Indépendamment du nombre, il y a des différences par rapport
à l’épaisseur des lames; elles sont plus minces dans les premières
dents que dans les dernières : et comme les mâchoires sont plus
courtes lorsqu’elles portent les premières dents, il arrive que le
nombre des lames en activité est à peu près le même en tout temps,
c’est-à-dire, de dix ou douze.
Lorsque l’éléphant est grandi, l’espace occupé par les lames en
activité est, il est vrai, plus grand; mais ces lames sont elles-
mêmes plus épaisses, et remplissent toujours 1 espace quel qu’il soit.
Comme il faut à peu près le même temps pour user le même nombre
de lames, les dernières dents, qui en ont beaucoup plus, durent
bien plus long-temps que les premières. Les remplacemens se font
donc à des intervalles de plus en plus longs, à mesure que l’éléphant
avance en âge.
Les dents d’éléphans, comme celles de tous les autres animaux,
ne poussent leurs racines que quand le corps est parfait ; les racines
se forment par couches, comme le reste de la dent: la chose ne
pouvoit être autrement. Mais pourquoi cette division dans un autre
sens, lorsque la réunion des calottes de toutes les éminences gélatineuses
sembloit ne plus devoir produire qu’un seul corps?
Pour répondre à cette question qui est d’un intérêt général pour
toutes les dents, il faut ajouter une circonstance à la description que
j’ai donnée du germe: j’ai réservé ce point pour ce moment-ci,afin
de ne pas trop embrouiller les idées.
La base de ce corps gélatineux, dont les productions que j’ai appelées
murs servent de noyaux aux lames de la dent, n’adhère pas
par tous ses points au fond delà capsule. Il y a d’espace en espace
des solutions de continuité, et par conséquent les parties adhérentes
de cette base peuvent être considérées comme des pédicules très-
courts. Lorsque la lame de substance osseuse a recouvert toutes les
productions ou murs, et tout le corps du noyau de la dent, elle se
continue toujours sur et entre les pédicules; les parties de cette lame
qui se portent entre les pédicules, forment le dessous du corps de
la dent; les parties qui enveloppent les pédicules, et qui sont par
conséquent.plus ou moins tubuleuses, forment les premiers com-
mencemens des racines.
Ces racines et les pédicules qui leur servent de noyaux s’allongent
ensuite par deux raisons : d’abord les progrès des lames de substance
osseuse qui, s’allongeant toujours, forcent la dent à s’élever et à
sortir de l’alvéole; ensuite l’épaississement du corps de la dent par
la formation des couches successives qui, en remplissant le vide intérieur,
n’y laisse presque plus de place pour le noyau gélatineux,
et le refoule vers l’intérieur des tubes des racines.
Il ne se produit point d’émail ni de cortical sur les racines, parce
que la lame interne de la capsule, qui a seule le pouvoir de sécréter
ces deux-substances, ne s’étend pas jusque-là.
Je pense que c’ est en partie à cette absence d’émail qu’est due la
corrosion qui commence sur les racines, sitôt que la portion de la
couronne qui leur correspond est usée jusqu’à elles.
A cette époque la racine a pris tout le développement qu’elle
pouvoit prendre ; le noyau pulpeux est entièrement repoussé par les
couches avec lesquelles il a rempli lui-même lacavitéqu’il occupoit.
Cette force d'accroissement de la racine cesse donc de contrebalancer
l’accroissement des parois osseuses de l’alvéole, et celles-ci poussent
continuellement la racine en dehors. Elle commence à se carier
aussitôt que, se montrant hors de la gencive, elle est exposée à l’action
septique de l’air, de la chaleur et de l’humidité de la bouche.
Ce qui donne à mes yeux quelque probabilité à cette idée, c’est
que la corrosion commence plutôt à la jonction de la racine et de la
couronne qu’à la pointe de la racine. J’en ai plusieurs preuves dans
mes échantillons. On peut en juger aussi par la petite dent que représente
M. Corse, Trcms.ph.il., 179g, tab. V I , fig. 3. Peut-être
encore la compression mécanique que la racine éprouve de la part de
l’alvéole contribue-t-elle à sa destruction, comme on attribue la
destruction des racines des dents de lait à la gêne qu’elles éprouvent
par le rétrécissement de leur alvéole, occasionné par le développement
des dents qui doivent leur succéder.
Au reste il faut toujours qu’une partie de ces molécules, soit ab-
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