
3® H I S T O I R E IV. P a r t i » /
an autre état de notre Globe il faut remonter
à des tems très reculés (a). Je reviens
maintenant à ce qui fe paffe dans les
Montagnes.
Quand les dépôts de l’air fe forment fur deS
rochers d’une grande étendue; comme fur les
plateaux fupérieurs des Montagnes ; & que la
pierre qui les compofe n’eii ni brifée, ni cre-
vafle'e; il ne fe forme que des gazonnades ou
petoufes. L ’épaiffeur de la couche de terre vé±
gêtable eft d’abord trè s-p e tite, & s’accroît fl
lentement, que de longtems elle ne peut nourrir
des arbrés. Car lors même qu’en étendant
leurs racines au lo in , ils pourraient trouver
affez de nourriture ; ces racines ne-faifant que
tapiffer les rochers, céderaient bientôt à l’ effort
du vent fur les branches. Il ne croît donc
point d’arbre fur les rochers de cette efpèce*
Mais lorsque le rocher eft crevaffé, ou que les
dépôts fe forment fur du moellon qui fe couvre
de moufle, les arbres peuvent alors s’y
maintenir; & le plus fouvent ils s’en emparent;
car là où ils çroîffent, leur ombre eft un obftacle
(à) O* trouvera dans la fuite un grand nombre
d ’obfervations relatives à cet' objet particulier, qiü
«sntribuerent beaucoup à éclairer notre Chronologie»
ftacle à la végétation des pjlautes graminées 8c
de beaucoup d’autres. Les moufles au contraire
y prospèrent mieux qu’ailleurs ; elles ont quelquefois
plus d’un pied d’épaiffeur fur ces cailloutages;
& font pour les arbres des Montagnes,
ce que feroit le meilleur terreau. Les
premières racines que pouffent leurs femenees*
trouvent*-. comme celles de toutes les autres
plantes, leur nourriture fous les premières
moufles. Mais bientôt, tournant autour des
pierres, elles s’ infinuent entr’elles, où dans les
Vcrevaffes ; elles s’y enfoncent à proportion que
les parties extérieures s’accroiffent ; elles deviennent
ainfi capables de réfifter à l’ effort des
£
vents; & ç en eft affezpour que les plus grands
arbres fe forment.
i l fuffit mêmê que les arbres puiffent environner
les rochers par leurs racines , pouf
qu’ ils y croiffent. J’ai vu fouvent des blocs
ifolés, arrêtés dans leur chute fur la pente
d’une Montagne, fervir comme de pié-
deftal à un grand arbre, tel qu’ un hêtrè ou
un -fapin. La moufle feule fourniffoit aiors
. l’aliment à fes racines'; celles - ci embraffoient
le rocher en tout fens; & la Couche
de moufle dont elles , étoient recouvertes
, fervoit d’éponge poujf retenir, confer-
Tome I I . IV. Partie. G