
fessent pour la famille royale un respect, un attachement héréditaires;
seulement les partisans d’Abdallah y sont inférieurs en
nombre à ceux de Saoud, circonstance qui s’explique par la présence
habituelle de ce dernier prince et par l’esprit moins fanatique
de la population. L’Ared et l’Yémamah sont essentiellement
wahabites.
Les guerres sanglantes, les dissentiments politiques ont au
contraire laissé dans l’Harik des traces profondes ; beaucoup
de familles y gardent une haine implacable contre le wahabisme
en général, contre la dynastie actuelle en particulier. L’antipathie
populaire était plus vive encore il .y a quelques années;
aujourd’hui les visites fréquentes de Saoud, sa courtoisie, son
affabilité ont calmé les rancunes, et quand la lutte aura commencé
entre les deux fils du roi, Abdallah ne verra pas un seul
habitant de l’Harik se prononcer en sa faveur.
LAfladj, stérile et sauvage, renferme une population fanatique
et ardente, qui chérit en Feysul le représentant du pur wahabisme.
Dans la Wadi-Dowasir, l’enthousiasme religieux devient plus
farouche encore, et la soif du pillage augmente l’attachement de
ces sombres sectaires pour un système qui livre à leur rapacité
tant de riches provinces. Méprisables et justement méprisés, les
Aal-Amar, pour donner aux habitants du Dowasir leur nom véritable,
perpétué par les satires amères de Motenebbi, occupent
dans la nation nedjéenne le premier rang aux yeux des « saints, »
le dernier, aux yeux du voyageur impartial. Ils ne comptaient
pas autrefois parmi les peuples; depuis qu’ils ont été incorporés
à l’empire wahabite, ils ont acquis une importance trop souvent
désastreuse pour leurs voisins ; du reste, étrangers aux querelles
qui divisent Saoud et Abdallah, ils serviront celui des deux
princes qui leur offrira le plus large butin.
Bien différent est le caractère des habitants du Woshem. L’esprit
commercial domine parmi eux, et. le wahabisme y trouve
moins de sectateurs que dans les autres districts du Djebel-
Toweyk. Cependant leurs dispositions pacifiques les attachent à
un gouvernement dont l’existence assure leur fortune, car l’ordre
qu’il a rétabli sur les grandes routes attire en foule les pèlerins,
fait affluer les marchandises dans les villes et les bourgades,
particulièrement à Shakr a. En temps de guerre, le Woshem
fournit des subsides plutôt que des hommes, et si la population
produit peu de zélateurs, elle renferme aussi peu de mécontents.
Le Sedeyr, la plus vaste des provinces nedjéennes, est en
même temps la plus renommée pour ses vertus sociales. Les
habitants joignent à la générosité, au courage, à la persévérance
des Nedjéens l’esprit ouvert et entreprenant qui caractérise les
Shomérites; enfin ils ne sont pas moins supérieurs à leurs voisins
par la beauté physique, la force et l’adresse, que par les qualités
morales. Dans leur pays se trouvent les plus anciennes villes arabes,
ils comptent parmi eux les plus illustres familles, Íes plus
glorieuses mémoires; ce sont les nobles du Nedjed ; la plupart,
wahabites sincères, se montrent fermement attachés aux doctrines
de leur secte; dans les districts du nord, cependant, les relations
fréquentes avec Koweyt, Zobeyr et le Djebel-Shomer ont
quelque peu modifié les opinions religieuses. D’un autre côté, les
Sedeyrites ne partagent pas l’enthousiasme des habitants de
l’Ared et du Dowasir pour la dynastie des Saoud, beaucoup de
leurs chefs regrettent l’indépendance dont ils jouissaient autrefois,
et les aspirations du peuple tendent vers un gouvernement
indigène; un choc léger suffirait pour détacher la province de
l’empire nedjéen, mais elle resterait fidèle aux doctrines wahabites.
Les six districts que je viens d’énumérer renferment relativement
très-peu de Bédouins. Ces nomades, dispersés sur l’immense
plateau central, sont tous des partisans passionnés de l’anarchie
civile et religieuse; soumis ou rebelles selon que legou-
vernement est fort ou faible, ils se vendent au plus offrant, et
deviennent les instruments de l’invasion ou de la révolte, des
discordes et des guerres civiles.
L’empire wahabite possède encore trois grandes provinces,
l'Hasa, le Katif et le Kasim qui reconnaissent la souveraineté
du Nedjed par une excellente raison, c’est qu’elles ne peuvent pas
s’en affranchir.
Je me suis assez étendu sur les habitants du Kasim pour que
1 on connaisse leurs tendances politiques et religieuses ; la guerre
d’Oneyzah les a manifestées clairement. Ils se rallieraient volontiers
à un pouvoir capable de les protéger efficacement au
nom de l’Hedjaz ou du Caire, du gouvernement ottoman ou