porte des plateaux non moins dignes d’attention que ceux qui ont la
craie pour limite.
Qui nous donnera, par exemple, l’histoire des plàtrières d’Aix,
où l’on trouve, comme dans celles de Paris, des reptiles et des poissons
d’eau douce, et probablement aussi des quadrupèdes terrestres,
tandis qu’il n’y a rien de semblable dans près de deux cents lieues
de pays intermédiaire ?
Cette longue série de collines sableuses, appuyées sur les deux
pentes de l’Apennin dans presque toute la longueur de l’Italie, et
renfermant partout des coquilles parfaitement conservées, souvent
encore colorées et nacrées, et dont plusieurs ressemblent à celles de
nos mers, seroit aussi bien importante à connoître ; il faudrait en suivre
toutesles couches, déterminer les fossiles de chacune, les comparer à
ceux des autres couches recentes, de celles de nos environs’par exemple}
en lier la série d’une part avec les terrains plus solides èt plus anciens,
de l’autre avec les alluvions récentes du Pô, de l’Arno, et de leurs
affluens ; fixer leurs rapports, avee les innombrables massés de produits
volcaniques qui s interposent entre elles; examiner enfin la situation
mutuelle dés diverses sortes de coquilles, et de ces ossemens
d’éléphans, de rhinocéros, d’hippopotames, de baleines, de cachalots,
de dauphins, dont beaucoup de ces collines ahondent. Je irai
de ces colfines basses de l’Apennin que la connoissance superficielle
qu’ont pu m’en donner des voyages faits pour d’autres objets; mais je
suis persuadé qu’elles recèlent le vrai secret des dernières opérations
de la mer (i )i j
(i) Depuis la première édition de ce discours , MM. Certesi (Saggi Geologici) et Brocchi
(Conchiologiâ fossile' subapennina) nous ont donné ‘d’excellens matériaux sur l’histoire
géologique des. Apennins, et nous devons aussi en attendre- de MM. Mentant Logroye et
Brongmart, qui ont récemment parcouru plusieurs parties de celle chaîne- intéressante.
Mats les pins grandes espérances que puisse concevoir la géologie positive, sont celles que
font naître les travaux entrepris avec tant ’ d’ardeur et dans , une direction si sage par’ la
Société géologique de Londres, précédée au reste on pl noie ors, points par We nier elscs élèves.
Combien n’est-il pas d’autres couches, même célèbres par leurs
fossiles, que l’on ne sait point encore lier à la Série générale, et dont
l’ancienneté relative est par conséquent encore indéterminée? Les
schistes cuivreux de Thuringe sont, dit-on , pleins de poissons d’eau
douce, et surpassent en ancienneté la plupart des bancs secondaires;
mais quelle est la vraie position des schistes fétides d’OEningen que
1 on dit aussi pleins de poissons d’eau douce; de ceux de Vérone, évidemment
remplis de poissons de mer, mais de poissons très-mal
nommés par les naturalistes qui les ont décrits; des schistes noirs de
Claris ; des schistes blancs d’Aichstedt, remplis encore de poissons,
d’écrevisses , et d’autres animaux marins différens des coquilles ?
Je ne trouve nulle réponse distincte à ces questions dans les livres
de nos géologistes. On ne nous dit pas davantage pourquoi il se
trouve des coquilles partout, et des poissons en un petit nombre de
lieux seulement.
Il me semble qu’une histoire suivie de dépôts si singuliers vaudroit
bien tant de conjectures contradictoires sur la première origine des
globes, et sur des phénomènes que l’on avoue ne pouvoir ressembler
eu rien à ceux de notre physique actuelle, qui n’y trouvent par
conséquent ni matériaux, ni pierre de touche. Plusieurs de nos géologistes
ressemblent à ces historiens qui ne s’intéressent dans l’histoire
de France qu’à ce qui s’est passé avant Jules-César ; il faut bien que
leur imagination supplée aux monumens ; et chacun d’eux fait son
roman à sa manière. Que seroit-ce si ces historiens n’étoient aidés
dans leurs combinaisons par la connoissance des faits postérieurs? Or
nos géologistes négligent précisément ces faits postérieurs qui pourraient
au moins réfléchir quelque lueur vers la nuit des temps pré-
cédens. Qu il seroit beau cependant d’avoir les productions organisées
de la nature dans leur ordre chronologique, comme on a les principales
substances minérales! La science de l’organisation elle-même y
gagnerait ; les développemens de la vie, la succession de ses formes,