q ueuse , et elle aurait souvent l’avantage sur celle de
Oualdia, composée en partie de marchands, si celle-
ci ne recrutait parfois des guerriers étrangers qui viennent
y chercher du renom. « Lorsqu’arrive un de
ces étrangers, nous d it - il, nous l’accueillons avec empressement;
tout le monde se cotise pour lui avoir des
boeufs et une maison. S’il est blessé dans le combat,
nous lui servons de famille : il est soigné et nourri
jusqu’à parfaite guérison. Notre pays est le plus généreux
et le plus loyal de l ’Abyssinie, parce que chez
nous on ne travaille que pour acquérir un renom et
jamais pour un but mesquin. Quelle femme de l’Yedjou
voudrait épouser un lâche? Si quelquefois l’une d elles
consent à livrer son coeur à un homme gracieux,
mais qui n’a pas d’exploits à citer, elle lui fait acheter
cette faveur en lui répétant à chaque embrassement :
« Je te méprise ; mais Dieu me pardonne ce baiser,
car tu es si beau ! »
Pendant que notre hôte nous entretenait ainsi,
vinrent à passer plusieurs guerriers de Goura qui, à
cause de la distance où se trouvait leur ville du lieu
de combat, n’avaient pu retourner y passer la nuit.
Voyant de la lumière chez nous, ils demandèrent à la
porte : « Frère, y a -t-il un morceau de pain et un
verre d’hydromel?» La porte leur fut ouverte, et ils
partagèrent notre souper. Ces gens auraient pu tout
aussi bien frapper à la porte des parents de 1 une
des victimes de la journée, et peut-être ne leur aurait
elle pas été refusée, tant est grande la force d’une
coutume. On couchait côte à côte, et le lendemain on
s’égorgeait. Dans les duels ordinaires, la dette du sang
.est toujours réclamée parla famille du défunt; mais ici
le combat est tout à fait chevaleresque, sans haine, et
par conséquent sans vengeance. Un étranger vient-il
à passer au milieu du champ de bataille, il n’a rien à
craindre : les armes s’abaissent, et tout le monde se
range pour lui faire place.
La manière de combattre est tout à fait dans les formes
du duel; chacun choisit un homme et lui tient
tête. On ne lance pas le javelot : après s ’être mesurés
de 1 oe i l, les champions se portent des coups, parent
et ripostent. Tous ne s’engagent pas à la fois : pendant
qu’un certain nombre est aux prises, le reste se repose
à petite distance et surveille le champ de bataille pour
profiter des fautes commises par les adversaires. Ce
combat ressemble beaucoup au jeu de barres : lorsqu’un
côté, par feinte ou par fatigue, se retire, il arrive
souvent que le côté adverse le poursuit avec une
ardeur imprudente, et présente le flanc au corps de
réserve; c’est généralement dans ces mouvements de
retraite que se font les morts et les blessés; car, face
à face, les coups sont réciproquement parés avec tant
d’adresse, que deux champions luttent quelquefois
pendant deux heures sans pouvoir s’atteindre. Ce qui
contribue à répandre dans cette population l’opinion
qu’elle doit cette habitude de combattre à une malédiction,
c’est que jamais aucun gouvernement, ni les
excommunications de l’Église n’ont pu l’en empêcher.
Le marche de Oualdia se tient le mardi : on y trouve,
ainsi que nous l’avons dit, des négociants de presque