
Ainfi les Montagnes s’abaifferont fans doute
; leurs coupures s’élargiront. Mjiis jamais
elles ne cefîeront d’être Montagnes: elles pren-
• dront un état ftable, que les fiècles accumulés
, ne changeront plus eflentiellement.
Toutes ces opérations font laiflées à la Nature
feule dans le haut des Montagnes: les
hommes y prennent peu d’intérêt; J’ai eu
l’honneur de le dire à V. M., l’air y eft trop
fubtil & trop froid, pour qu’ils en faffent le
lieu de leur fe'jour ordinaire. Ils y vont feulement
dans la belle faifon, recueillir des biens
qui ne leur coûtent que du tems. Le Bétail y
monte à la fin du printems, s’y nourrit, y
multiplie, y fournit tous les laitages Mes Montagnards
vivent de fon produit & nous en font
jouir après eux.
Il n’en eft pas ainil du bas des Montagnes;
. . . . Mais avant d’y defcendre, le froid
dont je viens de parler, m’ avertit que je ne
dois pas être fi facile à convenir de Péboule-
ment de tous les fommets. Dans les Alpes au
moins, où les hauts fommets fe couvrent de
glace ; ils font garantis par elle presque aufli
puiflamment que par la végétation. L ’eau s’écoule
fans doute de delfous ces glaces, mais
ç’eft par tant de canaux & fi tranquillement
' qu’elle
■qu’elle ne détruit rien, ou presque rien ; auifi
Ile plus fouvent en fort-elle claire. Dans les
■faifons pluvieufes, tout ce qtii nous arrive en
■pluie, eft de la neige fur ces fommets,‘ & par
Iles fontes & les gelées alternatives cette nei-
I g e fe transforme en glace. De forte qu’une
Imême quantité- d’eau, qui autrement fe feroit
■écoulée en peu de jours & presque toute à la fur-
I fa c e , ne descend qu’en plufieurs mois, & ie
■filtre même par autant des petits canaux fou-
I terrains, qu’ il y en a d’extérieurs.
Quiconque a vu ces Montagnes glacées,
■comprend *ce qu’ en diient les habitans du voi-
1 finage; c’ eft qu’elles s’’élèvent. Elles ne fe dé-
Igradent donc pas: il n’y a que les rochers cou-
Ip é s à pic qui s’ éboulent encore. Mais ils
I s’encroûteront auifi dès qü’ils feront moins es-
ica rp é s ; & en attendant, le moellon qui s’en
■ détache, tombe fur les glaces des hautes Val-
lié e s ; & celles-ci gliffant vers le bas, comme
■j’ai eu l’honneur dé l’ expliquer a V. M. dans
■ mes Lettres de Tannée dernière, apportent ce
I moellon dans les lieux où les hommes peuvent
I en faire ufage. Ainfi à cet ' égard, les glaces
I nous rendent à leur manière le même office
[ que les Torrens. ' \
Nous conferverons donc à toujours la plus
I , Tome II. IV. Partie. G