
un livre, un code de lois dont ils faisaient remonter l’origine
à Seth; malheureusement, il n’en reste pas le moindre vestige,,
et l’on ignore même dans quelle langue il avait été composé.
Les historiens nous ont transmis encore quelques détails moins
importants, surtout moins authentiques; ils prétendent, par
exemple, que les Sabéens vénéraient la Kaaba et adoraient par
avance le prophète Mahomet. Les lecteurs qui savent quelles
admirables hypothèses les sculptures de l’Yucatan et les hiéroglyphes
de Louqsor ont inspirées aux chrétiens, ne seront pas
surpris de trouver chez les mahométans un semblable courant
d’idées. « Celui qui est pris de vertige voit le monde tourner
autour de lui, » dit le proverbe.
L’ancien sabéisme se distinguait aussi par la simplicité de
ses cérémonies; il n’admettait ni les représentations sensibles
de la Divinité, ni la hiérarchie ecclésiastique. Les fonctions
sacerdotales élaierit le privilège du grand âge et de la noblesse ;
elles n’établissaient aucune différence entre celui qui les exerçait
etles simples fidèles. Le culte du feu, au moins tel qu’il est
pratiqué par les Parsis de l’Inde, paraît s’être introduit beau -
coup plus tard en Orient, et nulle tradition n’en mentionne
l’existence chez les peuples primitifs.
Les Sabéens s’étaient fixés principalement à l’est de la Péninsule;
les provinces du centre et de l’ouest avaient adopté une
religion différente et moins pure. Plus tard, les progrès de
l’islamisme dans l’Yémen effacèrent toute trace des pratiques
sabéennes ; quant à l’Oman, bien qu’il subît la même influence,
il conserva quelques-unes de ses coutumes archaïques.
Nous lisons dans les annales arabes que cette province se
soumit à la loi de Mahomet pendant la vie même du Prophète,,
mais les historiens ne nous font connaître ni les causes, ni les
circonstances de cet événement. Les districts omanites, séparés
du reste du continent par le désert, ne présentent un accès
facile que du côté de l’Océan, chemin qui était alors peu familier
aux soldats de l’Islam ; les habitants pouvaient donc, profitant
de leur situation géographique, acheter par un faible tribut et
une conversion apparente l’éloignement des fanatiques sectaires
qui faisaient au nom d’Allah la conquête de l’Arabie. Sous le
règne d’Omar, la religion mahométane continua d’être en apparence
celle de l’Oman. Bientôt après éclata la sanglante querelle
d’Othman et d’Ali; le monde musulman tout entier se divisa
en deux factions rivales et commença la lutte terrible que
douze siècles n’ont pas encore terminée. L’orient de la Péninsule
embrassa la cause d’Ali ; les provinces de l’ouest se déclarèrent
pour Othman. Pendant ce temps, les Omanites, tranquilles dans
leur pays, se mettaient peu en peine de la guerre qui déchirait
l’islamisme ; pas un de leurs soldats n’alla grossir l’armée de
l’un ou de l’autre des deux rivaux. Mécontents d’une telle
indifférence, les califes dépêchèrent des messagers aux chefs du
Djebel-Akhdar et du Batinah, pour leur demander sous quelle
bannière ils comptaient se. ranger. Je dois rappeler ici que je
ne prétends pas à une rigoureuse fidélité historique ; je répète
simplement les traditions locales telles que les habitants me
les ont racontées ou que je les ai trouvées consignées dans les
auteurs arabes. L’ensemble des faits est probablement exact,
mais l’imagination orientale a orné les événements de ses riches
et poétiques couleurs.
Les messagers des princes rivaux, après avoir accompli ensemble
leur long voyage et montré des sentiments chevaleresques
dignes d’Astolphe et de Bradamante, se présentèrent
devant les nobles Omanites réunis à Bahilah, ancienne capitale
du pays. Là, ils s’acquittèrent de leur mission et reçurent des
chefs une réponse fort sage, mais peu satisfaisante. L’Oman
maudissait les factieux qui faisaient couler à flots le sang arabe,
et déclarait ne vouloir jouer aucun rôle dans la querelle des
califes.
Un tel langage, on l’imagine aisément, n’obtint l’approbation
ni d’Ohtman ni d’Ali. Le premier se trouvait à une trop
grande distance de l’Oman pour tirer vengeance de l’affront
qu’il avait reçu ; Ali, dont les troupes étaient beaucoup plus
rapprochées de la province récalcitrante, envahit ses frontières,
il ne réussit pas à convaincre le habitants de ses droits prophétiques
et divins, mais il exerça d’assez grands ravages ’pour
rendre son nom l’objet de la haine publique.
Cependant les Ommiades victorieux ayant transporté à Damas
le siège de l’empire, les Yaribah furent affranchis de leur
domination. Un grand silence-se fait alors dans les annales du
pays, et, s’il est vrai que les peuplés heureux n’aient pas d’histoire,
aucune nation n’eut en partage une plus longue prospé