
cation aurait suffi pour rendre fou le malheureux, s’il ne l’avait
déjà été.
L’hydrophobie est connue dans toute la Péninsule; j ’ai entendu
raconter à ce sujet de merveilleuses histoires. Ainsi un
homme, mordu par un dogue, s’était guéri au moyen d’une
plante qui lui avait fait rendre, — j’en demande pardon au lecteur,
— plusieurs petits chiens. Le narrateur affirmait avoir vu
de ses propres yeux ces animaux extraordinaires, et il décrivait,
avec les détails les plus précis, leur taille, leur couleur, etc.
Ce fut en vain pourtant que j ’essayai de me procurer le miraculeux
végétal, on ne le trouvait nulle part. Le toenia et les
autres vers parasites sont extrêmement rares en Arabie; les
habitants ont, au reste, pour les détruire, un remède infaillible :
c’est une décoction de grenadier sauvage.
L’asthme est, je crois, plus répandu ici qu’en Europe, l’air vif
de Toweyk prédispose les indigènes à cette gênante affection.
Quoique le stramonium croisse partout, ses propriétés médicinales
sont peu connues ; entre des mains coupables, il devient quelquefois
un poison ; le plus souvent, on en compose un philtre
qui a, dit-on, le pouvoir d’attendrir les coeurs rebelles à l’amour.
Je n’ai pas entendu parler de la pierre, je doute cependant
que l’Arabie soit assez heureuse pour en être entièrement
exempte.
Les rhumes, les maux de gorge, les bronchites réclament souvent
les soins du docteur; ils'sont très-fréquents, mais ne dégénèrent
presque jamais en pneumonie. Lorsque des cas de pleurésie
viennent à se produire, on a immédiatement recours au
cautère.
Je ne dirai rien de la coqueluche, du muguet ët autres maux
particuliers à l’enfance, ma pratique médicale ayant été circonscrite
aux adultes. La première de ces maladies paraît peu commune
; la seconde est peut-être comprise sous le terme général
de khanak (strangulation), par lequel les Arabes désignent diverses
affections qui enlèvent beaucoup de petits enfants aux
soucis de la vie.
La liste des désordres cutanés est longue et fatigante ; on les
rencontre tous, depuis le lupus exedens jusqu’au simple impétigo.
La lèpre abonde, comme chacun sait ; tantôt elle prend la
forme pustuleuse peu grave appelée haras; tantôt elle devient
le hideux djedam, dans lequel les jointures commencent à enfler,
puis s’ulcèrent et enfin tombent en lambeaux, tandis que des
plaies effrayantes couvrent tout le corps, surtout le dos et les
reins. Le haras, bien qu’il ne soit jamais dangereux, amène
parfois aussi une légère ulcération. Aucune de ces maladies
néanmoins ne répond exactement aux descriptions de la Bible,
et la lèpre des Juifs ne saurait se confondre avec celle des Arabes.
Cette dernière, malgré son aspect repoussant, n’est pas réputée
contagieuse, et ne rend pas celui qui en est atteint l’objet
de l’horreur générale. Les habitants de la Péninsule emploient
pour la combattre un spécifique puissant, le sulfate d’arsenic,
ou arsenic jaune, comme ils l’appellent; quelquefois ils obtiennent
la guérison, quelquefois ils tuent le malade par des doses
excessives.
La gale, et son remède le soufre, sont très-répandus en Arabie;
mais l’ignorance des médecins les empêche d’appliquer convenablement
l’énergique antidote. Cette dégoûtante affection
s’attaque aussi aux chameaux, qui la communiquent souvent à
l’homme.
L’ophthalmie exerce de grands ravages, surtout parmi les enfants;
ce n’est pas une exagération de dire qu’un Arabe sur cinq
devient aveugle, ou du moins a les yeux fortement affectés,
avant d’arriver à l’âge adulte. Cependant l’esprit peu inventif des
habitants n’a encore trouvé aucun des remèdes, même les plus
simples, qui sont employés en Egypte avec un plein succès. Les
cas de cataracte sont également fort nombreux. L’amaurose est
fréquente et parfois elle se développe avec une surprenante rapidité
; on l’attribue à l’air froid de la nuit; en tout cas elle ne
provient pas d’études excessives. L’espèce particulière et assez
bizarre de cécité qui prive de la vision depuis le coucher jusqu’au
lever du soleil seulement, existe ici comme dans l’Inde.
L’inflammation chronique de la conjonctive met souvent à une
rude épreuve la patience des praticiens. Enfin je ne connais aucun
cas du catalogue varié des affections ophthalmiques dont on
ne puisse trouver un ou plusieurs exemples dans une ville du
Nedjed.
Je regrette de n’avoir pu confirmer par mon expérience personnelle
les assertions de divers voyageurs sur la finesse des