
servé du fléau, tandis que la vallée du Bjowf, que son isolement
semblait devoir protéger, a cruellement souffert. La petite vérole
est connue en Arabie de temps immémorial; au Nedjed,
on la combat par l’inoculation, mais j ’ignore comment cet
usage a été introduit. Je ne crois pas qu’il ait été apporté de Con-
stantinople, et je ne sache pas qu’aucune lady Montague arabe
puisse revendiquer l’honneur de l’avoir répandu. Des aventuriers
syriens ont fait connaître la vaccine, jusque dans le
Djowf, et tout dernièrement Telal a pris des mesures pour en
propager l’emploi ; cette médication, toutefois, a été repoussée
parles Etats wahabites ; des préjugés semblables à ceux qui autrefois
empêchaient en Angleterre les classes ignorantes d’y
recourir, s’opposent à son adoption.
La diathèse scrofuleuse, très-fréquente dans la Péninsule,
donne naissance à une foule de maladies. Cette disposition morbide
se porte quelquefois sur les poumons, mais plus souvent
encore sur les entrailles, ca ria douceur du climat empêche le
germe fatal de se développer dans les organes respiratoires,
tandis que leur nourriture irritante, parfois même peu digestible,
prédispose les Arabes aux affections des viscères inférieurs.
Je fus effrayé du nombre des cas de phthisie intestinale ; cette
affection fait de grands ravages dans les deux sexes et se manifeste
d’ordinaire de vingt à quarante ans ; j’ai cependant vu une
femme qui avait été atteinte à près de cinquante, mais il est
rare que ce mal frappe aussi tardivement ses victimes. Les scrofules,
qui ont leur siège dans les glandes du cou, et le rachitisme,
qui produit les déformations communes en Europe, sont très-
fréquents au Nedjed, presque ignorés dans le Shomer, le Kasim
et le Sedeyr. La phthisie pulmonaire, ou, pour parler plus exactement,
celle qui n’a pas de caractère bien défini, est peu répandue
; les Arabes, comme on le pense bien, n’ont pas la moindre
idée du traitement à suivre en pareil cas ; ils se bornent à faire
manger les malades le plus possible. Dans le cas de petite vérole
au de fièvre scarlatine, ils étouffent le patient sous un amas de
couvertures, ferment les volets, allument un grand feu, comme
nos médecins d’autrefois. Quant au choléra, j’ai dit dans un
chapitre précédent quels remèdes ils emploient ; ils n’en connaissent
pas d’autres.
Les rhumatismes, sous toutes leurs formes et à tous les degrés»
sciatique, lumbago, etc., sont peut-être les maladies les plus fréquentes
en Arabie, surtout chez les Bédouins et les paysans pauvres.
Les maladies du coeur sont aussi fort communes, et se terminent
le plus souvent par l’hydropisie ; je ferai remarquer en
passant que, s’il survient une anasarque, ce signe paraît aux médecins
arabes le présage d’une mort prochaine. Ils essayent quelquefois
de combattre ces affections par la saignée ou les purgatifs,
et obtiennent ainsi un soulagement momentané, au prix de
ravages ultérieurs; quelquefois même, d’après un procédé plus
dangereux encore qu’inutile, mais qui est recommandé par la
tradition du Prophète, on cautérise avec des fers rouges la poitrine
du patient (terme fort exact en Arabie). Les sujets atteints
de rhumatisme sont soumis à un traitement semblable ; quelquefois,
il est vrai, on s’en tient aux frictions.
Les dyspepsies et les gastrites chroniques sont extrêmement
fréquentes. Il n’y a pas lieu de s’en étonner, si l’on songe que
dans ce pays, des dattes sèches et de mauvais pain sans levain,
parfois d’énormes morceaux de mouton mal cuit, forment, pendant
huit ou neuf mois de l’année, l’alimentation ordinaire, au
moins pour les classes inférieures. Les ulcères de l’estomac font
de grands ravages surtout parmi les femmes, et si l’on pratiquait
l’autopsiè, on verrait, j ’en suis sûr, qu’une au moins sur six a
dû la mort à cette affection. Dans ma pratique restreinte, il s’est
présenté deux cas où une péritonite violente et soudaine, se
déclarant à’ia suite de longs troubles de l’estomac, entraîna une
prompte mort provenant certainement d’une perforation. L une
des victimes était une jeune femme qui, outre les tortures d’un
tel mai; eut encore à souffrir d’un vétérinaire de profondes
cautérisations à l’abdomen, malgré les efforts que je fis pour
m’y opposer.
Les coliques ne sont pas rares, ni même l’occlusion complète
de l’intestin. La dyssenterie et la diarrhée chronique, bien que
l’on en puisse constater quelques cas, se rencontrent beaucoup
moins souvent que dans l’Inde. L’opium, dont les Arabes
ignorent les propriétés médicinales, était, en ce cas, mon ancre
de salut, et il faisait merveille. Les hémorrhoïdes et les fistules
se présentent chaque jour; les premières sont communes sur
les rives du Golfe Persique, les secondes dans le Djebel Shomer
et le Nedjed. Les praticiens arabes traitent les hémorrhoïdes par