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tous les animaux celui qui approche le plus de l’hippopotame par
son organisation.
Ces deux considérations ne me laissoient déjà presque aucun doute;
mais j’ eus le plaisir de trouver une preuve encore plus directe lorsque
j’eus fait faire le squelette de foetus d’hippopotame dont j’ai parlé
dans la section précédente. L’astragale de ce foetus ne présenta,
la grandeur exceptée, aucune différence avec le fossile , que je
pusse apprécier à cette époque où je n’avois pas encore le même
os tiré de l’adulte.
M’étant ainsi assuré de l’un des lieux où l’on pouvoit trouver des
ossemens d’hippopotame, je m’empressai d’écrire à M. Fabbroni,
qui étoit alors directeur du cabinet royal de physique à Florence,
savant universellement célèbre par ses qualités aimables autant que
par l’étendue de ses connoissances : je ne doutois pas qu’on ne dût
trouver parmi les fossiles du cabinet qu’il dirigeoit plusieurs morceaux
de la même espèce , et il s’en trouva en effet.
M. Fabbroni m’envoya les dessins de trois dents qui ont évidemment
appartenu à l’hippopotame. J’ai fait graver ces dessins, pl. I ,
fig. 3 et 5., et pl. I I , fig. io.
Le premier, pl. I , fig. 3, est l’antépénultième molaire, soit d’en
haut, soit d’en bas, à demi-usée.
Le second, celui de la pl. I , fig. 5 , est la dernière molaire d’en
bas, au moment où elle étoit près de percer la gencive; comme elle
n’avoit point encore servi à la mastication, les pointes de ses collines
se sont conservées; son émail n’est point entamé, et ce dessin peut
servir pour indiquer la forme des germes de molaires d’hippopotame;
car il n’offre absolument aucune différence, si ce n’est qu’il paroit un
peu plus grand: je ne sais si c’est la faute du dessinateur, car M. Fabbroni
ne m’a point envoyé de mesure.
Le troisième dessin, pl. II, fig. io , représente un fragment de
défense ou canine inférieure. C’est encore un morceau très-recon-
noissable pour avoir appartenu à l’hippopotame; aucun autre animal
n’a des défenses de cette forme; et l’éléphant, qui les a plus grandes,
ne les a ni anguleuses, ni striées: le morse, qui les surpasse aussi, les
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a bien striées vers la racine, mais non pas anguleuses. Le narval a la
sienne droite, comme tordue en spirale par les stries de la surface.
Le tissu de la substance osseuse est d’ailleurs très-différent. Dans
l’éléphant on y voit des traits brunâtres qui se croisent en losanges
curvilignes très-régulières. Dans le morse, il y a des grains bruns
comme paîtris dans une substance plus blanche; dans le narval, tout
semble homogène; dans l’hippopotame enfin, ce sont des stries
fines, concentriques au contour de la dent.
M. Fabbroni m’écrivoit, touchant cette défense, qu’elle diffère
de celle de l’hippopotame d’Afrique, en ce que son diamètre a un
plus grand rapport avec sa,longueur, et parce que sa courbure en
spirale est beaucoup plus marquée.
Il ajoutoit que ces dents se trouvoient éparses cà et là dans le val
d’Arno supérieur, mais sans mâchoires ni autres ossemens.
Cependant l’astragale rapporté par M. Miot, prouvoit dès-lors
qu’avec un peu de soin, on auroit pu aussi recueillir les autres
parties..
En effet, les recherches postérieures furent plus heureuses..,.:
A mon premier voyage en Toscane, en 18og et 1810, je trouvai,
soit au cabinet de Florence, soit dans celui de l’Académie du val
d’Arno à Figline, une telle abondance d’ossemens fossiles d’hippopotame,
qu’il n’y auroit eu presque aucune difficulté à en recomposer
le squelette. J’en ai même rapporté et placé au cabinet du roi
une quantité considérable, que j’ai achetée sur les lieux des paysans :
et comme l’on a continué d’en rassembler depuis, je vois dans l ’ouvrage
de M. Breislack, qu’il y en avoit dès 1816, dans le cabinet du
grand-duc, un squelette presque entier, et des parties d’au moins
onze autres individus (i). En un mot, il est constant que les ossemens
d’hippopotame sont dans le val d’Arno supérieur presque
aussi nombreux que ceux d’éléphant, et plus que ceux de rhinocéros.
Du reste ils se trouvent pêle-mêle avec les uns et les autres
dans les mêmes couches, c’est-à-dire dans les collines sableuses qui
(i) Géologie de Breislack, trad. allem., p. 445.
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