masquée par un détour de la chaîne; mais quand on est
descendu au niveau du gradin sur lequel elle est située,
dix minutes suffisent pour arriver aux premières maisons.
Avant de quitter le sommet de cet escarpement, le
voyageur ne peut faire autrement que de s’arrêter pour
contempler le panorama qui s’offre à ses regards. Ils
sont d’abord attirés par les rampes et les découpures
nombreuses de cette pente, où l’action vulcanique et
celle des torrents se sont réunies pour tourmenter profondément
le sol. Depuis le bord du plateau jusqu’à la
lisière de la vallée, tous les terrains sont riches de cultures
et garnis d’une multitude de villages. Au delà de
cette lisière, la vue se porte sur l’Aouache, qui, comme
le Nil dans la vallée d’Égypte, forme un ruban bleu
aux bandes vertes dans une plaine aride et sablonneuse.
Enfin, à la bordure opposée sont des chaînes
basses qu’on peut appeler chaînes de collines, en comparaison
des hautes montagnes de l’Ethiopie. Elles sont
peuplées par des tribus gallas, parmi lesquelles on distingue
les Aroussi, les Itou et les Ourdjel. La population
de la vallée est aussi galla dans toute sa partie méridionale;
les tribus de Mindjar et de Kereyou sont limitrophes;
les Adals occupent le reste du terrain jusqu’à
Tedjoura.
Après avoir donné quelques instants à ce coup d’oeil,
nous descendîmes vers une rampe dont le niveau est à
200 mètres au-dessous de l’endroit où nous étions. Là
nous traversâmes le torrent d’Aïrara, et tournant l’arête
qui nous cachait la v ille , nous aperçûmes bientôt
les maisons bâties sur la surface d’une montagne
mais que, songeant aux fatigues de mes précédents
voyages, il avait craint qu’une campagne faite à la
course, une espèce de charge de cavalerie, ne fût au-
dessus de mes forces, ce qui serait d’autant plus fâcheux
que, si je tombais malade dans le pays galla et
restais en arrière, il n’y aurait là aucun moyen de
me sauver. Je lui répondis que la résistance que
j ’avais déjà opposée à beaucoup de fatigues m’était
un sûr garant que je supporterais encore c e lle -ci.
« Fort bien, me dit alors le roi ; ce que j’en ai fait et
dit était dans votre intérêt. Quant à moi, je serai charmé
d’augmenter mes forces des quelques fusiliers dont
vous vous ferez accompagner, et ne serai pas fâché
que vous ayez l’occasion de comparer mon armée à
celle du Tigré, pour m’en dire ensuite votre opinion. »
Avant de nous séparer, nous fîmes nos conventions
pour le voyage du docteur Petit.
Le lendemain, à six heures du matin, le roi nous fit
encore appeler pour congédier M. Petit, et me demander
si je persistais dans mon projet de suivre la campagne.
Après quelques paroles échangées, nous sortîmes
pour aller faire nos préparatifs de départ.