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tête et la queue, dans un état d'immobilité absolue. On voit
alors qu'il soulève la queue au dessus duplateau arrondi qu'il
représente et on l'entend aussitôt produire un bruit analogue
à celui que font les grosses cigales chanteuses ou Tettigones,
mais plus fort et plus prolongé, comme celui d'une cresserelle.
Alors on a réellement peine à distinguer les ébranlements que
le crotale communique à ses grelots tant les mouvements continus
en sont rapides.
On a soumis ces Crotales à différentes épreuves d'expérimentation
pour s'assurer de la nature et de la violence de
leur venin, en les obligeant à mordre des lapins, des rats,
des poules, dans l'intention d'essayer l'action de certains remèdes
proposés et qu'on nous avait annoncés comme des antidotes
très-efficaces. La plupart des animaux piqués ou
mordus par ces Crotales ont péri par suite de la morsure.
D'autres ont été affectés d'une gangrène qui s'est manifestée
comme une pustule maligne sur la peau dans l'endroit même
qui avait été piqué et l'un d'eux paraissait devoir survivre à
lachùte de l'escharre qui s'en était séparé par l'emploi d'une
préparation alcoolique du Guaco.
Les Crotales peuvent être considérés comme les Serpents
venimeux dont l'organisation plus développée, et par cela
même plus facile à étudier et à concevoir, explique le mieux
le mécanisme des instruments que la nature a donnés à ces
Reptiles. Le Serpent se lance rapidement sur l'animal qui tend
à fuir; il le pique et fait ainsi pénétrer dans ses organes l'hnmeur
vénéneuse destinée à rendre nuls les moyens de résistance,
ce qui lui permet alors de l'avaler tout d'une pièce. En
effet par cela seul que les mâchoires s'écartent quand la bouche
s'ouvre, le Serpent pousse en avant comme une bascule
la totalité de la mâchoire supérieure très-réduite sur sa longueur.
Il résulte de cette sorte de propulsion qu'elle met en
saillie les crochets acérés et cannelés destinés à introduire
un poison violent qui, transmis bientôt par la çirculatioq
GKOTALIE.Ns. G. CROTALE. Ii6i
dans toute l'économie vivante, agit de manière à produire en
quelques secondes les effets du venin le plus délétère.
Cependant ici et dans l'absolue nécessité que la nature a
imposée à ces OpWdiens de se nourrir uniquement et avec sobriété
de la chair d'animaux vivants, sans pouvoir les poursuivre
activement dans leur fuite et même sans avoir les
moyens de diviser cette proie et de la mâcher ; ne serait-ce
pas, par une sorte de commisération prévoyante pour les
victimes, que ces Serpents ont été pourvus d'une arme si
dangereuse et si puissante? Ainsi, le Serpent venimeux posséderait
en même temps l'agent formidable qui d'abord paralise
l'animal pour l'empêcher de fuir et de se défendre, puis il
a le pouvoir de produire subitement sur ses victimes et par une
simple piqûre, une insensibilité complète, une véritable anesthésie
dont le résultat serait de faire disparaître les vives
douleurs de l'agonie qui précèdent trop souvent l'anéantissement
, ou la perte de la vie.
Quelques voyageurs, et en particulier Palissot de Beauvois
et Guillemart, rapportent une observation relative aux Crotales
et que M. Schlegel met en doute: c'est qu'on aurait vu
ces Serpents avaler leur progéniture. Serait-ce pour s'en nourrir?
Le fait qui paraît réel serait autrement expliqué ou interprété
par le récit suivant que nous transcrivons d'après le mémoire
adressé à l'institut par M. Palissot de Beauvois , où il
est consigné (Transact. Phil. amer. Society, t. lY, p. 068.)
« Ayant aperçu de loin, dans un sentier, un Boiqtiira ou
» Serpent à Sonnettes, je m'approchai le plus doucement pos-
» sible ; mais quelle fut ma suprise quand, au moment où
» j'avais levé le bras pour le frapper, je le vis s'agiter en fai-
» sant résonner ses grelots, au même moment ouvrir une
» large bouche et y recevoir cinq petits Serpents de la gros-
» seur à peu près d'un tuyau de plume. Surpris de ce
» spectacle inattendu, je me relirai de quelques pas et je
» me cachai derrière un arbre. Au bout de quelques minutes,
••»Aiit.