
propres à toute végétation compatible avec
leur expofition & la hauteur des lieux; parce
que le moellon retient la terre végétable', elle
tombe dans fes interftices où les racines des
plantes la vont chercher. On eft furpris de
voir la fertilité de certains cantons, dont la
furface n’offre à l’oeil que des pierres nues,
C’eft que dès que le terreau a été remué, les
pluies ont lavé les pierres, & entraîné la ter-,
re végétable par.deffous,. , ' VMais
combien de talus font encore mouvans
dans les Montagnes! Combien de rochers escarpés
qui s’ écrouleront! Pendant combien de
fiècles encore, le? hommes feront-ils traverfés
par les inondations 8c les éboulemens dans ;la
poffeffion même qu’ ils ont déjà prife de presque
toutes les bafesude ces grandes mafles!
Tout cela eft hors de la portée de nos-calculs.
E t qu’importe? Ne fuffit-il pas à l’ami de l’Hur
manité, de voir d’une manière certaine, que
les hommes pofféderont un jour tout ce que,
la glace ne leur fouftraira pas. Qui fait même,
s’ ils n’oferont pas en reculer les limites? Je
fais bien au moins qu’ils anticiperont la
fertilifation naturelle, & parconféquent la eon-
fervation même, des rochers nuds: car tous les
jours on le leur voit Entreprendre. Les Pluies
amaffent du terreau dans les fonds ; c’ eft-à-dire,
comme je l’ai défini, des matières pierreufes,
mêlées de terre végétable. Ces fonds p a r - là ,
ont un fol fertile plus épais qu’ il n’eft befoin.
Que ne fait pas entreprendre aux hahitans des
Montagnes le defir de refter réunis, aux pa-
rens fur-tout celui de conferver auprès d’eux
leur famille ! Les femmes 8c les enfans gravis-
fent les rochers les plus efcarpés pour cueillir
l’herbe qui y pouffe : e’eft un furabondant :
voilà de quoi élever une nouvelle bête de fom-
me. On lui met deux paniers fur le dos; les
enfans vont la conduire dans les fonds pour
y puifer cette terre fuperflue, 8c la porter fur
quelque rocher voifin qui s’avance en terraffe
derrière un abri. L à , fuivant l’étendue ou la
hauteur du lieu, on fème du grain, on plante
des choux ou de la vigne, ou même des
arbres fi l’on fait que leurs racines trouveront
des fentes dans le rocher.
Ces prifes de poffeffion anticipées .peuvent
être quelquefois durables; ce qui arrive fûre-
ment, fi le rocher ne s’éboule plus par desfous.
D’ autres fois la jouiffance n’eft que pour
u n 'tem s , 8c les éboulemens emportent la bafe
de cette culture précaire : ; mais la végétation