
que je dois prévenir une ide'e générale qui
pourroit frapper V. M. „D e s hommes, pour
„ arrêter les progrès de la deftruétioh des
ii Montagnes ! . . . . Y a - 1 - il quelque proport
i o n entre l’objet & le moyen?” . . . . Cent
hommes réfolus & habiles, arrêtent une armée
dans un défilé. Or tout eft défilé dans les Montagnes,
Sc tout eft occupé par des hommes
réfolus & habiles. La deftruftion des Monta-
gnes n’eft conçue que Comme l’effet des fiècles
èntaffés ; & dans les fiècles , entaffés les hommes
aufft font bien de l’ouvrage.
Nous venons de voir les habitâns des pentes
& du pied des Montagnes s cribler les eaux
au - travers de leurs prairies, pour ÿ retenir
tout ce qu’ elles y peuvent dépofer : mais elles ,
ne font pas dispofées par-tout de manière à
pouvoir rendre ce fervice. Il faut d’ailleurs
des vignes & des champs, où les eaux coü4
rantes font nuifibles; & en général les terreins
du bas & du penchant des Montagnes font fi
précieux, par leurs divers afpedt-s, & par tous
les genres de fecours qu’ils reçoivent de la
Montagne meme; qu’ il y auroit beaucoup &
perdre fi l’on n’en faifoi t que des prés.
Mais on ne laiffe point échapper pouf celé
1es matériaux qui fe détachent de la Montai
gne ; on peut s’en rapporter au foin que
prend chaque propriétaire pour la confervation
de fon propre terrein. Tant que la Montagne
s’éboule encore fur lu i, il eft fort riche : fes
Labourages lui coûtent moins. A mefure que
par le mouvement du terrein il en gliffe vers
le bas, la Montagne lui fournit de quoi réparer
fa perte. Et cette perte n’ en eft point une
pour le tout; car ce qui gliffe de chez lu i, eft-
reçu avec empreffement par fon voifin inférieur,
qui le transmet de même au fuivant ÿ
jusqu’ à ce que la pente fe rende fi douce
que ces transmigrations du terrein deviennent
infenfibles.
On appelle abreuvage dans certains Cantons*-
ces fecours que les poffeffeurs fucceflifs reçoivent
les uns des autres, & originairement de la
Montagne: & c’eft dans les Vignobles qu’ils
font le plus importans. Le travail des vignes
inclinées fe faifant toujours dans le fens de la
pente, chaque année tire vers le bas une bande
de terrein. ' Le premier coup de bêche donné
au plus bas de la pente, détermine la quantité
de la dégradation annuelle; le fécond coup en
montant, remplace le terrein enlevé par le
premier; le troifième remplace le fécond &
ainfi de fuite. Chaque poffcflè'ur éprouve donc