certaine ; il' dît même qu’il faut renoncer à entendre les anciens-
lorsqu’ils ont parlé de manière à ne vouloir pas être entendus : il
finit par conclure que les anciens ont peut-être compris indistinctement
sous le nom d’ibis tous les oiseaux qui rendoient à l’Egypte
le service de la purger des dangereux reptiles que ce climat produit
en abondance, tels que le vautour, le faucon, la cigogne, l’éper-
vier, etc.
Il avoit raison de ne point regarder son chapon de Pharaon comme
l’ibis ; car quoique sa description soit très-imparfaite, et que Buffon
ait cru y reeonnoître l’ibis, il est aisé de voir, ainsi que par ce qu’en
dit Pokocke, que cet oiseau doit être un carnivore ; et en effet, on
voit par la figure de Bruce ( t. V, p. 191 de l’édit, fr. ) que la poule
de Pharaon n’est autre chose que le rachama ou le petit vautour
blanc à ailés noires ( vultur percnopterus Linn. ) ; oiseau très-différent
dé celui que nous avons prouvé plus haut être l’ibis.
Pokocke dit qu’il paroît, par les descriptions qu’on donne de
l’ibis, et par les figures qu’il en a vues dans les temples de la Haute-
Egypte, que c’étoit une espèce de grue. J’ai vu, ajoute-t-il, quantité
de ces oiseaux dans les îles du Nil ; ils étoient la plupart grisâtres.
(Trad. franc., édit, in-12, t. II, p. 153.) Ce peu de mots
suffit pour prouver qu’il n’a pas connu l’ibis mieux que .les autres.
■ Les érudits nont pas été plus heureux dans leurs conjectures que
les voyageurs. Middîeton rapporte à l’ibis une figure de bronze
dun oiseau dont le bec est arqué mais court, lé cou très-long et
la tête garnie d’une petite huppe, figure qui n’eut jamais aucune
ressemblance avec l’oiseau des Egyptiens ( antiq. monum., tab. X ,
p. 129). Cette figure n’est d’ailleurs point du tout dans le style
égyptien, et Middîeton lui-même convient qu’elle doit avoir été faite
à Borne. Saumaise sur Solin ne dit rien qui se rapporte à la question
actuelle.
Quant à l’ibis noir, qu’Aristote place seulement auprès de Pé—
Juse (1), on a cru long-temps que Belon seul l’avoit vu (2) ; l’oiseau
qu’il décrit sous ce nom est une espèce de courlis à laquelle il attribue
une tête semblable à celle du cormoran, c’est-à-dire apparemment
chauve, un bec et des pieds rouges (3) ; mais comme if
ne parle point de l’ibis dans son voyage (4) , je soupçonne qu’il n’a
fait ce rapprochement qu’en France, et par comparaison avec des
momies d’ibis. Ce qu’il y a de certain, c’est que l’on ne connoît pas en
Egypte ce courlis à bec et pieds rouges (5) , mais qu’on y voit très-
communément notre courlis vert d’Europe (sco l. fa c in e llu s, L .,
enl. 819 ), qu’il y est même plus abondant que le numenius blanc (6),.
et comme il lui ressemble pour les formes et pour la taille, et que-
de loin son plumage peut paroître noir, on ne peut guères douter
que ce ne soit là le véritable ibis noir des anciens. M. Savigny l’a
aussi fait peindre en Egypte (7) , mais d’après un j eune individu seulement
; la figure de Buffon est faite d’après l’adulte, mais les couleurs
en sont trop claires..
L ’erreur qui règne à présent touchant l’ibis blanc, a commencé-
par Perrault qui même a le premier, parmi les naturalistes, fait1
connoître le tantalus ibis d’aujourd’hui. Cette erreur adoptée par
Brisson et par Buffon, a passé dans la douzième édition de Linné,
où elle s’est mêlée à celle d’Hasselquist qui avoit été insérée dans
la dixième pour former avec elle un composé tout à fait monstrueux.
Elle étoit fondée sur l’idée que l’ibis étoit essentiellement un
oiseau ennemi des serpens, et sur eette conclusion bien naturelle,,
qu’il falloit pour dévorer les serpens un bec tranchant et plus ou-.
(1) Hist.anim., liB. IX , cap..X X V II, etlib; X , cap. X X X .
(2) Buff., Hist. nat. ,in -4 ° : , oiseaux ,-1. V I I I , p. 17.
(3) Belon, Nature des oiseaux, p. 199 et 200 ; et Portraits d’oiseaux, fol. M. , vers,.
(4) Observations deplusieurs singularités, etc-
(5) Savigny,.. Mem.. sur l’Ibis ,-p. 87- (6) Idem,, ibid.
(7) Grand ouvrage sur VJSgyjyte, Hist. nat-, oiseaux., pl.-YII,