son isolée, où il nous laissa,, en nous|disant]qu’il allait'
nous faire apporter de l’eau, du bois, et à souper. Mais
les effets de cette promesse furent plus longs à venir.
Comme il se faisait tard, nous envoyâmes nos bommes
en quête de l’eau et du b o is, nous résolvant à manger
nos provisions, ce qui constituait une très-maigre
chère. Il était neuf heures du soir lorsque nous vîmes
arriver le koadaré et son seigneur, avec deux ou trois
servantes, nous apportant un plat de graines de lin ,
quelques mauvais pains et un pot de bière. Le seigneur
entama alors un long discours, qui le força
bientôt à s’asseoir, et dans lequel, énumérant toutes
les misères de la localité et les pertes qu’il avait personnellement
essuyées pendant la guerre, il conclut
par nous parler de la coutume qu’avait conservée le
pays de Late de prélever un droit de passage sur les
étrangers et les marchands. Je le laissai pérorer bien à
son aise ; quand il eut f in i, je lui montrai la porte du
doigt, et le sommai de remporter son affreux cataplasme
et ses autres victuailles, lui disant qu’elles ne
pouvaient convenir à des gens de notre qualité ; qu’à
l’égard du droit de passage, nous étions trop les amis
du Ras Ali pour le payer nulle part, et que pour un
cadeau volontaire, nous n’en faisions qu’aux gens qui
nous traitaient bien et n’en demandaient pas.
Notre homme fut étourdi et s’en alla sans dire un
mot. Mais le lendemain, comme nous nous disposions
à partir, on vint nous en empêcher et nous enjoindre
de décharger nos mules. Je ne voulus pas résister; je
fis mettre les bagages par terre, et j ’envoyai chercher
le choum. 11 arriva avec force salutations ; mais, sans
tergiverser, je le requis de faire accompagner sur-
le-champ un de nos domestiques, que j’envoyais au
Dedjazmatche Deresso, le gouverneur de la province,
qui se trouvait alors au pays de Late, à quelques heures
de distance seulement. Cette hauteur et ce sang-
froid en imposèrent tout à fait au choum ; il se hâta de
faire ce que je lui avais demandé, et commença à
craindre sérieusement de s’être attiré une réprimande.
Sa frayeur s’accrut encore lorsqu’il me vit, regarder le
soleil dans une lunette ; les habitants s’imaginèrent que
nous jetions un maléfice sur leur pays, et joignirent
leurs reproches à ceux de la conscience du malheureux
choum, qui finit par désirer plus ardemment de nous
voir décamper qu’il n’avait jamais souhaité de nous
retenir. Mais je tenais suspendu sur sa tête la colère du
gouverneur, et tous ses. efforts et ceux des habitants
furent vains pour nous faire accepter quelque chose
avant le retour de notre domestique. Il revint le soir
avec l’ordre donné par le Dedjazmatche Deresso de
nous traiter avec considération et de nous laisser passer
en franchise de droit. Ce furent alors des excuses à
n’en plus finir. «Maintenant, me dit le choum, que
mon maître a fait connaître sa volonté, je vais vous
amener un guide qui vous conduira chez mon frère,
où vous serez reçu avee tous les égards qui vous sont
dus. » Je fis semblant de recevoir mon homme à
merci, et, en échange de quelques pots d’hydromel,
je lui donnai une tunique qui avait été belle, et qui
était pliée de manière à dissimuler les injures du