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1578 OPniBIENS SOLÉNOGLYPnES
inents qui décèleraient sa présence, et le Serpent lui-même s e
presse rarement d'en approcher avant devenir blesser cet animal
vivant par une piqûre rapide, afind'inoculer dans les chairs
le poison subtil et mortel qui ne tardera pas à le faire périr (1).
Dans nos climats, toutes ces espèces venimeuses semblent
lentes et peu actives dans leurs habitudes; elles restent constamment
immobiles dans une sorte de torpeur, au moins pendant
la joiu-née. Elles sont comme engourdies dans quelques
coins, sous la mousse et sur les branches sèches où leur corps
s'entortille en se fixant solidement pour y reposer et dormir.
Quels que soient la durée de l'abstinence et le besoin présumé
de la faim, que ces Serpents peuvent au reste supporter
pendant des mois et même pendant des années, il est rare
qu'ils aillent au devant de leur proie. Ils l'attendent patiemment.
Il paraissent même éviter de faire le moindre mouvement
qui pourrait trahir leur présence; mais quand la
victime est à une proximité telle que la distance réciproque
semble avoir été précisément déterminée, on voit tout à coup
le Serpent s'élancer par un mouvement rapide, prompt comme
l'éclair. Cependant il a pu redresser les courbures du
tronc pour en projeter la partie antérieure. Dans cet intervalle
de temps comme indivisible, la bouche s'est ouverte,
les mâchoires se sont subitement séparées, la supérieure s'est
relevée à angle droit avec le crâne sur l'échiné; par une
admirable, mais simple disposition de la structure des pièces
osseuses, les crochets venimeux se sont redressés, la pointe
acérée qui les termine a été dirigée en avant, afin de pouvoir
percer la peau et pénétrer dans une partie quelconque
des chairs molles, où ces aiguilles s'enfoncent comme le
ferait une flèche lancQp avec force et vélocité (2).
(1) Voyez, pour plus de détails, ce que nous avons écrit sur l'action
vénéneuse des dents de ces Serpents, tom. VI de cet ouvrage, p. l l o ci
suivantes.
(2j Voyez tom. VI , p. 125 et suivantes du présent ouvrage,
'•ilh
ViPÉniËNS EN GKNÉHAL.
Le but est atteint, quelquefois il est vrai, la dent se casse,
ou elle peut rester dans la plaie; mais la nature a pourvu a
^on remplacement. Le plus ordinairement, ces crochets se detachent
ou se dégagent avec la même rapidité qu'ils ont pénétré
et le Serpent redevient immobile. Il attend le résultat du
poison qu'il a inoculé. En effet, au bout de quelques minutes,
dans l'intervalle même de quelques secondes, l'animal blesse
tombe et s'affaisse. Il éprouve de violents mouvements convulsifs
et il ne tarde pas à succomber. C'est alors que le Serpent
s'en approche, le retourne, le développe , rétend pour le
saisir de façon qu'il lui soit plus facile de le faire entrer dans
la bouche ;°rarement il essaie de l'écraser ou de le comprimer,
en l'enveloppant de ses replis. Le plus souvent, c'est par la
tête que la proie est saisie, pour être avalée par un mécanisme
semblable à celui qui s'exécute chez presque tous
les Serpents, c'est-à-dire par l'action alternative des
deux mâchoires garnies de dents crochues, qui peuvent avancer
ou reculer alternativement en sens contraire et successivement.
D'ailleurs, le mécanisme de cette déglutition est le même
que dans tous les autres Ophidiens dont nous avons fait connaître
les fonctions digestives.
Comme l'organisation générale des Solénoglyphes est semblable
à celle des autres Ophidiens , nous n'avons pas cru devoir
entrer ici dans d'autres détails que ceux que nous avons
consignés au second chapitre du volume précédent de cette Erpétologie,
car nous sommes entrés à cette occasion dans toutes
les considérations qui sont relatives aux fonctions diverses
et aux moeurs. Nous ferons remarquer cependant que, sous
' le rapport de la génération, cette l'aminé nous offre un exemple
d'un mode d'ovoviviparisme qui est presque constant pour
la plupart des genres et en particulier que, peut-être par cette
circonstance même, les monstruosités ou les jonctions adhésives
des parties de deux individus distincls y sont beaucoup
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