Il y a peu d’espérance
de découvrir
de nouvelles
espèces de
grands quadrupèdes.
par là que, si on ne les a point encore découvertes dans l’état de v ie ,
c’est qu’elles habitent à des profondeurs inaccessibles pour nos filets.
Sans doute les naturalistes n’ont pas encore traversé tous les con-
tinens, et ne connoissent pas même tous les quadrupèdes qui habitent
les pays qu’ils ont traversés. On découvre de temps en temps
des espèces nouvelles de cette classe ; et ceux qui n’ont pas examiné
avec attention toutes les circonstances de ces découvertes pourroient
croire aussi que les quadrupèdes inconnus dont on trouve les os dans
nos couches, sont restés jusqu’à présent cachés dans quelques îles
qui n’ont pas été>rencontrées par des navigateurs, ou dans quelques
uns des vastes déserts qui occupent le milieu de l’Asie, de l’Afrique,
des deux Amériques et de la Nouvelle-Hollande.
Cependant, que l’on examine bien quelles sortes de quadrupèdes
l’on a découvertes récemment, et dans quelles circonstances on les
a découvertes, et l’on verra qu’il reste peu d’espoir de trouver un
jour celles que nous n’avons encore vues que fossiles.
Les îles d’étendue médiocre, et placées loin des grandes terrés,
ont très-peu de quadrupèdes, la plupart fort petits : quand elles en
possèdent de grands, c’est qu’ils y ont été apportés d’ailleurs. Bougainville
et Cook n’pnt trouvé que des cochons et des chiens dans les
îles de la mer du Sud. Les plus grands quadrupèdes des Antilles
étoient les agoutis.
A la vérité les grandes terres, comme l’Asie, l’Afrique, les deux
Amériques et la Nouvelle-Hollande ont de grands quadrupèdes, et
généralement des espèces propres à chacune d’elles ; en sorte que
toutes les fois que l’on a découvert de ces terres que leur situation
avgit tenues isolées du reste du monde , on y a trouvé la classe des
quadrupèdes entièrement différente de ce qui existoit ailleurs. Ainsi,
quand les Espagnols parcoururent pour la première fois l’Amérique
méridionale, ils n’y trouvèrent pas un seul des quadrupèdes de l’Europe
, de l’Asie, ni de l’Afrique. Le puma,'le jaguar, le tapir, le
cabiai, le lama, la vigogne, tous les sapajous, furent pour eux des
êtres entièrement nouveaux, et dont ils n’avoient nulle idée. Le
même phénomène s’est renouvelé de nos jours quand on a commencé
à examiner les côtes de la Nouvelle-Hollande et les îles
adjacentes. Les divers kanguroos, les phascolomes, les dasyures,les
péramèles, les phalangers volans, les ornithorinques, les échidnés
sont venus étonner les naturalistes par des conformations étranges
qui rompoient toutes les règles, et échappoient à tous les systèmes;
Si donc il restoit quelque grand continent à découvrir, on pourroit
encore espérer de connoître de nouvelles espèces, parmi lesquelles il
pourroit s’en trouver de plus ou moins semblables à celles dont les
entrailles de la terre nous ont montré les dépouilles; mais il suffit de
jeter ùn coup-d’ceil sur la mappemonde, de voir les innombrables
directions selon lesquelles les navigateurs ont sillonné l’Océan, pour
juger qu’il ne doit plus y avoir de grande terre, à moins qu’elle ne
soit vers le pôle austral, où les glaces n’y laisseroient subsister aucun
reste de vie.
Ainsi ce n’est que de l’intérieur des grandes parties du monde
que l’on peut encore attendre des quadrupèdes inconnus.
Or, avec un peu de réflexion, on verra bientôt que l’attente n’est
guère plus fondée de ce côté que de celui des îles.
Sans doute le voyageur européen ne parcourt pas aisément de vastes
étendues de pays, désertes, ou nourrissant seulement des peuplades
féroces ; et cela est surtout vrai à l’égard de l’Afrique : mais rien
n’empêche les animaux de parcourir ces contrées en tout sens, et de
se rendre vers les côtes. Quand il y auroit entre les côtes et les déserts
de l’intérieur de grandes chaînes de montagnes, elles seroient toujours
interrompues à quelques endroits pour laisser passer les fleuves ; et,
dans ces déserts brùlans, les quadrupèdes suivent de préférence les
bords des rivières. Les peuplades des Côtes remontent aussi ces rivières,
et prennent promptement connoissance, soit par elles-mêmes,