
que par des millions de filets, après y avoir
dépofé des matières terreftres , bien loin d’en
rapporter. Je reviendrai à cette dernière con-
fe'quence, après avoir conduit nos Montagnes
plus près de ce point de repos.
D ’ après tout ce que j’ai eu l’honneur d’expliquer
jusqu’ ici à V. M., Elle voit déjà fûre-
ment que nos Talus, formés au pied des ro-
•chers, fe conferveroient à toujours, fi les Torrens
n’y retardoient l’ouvrage de la végétation.
Les pluies feules, ni aucune des autres influences
immédiates de l’ air n’ y feraient absolument
rien. Les pluies fe -filtrent presque
entièrement dans ce moellon ; on n’y voit
point courir d’ eau, jusqu’à ce que le gazon les
recouvre, ou que les eaux aient peu à peu
bouché la plus grande partie de leurs conduits
fouterreins en y chariant après elles du menu
gravier & du fable ; & ces deux caufes tendent
à affermir le Talus. Ainfi quand l’ eau a bouché
fes conduits fouterreins & qu’elle coule
à l’ extérieur, elle ne peut y former que de petits
filions, où elle descend fans rien déranger.
Alors, bien loin d’entraîner, elle accumule
; puisqu’ elle dépofe continuellement la
nourriture des plantes, qui, en pourriffant,
forment cette croûte de terre végétable, dont
là préfençe attefte à l’oeil même l’ accroiffe-
ment dû terrein.
Des Montagnes baffes (comme le Jura qui
eft bas comparativement aux Alpes') font bientôt
fixées par ce moyen. Il ne fe fait presque
qu’un feul Talus depuis *leur fommet jusques
dans les baffes Vallées, ou fur la plaine. Aufii
l’état de ces Montagnes e ft- il déjà presqu’en-
tièrement fixé': on y voit très peu de rochers
nuds qui s’éboulent, excepté auprès des Rivières.
C’èft dans ces lieux-là que l’ ouvrage tarde le
plus à fe finir. Le bas des Talus eft miné par
l’eau leur fur face s’écoule donc pour ainfi
dire fans ceffe, & laifle à découvert les rochers
des fommets, qui parla continuent auifi
à s’ébouler. Mais les Vallées s’ élargiffent enfin?
& les Talus s’éloignant ainfi des Rivières, commencent
à éprouver les influences du repos.
La vue feule de la chaîne du Jura, nous
apprend donc ce que deviendront enfin toutes
les Montagnes. Dans la plus grande partie
de fon étendue, i l ne fouffre plus aucun changement
ruineux : la végétation le recouvre près- *
que partout,’ Les bas foht cultivés de toute
forte de manière fuivant leur expofition; les
fommets font couverts de peloufes qui forment
les-pâturages les plus précieux. Cette