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1 4 0 2 OPHIDIENS SÔLÉNOGLYPFLES.
J e pris un bouillon et un peu de vin d'Espagne, n'éprouvant d'autrg
malaise que celui de la tension de tout le tissu cellulaire de l'avant-bras
qui était énormément distendu en avant, jusqu'au pli du bras et presque
point du côté du coude.
J e dormis parfaitement pendant la nuit, et le sommeil me surprit une
heure et demie environ après mon entrée au lit. A mon réveil, le volume
du bras était le même , mais d'une teinte rouge, violacée par places, le
sang s'étant évidemment extravasé par le tiraillement exercé sur les veines
dont les capillaires étaient déchirés. Cependant, la peau était comme engourdie
, si ce n'est quand j'y exerçais une légère pression dont je ressentais
l'action.
Dès le matin , je bus une tasse de café au lait avec plaisir et il s'en suivit
une légère-et utile transpiration. Plus tard, un potage gras et un peu de
vin furent très-bien digérés. Je me trouvais en assez bon état de santé
pour me lever, toutes mes fonctions s'exerçant librement. Le bras et la
main restaient encore gonflés. Les taches noirâtres avaient pris une teinte
violette. Elles se manifestaient principalement dans les parties les plus
déclives et surtout vers le bord radial de l'avant-bras et sur le même côté
de l'une et de l'autre main.
Le samedi, c'est-à-dire le surlendemain de l'accident, je repris mes occupations
actives quotidiennes au dehors et à l'établissement dont je suis
le médecin. Je me trouvai tellement bien queje pus commencer mon cours
au Muséum, qui était annoncé pour le lundi quinze septembre, c'est à-dire
quatre jours après l'accident.
Il résulte de ce fait que j'ai cru devoir consigner ici avec détails parcequ'ils
feront bien connaître la série des accidents produits par les piqûres
de ce Serpent :
1.° Que la petite quantité d'humeur vénéneuse qui m'avait été inoculée
par les morsures du Pélmde Berus a déterminé chez moi, vieillard actif et
vigoureux, âgé de près de soixante-dix-huit ans, des accidents assez graves
et surtout une sorte d'insensibilité momentanée pour donner à penser
qu'une personne plus faible, plus jeune, et surtout un enfant, aurait p«
succomber à ces accidents.
2." Que, sans aucun doute, ainsi privé instantanément de sensation et de
mouvement volontaire, un petit animal, s'il eût été à peu près calibré au
volume du Serpent, en aurait été la proie.
Que j'ai eu le tort de n'avoir pas élargi de suite avec la pointe de ma
lancette les petites piqûres, avant deles soumettre à la suction; surtout
de n'avou' pas exercé de suite une compression circulaire au-dessus des
pouces.
ViPÉRIENS. G. VIPÈRE- 14 0 S
J e viens de raconter avec détails toutes les circonstances de l'accident
que j'ai éprouvé, parce qu'à l'instant même où je me sentis piqué, et nullement
inquiet des suites de cette morsure, il me vint aussitôt à l'esprit la
réflexion que je pourrais mieux les étudier sur moi-même.
J'ai relu depuis, ce que Moïse Charas raconte dans ses expériences sur
la vipère. Ayant été piqué, le 20 août 1692, par une vipère au moment
où il faisait, dans une assemblée de l'Académie royale des sciences, des
démonstrations sur les parties de la bouche de ce Serpent, et devant
Méry et Duverney, il avoue qu'il se consola aussitôt de ce qui lui arrivait
en pensant que cela lui fournirait l'occasion de connaître et de ressentir
par lui-même les efi-ets du venin. Il en donne, en effet, tous les détails et
il dit comment il obtint un grand succès de la ligature qu'il fit autour du
doigt piqué, en le serrant fortement par les circonvolutions d'une ficelle
afin, dit-il, d'arrêter le cours du sang. Seulement, il eut le regret d'avoir
trop longtemps laissé agir l'action de la ligature et il cite un pareil moyen
employé avec succès par Ambroise Paré qui , comme je l'ai lu dans ses
oeuvres, avait lui-même été mordu à Montpellier, dans l'oflicine d'un apoticaire,
par une Vipère qu'il examinait avec trop peu de précaution.
Ili.e GENRE. VIPÈRE. — VIPERA. Laurenti.
CARACTÈRES, tête déprimée, élargie en arrière, entièrement
revêtue de petites écailles et non de plaques; narines à orifices
latéraux simples, larges, concaves; urostêges distriluéespar
doubles rangées sous toute la queue.
A l'aide de la réunion de ces simples caractères, il est
très-facile de distinguer les espèces rapportées à ce genre,
de celles qui sont rangées par les auteurs dans la même famille,
à laquelle cependant ce nom de Yipère sert de type.
En effet, six genres de ce groupe des Yipériformes offrent
une particularité dans la conformation des narines, qui ne se
trouve pas dans les véritables Crotaliens, c'est l'absence de
petites fossettes, placées au-dessous, ou en arrière de leurs
orifices, au-devant des yeux et simulant ainsi deux ouvertures