne qui s’avance comme un
coin dans le ravin qui encaisse ce ruisseau. Nous nous
reposâmes dans une petite prairie, à quelques centaines
de pas des villages Kolfo, Itatche. De là je relevai
au nord un des gros mamelons de la plaine de