
fidèles, système qui a le double avantage de stimuler la piété et
de découvrir les défections.
Les remparts qui entourent la ville ont une hauteur de vingt à
trente pieds; ils sont solides, en bon état et défendus par un
fossé profond. Au delà s’étendent les jardins, qui ressemblent
à ceux du Kasim et fournissent des produits analogues, l’élévation
du sol compensant ici la différence de latitude. Au sud
de l’Ared, dans l’Yémamah, la flore change brusquement d’aspect
et annonce l’approche des tropiques.
Le versant méridional du grand plateau qui forme le Nedjed
se distingue du revers septentrional par l’abondance relative de
ses eaux . L’humidité du sol et de l’atmosphère augmente d’une
manière sensible depuis Horeymelah, où elle commence à se
manifester, jusque dans l’Yémamah; après avoir atteint son
maximum dans cette province, elle diminue à mesure qu’on
s’éloigne des montagnes, et le voisinage du grand désert la fait
presque entièrement disparaître de l’Harik et du Dowasir.
J’ai dit combien les boutiques des bouchers tiennent une place
importante dans le marché de Riad. Les Nedjéens sont renommés,
au delà même des frontières de la Péninsule, pour l’élève
des moutons ; les abondants pâturages, le climat tempéré de
l’Ared favorisent singulièrement l’amélioration de l’espèce ovine ;
cependant beaucoup de gens, et je suis du nombre, tiennent la
race du Nedjed pour inférieure à celle du Diar-Bekir et du Kurdistan.
Au marché de Damas, où les pasteurs de l’Arabie centrale
amènent quelquefois leurs moutons, ces animaux, quoique
très-recherchés, n’occupent pas la première place. Leur laine,
d’une finesse remarquable, égale presque celle de Cachemire ;
inutile d’ajouter qu’ils ont une large queue, caractère commun
à toutes les espèces arabes. Si la Péninsule était placée dans des
conditions propres à favoriser le développement du commerce,
elle pourrait approvisionner de laine la moitié de l’empire turc,
car ses pâturages ont une superficie presque aussi grande que
celles des terres arables ou du désert irrémédiablement stérile.
Malheureusement l’exportation présente de grandes difficultés,
encore accrues par l’indolence ou le mauvais vouloir des souverains.
Les chameaux abondent dans l’Ared ; ils sont ordinairement
blancs ou gris, tandis que ceux du Shomer ont une couleur
•brune ou jaunâtre; la race nedjéenne est aussi plus petite, a le
¡poil plus fin. Ces animaux sont relativement moins chers que les
moutons ; leur prix ne dépasse pas en moyenne trente ou trente-
cinq francs, somme peu élevée pour un animal aussi vigoureux.
On commence à rencontrer ici un plus grand nombre de dromadaires;
nous en parlerons tout à l’heure en détail.
Les boeufs et les vaches sont beaucoup plus communs au Nedjed
que dans les provinces septentrionales; on en trouve un
grand nombre dans l’Yémamah et, m’a-t-on dit, dans la Wadi-
Dowasir. Ils ont en général de petits membres, mais ils sont
toujours pourvus de la même bosse que leurs frères de 1 Inde,
bien qu’ils n’aient pas comme eux le bonheur de provoquer le
•respect ou les adorations; leur couleur dominante est le brun
ioncé. Quant aux buffles, on ne les connaît pas dans l’Arabie
.centrale.
Le gibier, petit et grand, à plumes et à poil, abonde dans le
pays, mais les habitants s’en occupent peu. La perdrix, la
caille, — particulièrement la kata, — et le pigeon se voient partout;
j’ai entendu parler aussi de la kalam, sorte d’outarde, qui
n’est autre, je suppose, que Yhobara des ornithologistes; j’en ai
¡tiré plusieurs dans les environs de Radjcote, mais les chasseurs
nedjéens ignorent l’usage de la cendrée : blesser un oiseau à
l'aile est au-dessus du talent de la plupart des tireurs arabes;
•en outre, des fusils à mèche et des balles ne conviennent guère
pour chasser la caille ou la perdrix. On ne trouve pss d autruches
sur les plateaux du Toweyk. Les gazelles, encore plus nombreuses
que dans les autres provinces de l’Arabie centrale, jouissent
ici d’une grande sécurité ; les Bédouins-Solibah sont les
¡seuls chasseurs qui lèur fassent quelquefois la guerre. Enfin les
montagnes renferment beaucoup de porcs et de sangliers, dont
les défenses servent à fabriquer des tabatières de forme bizarre,
quelquefois même des pipes. Inutile d’ajouter que cette industrie
deux fois maudite ne s’exerce pas sur le territoire nedjéen ;
les Solibahs eux-mêmes ne voudraient pas toueher du bout du
doigt la chair de l’animal immonde, et les chrétiens d’Orient
partagent en partie la prévention des disciples de Mahomet,
excepté dans les pays où l’exemple des Européens a détruit les
préjugés héréditaires.
Le lecteur s’attend peut-être à trouver ici quelques détails sur