
un peu fatigués il est vrai, mais le coeur plein de joie et ravis
de notre excursion.
J’ai déjà décrit deux des sources thermales de l’Hasa ; si j ’en
crois notre guide, il en existe au moins trois cents de ce genre
dans la province. Je ne garantirais pas l’exactitude numérique
de l’assertion; je puis cependant affirmer que ces fontaines
sont en grand nombre, car j ’en ai vu plus d’une douzaine ; l’une
d’elles, située à trois milles d’Hofhouf, jaillit avec plus d’abondance
que l’Omm-Sâbaa, bien que sa température soit moins
élevée. La chaleur, dont le degré varie, est due sans doute à des
causes souterraines ; l’eau doit provenir des plateaux de l’intérieur
et en particulier de ceux du Toweyk. Les marécages et
les torrents qui se forment pendant l’hiver sur cette chaîne sont
bientôt réabsorbés par le sol marneux ou sablonneux, et semblent
avoir perdu leur puissance de fertilisation. Mais il n’en
est pas réellement ainsi ; ils ont disparu momentanément pour
revenir plus loin à la surface, et accomplir sur la côte la tâche
qu’ils avaient laissée inachevée dans l’intérieur du pays. Tous
les voyageurs qui ont visité en Syrie les provinces de l’est et
du sud, dont la configuration géographique commence à revêtir
le même caractère que celles de l’Arabie, ont dû être frappés
de la rapidité avec laquelle les torrents et les grands cours
d’eau sont engloutis par le sol crevassé du désert. Pourquoi,
dira-t-on, les eaux du Toweyk ne se font-elles pas jour près de
la montagne, au lieu de poursuivre leur course souterraine
pendant soixante ou quatre-vingt-milles, pour jaillir ensuite
dans l’Hasa? Je ne puis répondre à cette question que par une
conjecture, mais elle n’est pas dépourvue de vraisemblance.
L’humidité qui filtre à travers les couches calcaires du Toweyk
les suit, j’imagine, à une profondeur considérable dans leur
inclinaison vers l’orient, jusqu’à cè qu’en approchant des terrains
de la côte elle rencontre un lit de granit imperméable,
échauffé lui-même en dessous par une action ignée. De cette
manière, incapable de continuer sa route descendante, l’eau
remonte, en vertu de la loi de l’équilibre des liquides, à travers
les crevasses du sol et garde encore la chaleur acquise pendant
son voyage souterrain. Mes lecteurs se rappellent sans doute que le
granit et le balsalte dominent sur les côtes de l’Arabie, tandis que
les provinces centrales sontpresque toutes de formation calcaire..
Avant de quitter l’Hasa, j’ajouterai quelques mots pour compléter
cette rapide exquisse de la province et des habitants. Mes
aimables lectrices seront charmées, je n’en doute pas, d’apprendre
que le voile et les autres entraves imposées à la
coquetterie de leur sexe par la jalousie musulmane, ne sont pas
dans l’Hasa d’une obligation aussi rigoureuse qu’au Nedjed; les
femmes d’Hofhouf possèdent du reste une large part de ces avantages
naturels que ni l’art, ni les cosmétiques ne peuvent donner,
je veux dire la grâce du visage et l’élégance des formes. Si j’osais
entreprendre la tâche délicate et périlleuse de décerner, — en
Arabie seulement, — le prix de la beauté, je l’accorderais sans
hésiter aux Omanites; bien loin au-dessous d’elles, je placerais
les femmes du Katar, puis celles de l’Hasa; ensuite viendraient
celles du Djowf et du Shomer ; enfin dans ce callimètre, les Ned-
jéennes occuperaient l’avant dernier degré, les Bédouines seraient
représentées par zéro. Les poètes arabes célèbrent, il est
vrai, les enchanteresses de l’Hedjaz; pour moi, je n’en ai jamais
vu dont les charmes m’aient paru de nature à devenir dangereux,
mais je n’ai fait que côtoyer la province. Quant à l’Yémen,
tous les voyageurs s’accordent à dire qu’il est mal partagé sous
le rapport de la beauté; je ne pense pas non plus que l’Hadra-
maut, peuplé de nègres et de mulâtres, ait le droit de disputer
la palme à l’Oman. Quoiqu’il en soit, le voyageur nouvellement
arrivé du Nedjed ne peut s’empêcher d’admirer la
grâce des femmes de l’Hasa; il est plùs agréablement surpris
encore de les trouver disposées à converser av.ec les étrangers et
de voir que, pour la finesse et la culture de l’esprit, elles sont de
beaucoup supérieures à leurs compatriotes du Sedeyr et de
l’Ared.
Dans un district où l’agriculture est non moins en honneur
que le commerce, le lecteur s’attend sans doute à m’entendre
décrire les charrues et les herses, les bêches et les fléaux. Mais
le savant Niebuhr a si bien fait connaître la forme et l’usage
des instruments aratoires employés par les Arabes, qu’il ne me
reste absolument rien à ajouter. Je ne parlerai pas non plus des
paysans, ils sont les mêmes dans le monde entier ; ni de leurs
habitations, qui se composent, tantôt de chétives cabanes, tantôt
de misérables huttes de feuillage. Je ne saurais cependant
passer sous silence le nombre croissant des vaches, qui toutes