
Montagnes , y attiraient mon attention de
toute part. J’entreprendrai quelquefois d’exprimer
à V. M. le bonheur dont je jouiffois
aufli dans ces folitudes ; en y voyant combien
Dieu eft bon pour ceux mêmes qui mécon-
noiffent fon empire ; comment il préparé de
loin les biens Phyfiques pour tous indiftinéte-
ment Mais je ne fortirai point pour cela de là
règle que je me fuis prescrite, de n’examiner d’abord
qu’en Phyficien les Loix de la Nature &
les phénomènes. Les objets qui s’emparent
du coeur peuvent nous féduire ; ce doit être la
récompenfe, & non le guide de l’ obfervateur.
V. M. fera frappée du peu d’appareil que
met la Nature, dans fa réfiftance à ces terribles
caufes de deftruétion qui femblent menacer
les Montagnes. Une plante , & la plus
foible des Plantes, la Moufle en un mot eft
fon premier & univerfel inftrument.
Il n’eft perfonne qui n’ aît remarqué, que
dès qu’ une pierre expofée en plein air eft
affez affermie pour refter dans une même fitua-
tion pendant quelques. années, elle fe couvre
peu à peu de Moufle : cette remarque eft même û
générale, qu’elle a donné lieu à un proverbe;
pierre qui roule, d i t - o n , ri’amafle pas Moufle:
Cette feule obfervation cependant dévient pour
nous une preuve indubitable, que les Montagnes
feront cônfervécs. La Moufle les garantira
de deftruétion.
Pour comprendre cette intéreffante vérité,
il faut remarquer d’abord quelles font les caufes
qui dégradent les Montagnes. La Pefanteur
en eft une : elle entraîne fûrement vers le bas,
tout ce qui peut fe détacher & rouler. Les
eaux en font une antre: elles obéiifent plus
aifément à la Pefanteur, en coulant dès qu’ il
y a de la pente ; & cri même tems que, pénétrant
ou heurtant, elles détachent les matières,
elles en entraînent beaucoup avec elles,
qui fans ce véhicule n’ auroient pu rouler. Enfin
plufieurs autres caufes, telles que le Soleil,
la Gelée, les Vents, contribuent à décompo-
fe r , crevafiér, ufer même les pierres expoféoi
à leur aétion, & les dispofent ainfi à céder
aux deux autres caufes deftruétives, la Pe-
fanteur & les eaux courantes.
Voilà fans doute des caufes affez puifilintes
en elles-mêmes; Sç fi rien ne s’oppofoit à
leurs effets, nos Montagnes feraient enfin
abaiffées presqu’au niveau des Plaines. Mais
elles trouvent dans les végétaux, & dans la
Moufle premièrement, un obftacle infurmonta-
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