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gedes humains, & je ne puis plus m’eiPpêcher
de l’introduire formellement dans nos confidéhautes,
nommées les Mpntagnes d’Oche. G’e ll là le
plus bel obfervatoire poffible pour, étudier les gradations
des Montagnes, dans leur pailage de l ’état efcarpé à
çelui de terrçins fertiles. J’enviois fort cette pofition
tandis que je m’occupois de cet objet à Laufanne-, &
fouvent je me transportais eu idée fur ces fommités,
pour me peindre, à l’aide de cette pofition favorable ,
des objets que je ne faifois qu’entrevoir de mon Cabinet.
Depuis lors mon frère a réalifé ces tableaux de mon
imagination, en allant fur cette Montagne , & me &ir
fant part de ce qu’il a vu.
Je mettrai fprement le Lcéleur en. état de fe repréfenter
ce grand fpeftacle, en le plaçant à p,rès de 1000 Toifes
d’élévation au defTus du Lac de Genève, voyant ce Lac
dans toute fon étendue auffi près de lui qu’un tel pbjet
peiit l ê t r e , Sç tout celui de Neufchatel à peu de diftan-
c e j dominant la chaîne dp Jura; disputant de hauteur
avec presque tou? les objets d’alentour à l ’exception des
Pics glacés des A lp e s , ayant ainfï fon v^fte horiçon
Couvert de grouppes dont un feul embelliroit m tableau.
Celle des deux fommités fur laquelle mon Frère mot*,
ta fe nommç le Çbâteaa d'Oc/je, parce que les rochers
efcarpés de fon fommet jefiemblent à une .mafure: l ’autre
fe noipme le Sec d’Oçbe, par quelque ra^on ,tirée
auffi de fa forme. Ces deux grands rochers s’élèvent rapidement
au defTus de la croupe; mais ils tendent à
S'arrondir par des éboulemens, & I n v i t a t i o n , qui $
L ettre XXXIII. d e l a T E R R E. io j
rations, ne fût - çe qu’à titre-, de j,fimple caufe
Phyfique.. Çar enfin des hommes qui charient
du terrein de bgs-en haut, & des Torrens qui
recouvert d ’qne peloufe la croupe.de la Montagne, gagne
déjà le pied de leurs talus. Cependant cette croupe
eft fort élevée ; on ne peut y établir dès la it e r ie s p a r c e
qu’on y manque’ de bois , & Tes pâturages ne font employés
qu’à élever ou engraiffer du bétail, dont les
gardiens ne mènent:* avec eux de vaches'à lait qu’autant
qu’il eft béfoin pour leur fu’pfiftance. ..
De cette fommité mon Frère découvroit tout autour
dç lui une multitude de Montagnes, entièrement, arrond
ies, mêlées à beaucoup, d’autres, éloignées à divers
degrés de c e t, état à caufe des rochers dont les éboulemens
n’ont pas ceiTé. La plupart dés premières, portant
leurs fommets fort ’ audeflus de la région des arbres,
fe terminoient en des peloufes dont toutes les
inflexions étaient douces, fans Coupures ni aucun autre
indice de dégradation : les? autres tendoient vifîblement
au même état par des talus déjà revêtus de verdure,
les uns feulement à leur pied, les autres fucçeffive-
ment.plus. haut. à. proportion que les rochers qui les dp-
minoient reftoient.. moins. élevés. En un mot cé vafte
champ, qui au premier çoup-d’oe il ne femble montrer
que des ruines, ppnvainçroit tout homme attentif, que
les Montagnes en général tendçnt à un état fixe, en
prenant une forme inattaquable „ par Ja pefanteur &
une enveloppe à l ’abri des, injures de l ’air.
Dans un nouveau voyage qu’a fait msn frère fur ces