leurs fusils, et nous dit : j’accepte ces deux-là. 11 fallut
bien nous exécuter, et nous y mîmes ¡encore toute la
grâce imaginable.
Le roi préparait une campagne pour aller soumettre
les Soddo Gallas, à la frontière du Gouraguié : je le priai
de me permettre de l’accompagner. Le docteur Petit
avait promis de donner ses soins à une de ses soeurs, qui
était malade dans la province de Tégoulet, et il fut décidé
qu’il s’y rendrait dans l’intervalle. M, Rochet devait
aussi suivre l’armée, mais il m’avertit que la campagne
serait périlleuse pour nos instruments d observation;
en conséquence, nous en fîmes deux parts
égales et convînmes d’en prendre chacun une, pour ne
pas tout exposer à la fois. Le samedi 1 8 , un envoyé
du roi vint me dire de sa part qu’il craignait que ma
santé ne me permît point de supporter les fatigues du
voyage, et qu’il m’engageait à rester à Ankober jus-r
qu’au retour de l’expédition.
Le 19, ce fut au tour des officiers du roi à venir
m’exhorter à ne pas aller à la guerre. Je leur répondis
quêtant venu pour la seule renommée de Sahalé Sa,l-
lassé, c’est à ses côtés que je voulais ê tr e , et que s’il
me privait de cet honneur, j e m’en retournerais dans
le Tigré, n’ayant plus rien à faire dans le Choa. J’allai
a l o r s moi-même avec le docteur Petit chercher la réponse
du roi; car je supposais bien qu’il m’en donnait à garder,
et je voulais connaître le fond de sa pensée. Nous
fumes admis sans hésitation, et il nous reçut avec son
affabilité ordinaire, protestant qu’il n’avait jamais eu
l’intention de me contrarier dans mon désir de le suivre ;
mais q ué , songeant aux fatigues de mes précédents
voyages, il avait craint qu’une campagne faite à la
course, une espèce de charge de cavalerie, ne fût au-
dessus de mes forces, ce qui serait d’autant plus fâcheux
que si je tombais malade dans le pays Galla et
restais en arrière, il n’y aurait là aucun moyen de
me sauver. Je lui répondis que la résistance que
j’avais déjà opposée à beaucoup de fatigues m’était
un sûr garant que je supporterais encore celle-ci.
«Fort bien, me dit alors le roi; ce que j ’en ai fait et
dit était dans votre intérêt. Quant à moi, je serai charmé
d’augmenter mes forces des quelques fusiliers dont *
vous vous ferez accompagner, et ne serai pas fâché
que vous ayiez l’occasion de comparer mon armée à
celle du Tigré, pour m’en dire ensuite votre opinion. »
Avant de nous séparer, nous fîmes nos conventions
pour le voyage du docteur Petit.
Le lendemain, à six heures du matin, le roi nous fit
encofe appeler pour congédier M. Petit, et me demander
si je persistais dans mon projet de suivre la campagne.
Après quelques paroles échangées, nous sortîmes pour
aller faire nos préparatifs de départ. Passant devant
la demeure de M. R o ch e t, nous vîmes , contre
l’usage, la porte fermée; nous en demandâmes la
raison, et l’on nous répondit qu’il était malade : nous
entrâmes alors pour le voir. 11 était couché et se plaignait
dé là fièvre; mais comme sa maladie n’était que
pour les Abyssins; il abandonna toute feinte vis-à-vis
de nous, et nous dit que son drogman l’avait prévenu
qu’on avait dessein de l’assassiner, s’il suivait l'armée :