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1398 O P H I D I E N S SOLÉNOGLYPHES.
i u r la planche IV. Très-souvent, entre les espaces étranglés que présente
la raie dorsale, les côtés portent d'autres taches d'un gris plus ou moins
foncé et même tout à fait,noires; puis immédiatement au dessous de ces
dernières, dans la région qui unit les écailles du dos aux larges plaques de
l'abdomen, dites gastrostèges, on remarque une autre série de petites
taches qui paraissent blanchâtres, par opposition à la couleur foncée
du ventre.
La tête est assez régulièrement lachetée, mais non pas d'une façon
constante, car nous voyons que les jeunes individus ont généralement des
taches plus distinctes, qui s'effacent sur les sujets plus avancés en âge.
Enfin, les mâles les offrent aussi plus constamment.
11 y en a d'abord en avant, autour des orifices des narines, deux plus
petites externes, qui se joignent à une autre impaire, placée au dessus de
la plaque rostrale; mais cette dernière est souvent isolée. Il vient ensuite
une tache syncipitale située sur l'écusson central. Enf in, de l'un et de l'aut
r e côté, depuis le tiers antérieur de "la téte jusqu' à l'occiput, on voit une
ligne noire d'une largeur régulière , arquée en dehors. Dans l'intervalle
médian, on distingue le plus souvent l'origine de la grande raie dorsale,
plus ou moins dilatée et occupant la région moyenne de la nuque.
M. Wyder, qui a publié en 1826 à Genève une petite brochure ayant
pour titre Histoire naturelle des Serpents de la Suisse, paraît avoir réuni
u n assez grand nombre de ces Vipériens, dont il a pu observer les moeurs
et les variations. Il a reconnu que la teinte générale du fond des écailles
passe du gris au fauve jaunât re, et que les taches, variables elles-mêmes
pour la figure, la direction, le nombr e , offrent des transitions du brun au
n o i r , en restant isolées ou séparées les unes des autres, surtout dans la
région du dos où la ligne sinueuse, qui parait la plus constante, peut faire
aisément confondre entre eux les Pélias, les Vipères et le Tropidonotê
vipérin. Cette confusion est si facile, qu'elle m' a trompé moi-même dans
la circonstance que je fais connaître ici dans tous ses détails. C'est en effet
en croyant saisir une Couleuvre vipérine que j'ai été blessé par un Pélias
et que jai éprouvé les accidents assez graves qui sont la conséquence de
cette intoxication dont je crois devoir consigner les circonstances dans le
récit que j'ai fait moi -méme.de cet accident comme complément de l'histoire
du Pélias herus.
A u reste, l'ensemble de cette coloration , qui varia à l'infini dans une
vingtaine d'exemplaires que nous avons sous les yeux, ne suffit réellement
pas pour faire distinguer ce Serpent d'avec les Vipères, si le naturaliste
ne peut bien observer et comparer la tête qui est distincte par sa forme,
par l'étroitesse relative du mqseau, et par les plaques ou les écussons qui
VIPÉKIENS. G. PÉLIADE. 1399
la revêtent; peut-être aussi l 'étranglement en est-il moins marqué dans la
jonction du crâne avec l'échiné.
E n résumé, le seul caractère tiré de la présence des plaques, ou des
lames cornées qui se trouvent au dessus du museau, devient en même
temps la diagnose du genre et de l'espèce unique qui constitue le Pélias
Berus et le fait distinguer du genre Vipère, car pour la teinte générale du
corps et pour les taches qui s'y font r ema rque r , il faudrait pour ainsi dire,
reconnaître autant de variétés que d'individus divers.
Tout ce que l'on sait des moedrs de ces Ophidiens peut aussi bien se j'apporterà
l'espèce que nous décrivons qu'aux divers Serpents Vipériens dont
nous avons esquissé l'histoire précédemment^.
Quant au nom de Bérds , il est fort ancien dans la science pour désigner
une Vipère. Aldrovande, en effet, en donne l'historique. Il nous dit qu'il
provient d'un préjugé qui avait fait regarder ce Serpent comme le produit
de la fécondation d'un Serpent par un poisson du genre des Murènes.
Quoiqu'il en soit, ce nom a été introduit comme celui d'une vipère par
Gesner, Séba, Petiver, Linnoeus, Scopoli, et par tousles auteurs modernes.
Nous ignorons donc l'étymologie de ce mot latin , qui a toujours
été mis en usage pour désigner une ou plusieurs espèces difTérentes de
vipères.
KELATION DÉTAILLÉE. DES EFFETS PRODCITS PAH LES PIftCRES D'CN
PÉLIADE SUR L'AUTEUR DE CET OUVRAGE.
Le jeudi 11 septembre 1851, j'étais en promenade avec ma famille, dans
la forêt de Sénart, près Pari s ; je m'y livrais, comme de coutume, aux recherches
d'histoire naturelle. J'aperçus, au milieu d'une large allée, pea
garnie d'herbes courtes, un Serpent qui la traversait rapidement. Il était
environ deux heures après-midi. Trompé d'après un coup-d'oeil trop
prompt, qui m'avait cependant permis d'apercevoir les plaques qui garnissaient
en dessus le devant de la tête de ce Reptile, et môme la raie brune
sinueuse qui régnait le long du dos, je ne doutais pas que je voyais une
Couleuvre Vipérine, c'est-à-dire u n Tropidonotê, qu'on rencontre assez
fréquemment dans nos environs. Comme je ne devais pas en craindre la
morsure, je me précipitai imprudemm^ent sur ce Serpent que je saisis au
milieu du corps avec la main droite pour l'enlever de terre ; mais ne
l'ayant pas empoigné assez près de la téte et voulant m'aider de l'autre
m a i n , j'y (us mordu sur le pouce, au-dessus de l'articulation des deux
dernières phalanges.