
égyptien, car ils sont pour la plupart mahométans, mais en aucune
façon wahabites ; le quart d’entre eux n’a même pas de religion
positive ni de culte.
L’Hasa et le Katif seront dans un autre chapitre l’objet d’une
étude développée. Je montrerai que leur union avec le Nedjed,
maintenue par la force, est encore plus incertaine que celle du
Kasim. Plus loin, nous verrons l’influence wahabiteetnedjéenne
sur Bahraïn, la côte persane de Barr-Farris, sur Kojveyt au nord
et l’Oman au sud, influence de crainte et non d’amour, sauf un
petit nombre d’exceptions.
L’Asir est toujours l’allié fidèle du Nedjed, bien qu’il ne lui
paye pas de tïibut. Je n’ai pas visité ce district montagneux, situé
au sud de La Mecque, à peu de distance des rives de la mer
Rouge. Mais je l’ai souvent entendu décrire par les indigènes,
soit avant, soit pendant mon voyage dans la Péninsule. Le fanatisme
de ses habitants parait égaler au moins celui des Ned-
jéens, dont ils ont adopté avec empressement les doctrines et
les pratiques. Quant aux aptitudes militaires, les Asirites sont
moins intrépides sur le champ de bataille et moins tenaces
dans leurs résolutions que les Nedjéens ; en un mot, ils ont plus
de ressemblance avec les races de l’Hedjaz, dont ils habitent les
frontières. En tout cas, l’importante situation géographique du
pays occupé par ces peuplades en fait d’utiles appuis pour une
cause mauvaise, car toute armée égyptienne qui envahirait
l’Arabie les aurait en flanc.
Afin de ne pas interrompre le récit des événements qui marquèrent
la fin de mon séjour à Riad, je dirai ici quelques mots
d’une courte excursion que je fis avec Barakat dansl’Afladj. Cette
province, qui figure sur la plupart des cartes à une distance de
deux cent cinquante milles environ de l ’Ared, lui est en réatité
contiguë et le sépare de la Wadi-Dowasir ; ses plateaux forment,
s’il m’est permis d’employer cette légère métaphore, un
arc-boutant dans la grande muraille du Toweyk; leur hauteur
est moindre que celle de la chaîne principale, et au delà, le niveau
du sol s’abaisse graduellement, disent les voyageurs, jusqu’aux
environs de Kelat-Bisha, puis il s’élève de nouveau du côté
du Djebel-Asir. Vers le milieu de novembre, mon compagnon et
moi nous sortîmes de Riad par la porte sud-ouest, nous traversâmes
la Wadi Hanifah et atteignîmes le soir du même jour le
village de Safra, sur les frontières de l’Ared. Nous avions pour
guide un Nedjranien, appelé Bedaa (hérétique), nom mal choisi
pour un explorateur du pays orthodoxe par excellence. Celui
qui le portait cependant était un gai compagnon, à la face rebondie
et aux larges épaules; marchand nomade de profession,
il recherchait le plaisir avec ardeur ; souvent il avait fumé
une pipe et pris du café dans notre hawah de Riad ; c’était lui
qui nous avaitproposé la présente excursion, et elle s’accordait
trop bien avec nos plans pour être refusée.
Quand nous eûmes franchi la Wadi Hanifah, nous entrâmes
dans une plaine inégale, coupée de profonds ravins, et dont la
formation calcaire rappelle le sol de l’Ared. La route, ou plutôt
le sentier, montait et descendait au milieu des roches blanchâtres;
çà et là, quelques arbres, de maigres pâturages rompaient
la stérile uniformité de la campagne. Les torrents d’hiver suivent
pendant plusieurs milles la direction de la Wadi, puis ils
se dirigent vers le sud.
Nous reçûmes dans Safral’accueil hospitalier que l’on rencontre
toujours au Nedjed. L’exiguité du village, composé à peine de
soixante habitations, nous fournit une excuse convenable pour
résister aux instances de notre hôte et repartir le lendemain.
Quelques-unes des maisons sont faites en branches de palmier
couvertes de chaume, ce qui est un indice de la chaleur du climat;
les murs dont le hameau est entouré, -r- je ne saurais les appeler
des fortifications,—se composent simplement de briques séchées
au soleil; ils tombent presque partout en ruines, mais par compensation,
la mesdjid a été réparée avec une édifiante sollicitude.
Le matin suivant, nous errâmes pendant plusieurs heures au
milieu des collines et des vallées de sable ; ce qui ne nous empêcha
pas de reconnaître que le niveau général du sol s’incline
sensiblement vers le sud-ouest. Nous étions dans l’Afladj ; vers
midi, nous arrivâmes au grand village de Meshallah (littéralement
<£ lieu du pillage »). C’était un nom de mauvais augure pour
des voyageurs, mais nous avions pris nos mesures, et, sauf nos
tuniques, nous avions peu de chose à perdre. Les fréquents
voyages de Bedaa l'avaient mis en relation avec plusieurs des
habitants, l’un d’eux nous offrit d’attendre dans sa demeure que
la chaleur du jour fût passée, proposition qui fut acceptée avec
empressement. La population paraît très-pauvre, les jardins et