
àZaki, disant que le pays était pittoresque, le voyage facile et
le chemin semé de jolis villages. Désireux d’apprendre par leur
conversation quelques détails sur les provinces intérieures, je
consentis à faire route avec eux, me promettant toutefois de
m’arrêter au prochain hameau, car j ’avais abandonné complètement
l’idée d’une exploration sérieuse de l’Oman.
Pendant deux heures, nous traversâmes les collines raboteuses
qui entourent Mascate du côté de la terre; enfin, ayant
dépassé les derniers forts isolés, nous commençâmes à descendre
par un étroit défilé vers les plateaux unis du sud. Le
paysage qui s’offrit à nous était digne d’un peintre. Sur le premier
plan se dressaient des rochers sombres et crevassés, couronnés
de blancs créneaux et de murs percés de meurtrières,
images de la défiance et de la stérilité; au delà s’étendait
une large et verdoyante plaine, dont les ondulations légères
étaient couvertes de bouquets d’arbres, de maisons et de cabanes
réunies en petits groupes que ne protégeaient ni murailles,
ni forteresses. Plus loin s’étageait la chaîne immense du Djebel
Akhdar, dont le vert sombre se fondait par degrés dans le ciel
bleu; les premiers et les plus bas de-ses monts paraissaient
tout proches ; cependant mes compagnons m’assurèrent qu’il
faut trois jours pour se rendre de Mascate à Zaki. Un peu sur
notre gauche, à deux heures environ de distance, se trouvait
Besheyr, groupe de toitures noirâtres entouré de remparts peu
élevés. Comme les montagnes que nous avions devant les yeux
correspondent à celles qui sont désignées sur les cartes par
le nom de « Djebel-Huther » et « Djebel-Fellah, » je demandai
si on ne les appelait pas quelquefois ainsi dans l’Oman, mais
on me répondit que le terme général d’Akhdar ou Vert était
le seul que l’on connût; quelques points particuliers de la
chaîne, tels que le « Djebel-Nezwah, » le « Djebel-Samed, »
empruntent parfois aussi leur dénomination à la ville la plus
voisine.
Nous suivions un chemin bordé d’acacias et de manguiers,
où toutes les dix minutes nous rencontrions des paysans qui
poussaient devant eux des ânes, des voyageurs montés sur des
dromadaires, des piétons marchant comme nous par petits
groupes. La plupart d’entre eux étaient sans armes, d’autres
portaient une courte lance semblable à celle du Nedjed, et un
« yeleb » ou bouclier de forme ronde fait en cuir étendu suf du
bois et garni de pointes de métal. J’ai vu peu d’armes à feu dans
l’Oman, si ce n’est entre les mains des Béloutchis ; la guerre
est ici un accident'non une occupation, et les habitants du
centre n’entretiennent avec les autres peuples que des relations
pacifiques, ayant presque toujours le commerce pour objet.
Nous traversâmes plusieurs petits cours d’eau, évidemment
destinés à tarir quelques semaines ou quelques mois plus tard ;
quant aux sources, elles sont nombreuses et abondantes. Nous
étions maintenant à la fin de la saison pluvieuse .de l’Oman,
alors que l'humidité est à son maximum dans ce pays; en été
et en automne, le sol est comparativement sec. Autour de nous
ondulaient dans les champs les moissons presque mûres; les
courges, les melons étaient déjà beaucoup plus avancés qu’ils
ne le sont à une époque correspondante dans les autres parties
de l’Arabie.
Cependant, le territoire de Mascate est moins fertile que le
Batinah; les pâturages destinés aux moutons, aux boeufs et aux
chameaux, alternent avec les champs de culture, qui se trouvent
le plus souvent auprès des villages ou des hameaux. L’air
est vif et le climat sain; les habitants ont un type plus viril,
plus franc, moins civilisé que celui du Batinah ; leur teint brun,
leur taille moyenne, leurs membres bien proportionnés, leurs
traits réguliers et expressifs rappellent ceux des Mahrattes, mais
ils sont supérieurs à ces derniers par l’énergie physique et par
la force morale.
Dans l’après-midi, nous arrivâmes à Besheyr. Un mur de pisé
sert d’enceinte à ses maisons de bois ou de chaume et aux ja rdins
qui en dépendent; un marché hebdomadaire se tient en
dehors du village, s.ur une petite place située au milieu des plantations.
A quelques milles de distance s’élèvent les établissements
céramiques de l’Oman ; la poterie que l’on y fabrique
est en général de couleur blanchâtre, et assez semblable à nos
Vases de grès. Dans toute l’étendue de la Péninsule, il n ’existe
aucune autre manufacture de ce genre; les matières premières
font complètement défaut dans le Shomer, le Nedjed et l’Hasa
aussi les ustensiles domestiques sont-ils en bois ou en métal. A
Mascate, la poterie est d’un usage journalier, bien que le métal
soit aussi employé fréquemment, peut-être en raison de l’incur