pour un homme qui n’avoit jamais vu de squelette d’éléphant, que
ces os dévoient provenir de cet animal (i). ■ .
Voici à peu près ce qu'il y avoit de vrai dans tout cela, autant
qu’il est possible d’en juger aujourd’hui.
Il paroît qu’on trouva, en i 6x3 , le 11 janvier, dans une sablon-
nière , près du château de Chaumont ou de Langon, entre les
villes de M ontricaut, Serre et S ain t-A ntoine, des ossemens dont
une partie fut brisée par les ouvriers. Un chirurgien de Beaurepaire,
nommé M a zu rier, montra à Paris et en divers antres lieux, pour
de l’argent, ceux qui étoient restés entiers j et afin de mieux exciter
la curiosité, il distribuent une petite brochure où 1 assurait qu’on
les avoit trouvés dans un sépulcre long de trente pieds, sur la tombe
duquel étoit écrit : Teutoboohus reve. On sait que e’était le nom du
roi des Ombres qui combattit contre Marius ; aussi ajoutoit-il qui!
s’étoit trouvé dans le même lieu une cinquantaine de médailles
avec l’effigie^ de ce consul romain, et lies, lettres initiales, de son.
nom (2). Mais on accusa ce chirurgien d'avoir fait faire sa brochure
par un jésuite die T ou n ion , qraé avoit forgé l’histoire du sépulcre
et de l’inscription ; ses prétendues médaillés, portaient des. lettres
gothiques et n’astorent rien de romain. Il ne paroit pas qu’il se soit
justifié de cette imposture.
Quant aux os qu’il montroit, ils consistaient dans lés piècessnivantes.l.
(î) T'oyez les Brochures suivantes que je cite” dans l’ordre selon lfequel ellës se succédèrent
Histoire véritable dû géant TeutoBochus-, etc;., v5 pages-, par Mazurier; Gigantostéologie,
par N.. Habicot■ , i 6r3.; Gigantomachie, par un écolier en Médecine (.X Riolan)^, i6i3;
L ’imposture découverte des os humains supposés d’un géant, 1614 Çjiar le même) ; Mono-
machië, ou Réponse d’un compagnon chirurgien- aux calomnieuses inventions de la Gigantomachie
de Riolan, i 6i 4 ( auteur inconnu) ; Discours apolbgé tique dé la-grand’eur dès géansy
par Guillemeau, 1616-; Réponse au Traité apologétique touchant.là. vérité; des Géansr par.
N. Habicot}-Jugement des ombres d’Héraclite et de Démoecite sur la Réponse d’PIabicot au.
Discours attribué à Guillemeau ; Gigantologie, ou Histoire de la grandeur des Géans , par
Riolan 1618 (il y a réimprimé sa Gigantomachie et son Imposture découverte). ; Antigi-
gantologie, ouContrediscours de la grandeur des Géans, par Habicot, 1618; Touche chirurgicale
, par Habicot, 1618; Correction-fraternelle sur la vie d’H ab ico tp a r - Riolan,
1618.
(a) Gassendi, T ie de Peiresc, liv, I I I , et dans ses OEuvres, t-. T , p. 280.
jo. Deux morceaux de la mâchoire inférieure, dont un pesant
six livres, et un plus grand pesant douze livres, avec une dent entière
et trois cassées. Chaque dent avoit quatre racines, étoit grande
comme le p ied d ’un p e tit taureau, comme p étrifiée, et de couleur
semblable à la pierre à fusil. Habicot dit bien que le premier
morceau de mâchoire contenoit deux molaires et la place de deux
autres ; mais Riolan affirme que les dents étoient détachées.
Cette description est si obscure, que sans les autres os on serait
embarrassé à quoi la rapporter.
29., Deux vertèbres, dont une de trois doigts d’épaisseur où l’on
pouvoit passer le poing dans le canal médullaire ; les apophyses
transverses avoient des trous à leur base ; c étoit évidemment une
cervicale, et la minceur de son corps prouve qu’elle étoit d’éléphant.
L’autre étoit beaucoup plus grande, mais avoit perdu son apophyse.
3°. Un morceau du milieu d’une côte, long de six pouces, large de
quatre, épais de deux.
4°. Un fragment d’omoplate dont la facette articulaire avoit douze
pouces de long et huit de large.
5°. Une tête àihumérus , grande comme une moyenne tête
d’homme, et dont la scissure pouvoit loger un moyen calmar d’écri-
toire.
6°. Un fém ur long de cinq pieds, de trois pieds de tour en haut,
de deux près des condyles, d’un et demi au milieu ; les trochanters
y manquoient. Le cou n’avoit ni une longueur, ni une obliquité approchantes
de celles de l’homme (i).
70. Un tibia long de près de quatre pieds et en ayant plus de deux
de tour en bas.
8». Un astragale, différent de celui des animaux (on entendoit
domestiques), mais qui n’avoit point l’apophyse scaphoïdienne aussi
saillante que celui de l’homme (2).
90. Enfin un calcanéum qui avoit en bas des facettes pour le
(1) Gigantomachie, p. 3o.
(2) Jb., p. 26.