céta cé inconnu ; mais c’est qu’il n’en avoit vu que les dents, et qu il
ne savoit point que la forme de ses pieds réfute cettè conjecture.
Un certain M. de la Coudrenière ayant trouvé dans une relation
du Groenland, que les sauvages de ce pays prétendent avoir un
animal noir et velu, de la forme d’un ours, et de six brasses de haut,
en dérivoit non-seulement le mastodonte, mais encore \ éléphant
fo s s ile ou mammouth, qu’il confondoit avec lui (1).
C’est probablement aussi cette confusion des deux especes qui
aura fait penser à M. Jefferson que le centre de la zone glaciale
est le lieu où le m a m m o u t h arrive à toute sa fo r c e , comme les pays
situés sous Véquateur sont les lieu x de la terre les p lus propres à
nourrir l ’éléphant (2).
Laissant là ces idées hypothétiques, nous passerons à l’examen des
os du mastodonte, et comme à notre ordinaire nous le commencerons
par les dents.
i°. L e s mâchelières.
Nous avons à en déterminer d abord \Q.forme^\es différences ,
les successions et le nombre.
L& form e est ce qui a le plus frappé en elles.
Leur couronne est en général plus ou moins approchante de la
figure rectangulaire.
Elle n’a que deux substances : la substance intérieure dite osseuse
ou plus exactemënt ivoire, et l’émail. Celui-ci est très-épais ; il n’y
a point de cette troisième substance si remarquable dans 1 éléphant et
que l’on a nommée cément ou cortical.
Cette couronne est divisée par des sillons ou especes de vallées
très:ouvertes en un certain nombre de collines transversales et chaque
colline est divisée elle-même par une échancrure en deux grosses
pointes obtuses et irrégulièrement conformées en pyramides quadran-
gulaires un peu arrondies.
(1) Journal de Physique, t. X IX , p. 363.
(2) Jefferson, ubi sup., p. 106.
Cette couronne, tant qu’ elle n’a pas été usée, est donc hérissée de
grosses pointes disposées par paires.
Il y a déjà bien loin de là aux dents des carnivores, qui n’offrent
qu’un tranchant principal et longitudinal, divisé en dentelures comme
celui d’une scie.
Au fond même, il n’y a qu’une différence de proportion entre
ces collines transverses divisées en deux pointes, et les ‘petits murs
transverses à tranchant divisé en plusieurs tubercules des dents de
l’ éléphant. Ceux-ci forment seulement des collines plus nombreuses,
plus élevées, plus minces, séparées par des vallons plus étroits,
plus profonds ; mais une différence tout-à-fait essentielle, c’est que
dans l’éléphant ces vallons sont entièrement comblés par le cortical
, tandis que dans le mastodonte ils ne sont remplis par rien ; il
arrive de là que la couronne de Xéléphant devient plate de très-
bonne heure par la détrition, et demeure néanmoins toujours sillonnée
transversalement, tandis que celle du mastodonte est longtemps
mamelonnée ; que la détrition n’y produit d’abord que des
troncatures en forme de losanges à ses collines ; et que, lorsqu’elle
est devenue plate par la détrition entière des collines, sa surface est
aussi toute unie, ou même uniformément concave (1 ).
Le mastodonte devoit donc faire de ses dents le même usage que
le cochon et l’hippopotame, qui ont les mêmes caractères que lui à
leurs dents. Il devoit surtout s’attacher aux végétaux tendres, aux
racines, aux plantes aquatiques ; mais il ne faisoit point sa nourriture
d’une proie vivante.
C’est ce régime végétal qui usoit ses dents, et qui a fait que l’on
en trouve , comme nous venons de le dire , dont les pointes sont
émoussées ; d’autres où elles sont usées jusqu’à la base des pyra-
.({) M. Tilesius paroît n’avoir pas compris toute l’importance de ces différences , et l’influence
qu’ elles dévoient avoir sur le genre de vie des deux animaux, lorsqu’il a trouvé
étrange que je m’en servisse pour faire, du mastodonte un genre particulier. Il ignoroit
apparemment aussi que dans plusieurs familles on ne peut établir de bons genres que sur la
structure des molaires. Voyez Mém. de l'Acad. de P étersb., V , i .8i 5 , p. 49 .5 et 4 7 6 .
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