lement aux révolutions qui ont enfoui ces os, mais encore à celles
qui ont remis à découvert les couches qui les enveloppent, révolutions
qui sont les dernières que le globe ait subies : d’où il est clair que l’on
ne peut tirer ni de ces os eux-mêmes, ni des amas plus ou moins considérables
de pierres ou de terre qui les recouvrent, aucun argument
en faveur de l’ancienneté de l’espèce humaine dans ces divers pays.
Preuves phy - Au contraire, en examinant bien ce qui s’est passé à la surface
siques de la nou- du globe, depuis qu’elle a été mise à sec pour la dernière fois , et
veaute de 1 état e jes continens 0nt pris leur forme actuelle au moins dans leurs
actuel des conti- -1 *
nens. parties un peu élevées, l’on voit clairement que cette dernière révolution,
et par conséquent l’établissement de nos sociétés actuelles
ne peuvent pas être très-anciens. C’est un des résultats à la fois les
mieux prouvés et les moins attendus de la saine géologie, résultat
d’autant plus précieux qu’il lie d’une chaîne non interrompue l’histoire
naturelle et l’histoire civile.
En mesurant les effets produits dans un temps donné par les causes
aujourd’hui agissantes, et en les comparant avec ceux quelles ont
produits depuis qu’elles ont commencé d’agir, l’on parvient à
déterminer à peu près l’instant où leur action a commencé, lequel
est nécessairement le même que celui où nos continens ont pris leur
forme actuelle, ou que celui de la dernière retraite subite des eaux.
C’est en effet à compter de cette retraite que nos escarpemens
actuels ont commencé à s’ébouler, et à former à leur pied des
collines de débris ; que nos fleuves actuels ont commencé à couler
et à déposer leurs alluvions ; que notre végétation actuelle a
commencé à s’étendre et à produire du terreau ; que nos falaises
actuelles ont commencé à être rongées par la mer ; que nos dunes
actuelles ont commencé à être rejetées par le vent; tout comme
c’ est de cette même époque que des colonies humaines ont commencé
ou recommencé à se répandre, et à faire des établissemens
dans les lieux dont la nature l’a permis. Je ne parle point de
nos volcans, non-seulement à cause de l’irrégularité de leurs éruptions,
mais parce que rien ne prouve qu’ils n’aient pu exister sous la
mer, et qu’ainsi ils ne peuvent servir à la mesure du temps qui s’est
écoulé depuis sa dernière retraite.
MM. Deluc et Dolomieu sont ceux qui ont le plus soigneusement
examiné la marche des atterrissemens ; e t, quoique fort opposés
sur un grand nombre de points de la théorie de la terre, ils s’accordent
sur celui-là ; les atterrissemens augmentent très-vite ; ils
dévoient augmenter bien plus vite encore dans les commencemens,
lorsque les montagnes fournissoient davantage de matériaux aux
fleuves, et cependant leur étendue est encore ussez bornée.
Le Mémoire de Dolomieu sur l’Egypte ( i ) , tend à prouver que,
du temps d’Homère, la langue de terre sur laquelle Alexandre fit
bâtir sa ville n’existoit pas encore ; que l’on pouvoit naviguer immédiatement
de l’île du Phare dans le golfe appelé depuis lac M a-
réotis, et que ce golfe avoit alors la longueur indiquée par Ménélas
d’environ quinze à vingt lieues. II n’auroit donc fallu que les neuf
cents ans écoulés entre Homère et Strabon, pour mettre les choses
dans l’état où ce dernier les décrit, et pour réduire ce golfe à la
forme d’un lac de six lieues de longueur. Ce qui est plus certain,
c’est que, depuis lors, les choses ont encore bien changé. Les sables
que la mer et le vent ont rejetés, ont formé, entre l’île du Phare
et l’ancienne ville, une langue de terre de deux cents toises de largeur,
sur laquelle la nouvelle ville a été bâtie. Ils ont obstrué la
bouche du Nil la plus voisine, et réduit à peu près à rien le lac
Maréotis. Pendant ce temps, les alluvions du Nil ont été déposées
le long du reste du rivage et l’ont immensément étendu.
Les anciens n’ignoroient pas ces changemens. Hérodote dit que les
prêtres d’Egypte regardoient leur pays comme un présent du Nil. Ce (i)
Atterrissemens.
(i) Journ. de Pl\ys., t. X L Ï I , p. 40 et suiv.