Mais les députés, de retour chez eux, avaient
inspiré tant de fureur à ces Missimiens libres,
qui avaient leur langue et leurs lois particulières,
qu’ils tombèrent pendant la nuit sur Sotérichus
et le massacrèrent lui et les siens. Et sentant bien
que la vengeance allait suivre, ils résolurent de
se donner aux Perses.
L’expédition de Nakhoragan avait suspendu
l’effet du courroux des Romains ; peu de temps
après sa retraite, quand le printemps de 555 vint
rouvrir les communications, les Romains au nombre
de 4,000 hommes, allèrent se poster au château
de Tsibiloum ou Tibileos, aujourd’hui Khi-
bulas , situé sur les frontières de l’Apsilie et du
pays des Missimiens, entre la Khopi et la Tché-
nistskali. Un renfort que Nakhoragan envoya
aux Missimiens, les ayant rendus supérieurs aux
Romains, on passa l’été à s’observer. Pendant
ce temps les Romains reprirent Rhodopolis ou
Vartsikhé que les Perses avaient aussi restauré ;
il ne se passa rien d’autre de mémorable, et quand
l’automne fut venu et que les Perses furent retournés
prendre leurs quartiers d’hiver à Kou-
taïs et en Ibérie, les Romains réunirent toutes
leurs troupes pour tomber sur les Missimiens.
Les Apsiliens, leurs voisins, avaient cherché à
les ramener, en leur envoyant les principaux de
leur nation; les Missimiens, loin d’écouter ces
ambassadeurs de paix, les massacrèrent. Les
Romains, outrés de colère contre ce peuple féroce,
franchirent bientôt leurs montagnes, et
se montrèrent dans leurs vallées. Les Missimiens
effrayés, se voyant hors d’état de se défendre
, mirent le feu à toutes leurs places
fortes, et ne réservèrent que Tsakhar la plus
forte, surnommée le Château-de-Fer (1). Ils s’y
retirèrent avec leurs femmes et leurs enfants.
Dacnas, qui commandait l’expédition tandis que
Martin était resté en Lazique, songea d’abord à
détruire un grand nombre'd’habitations qui s’é-
(1) Reineggs qui place une petite peuplade, Souane selon
les uns , Ossi selon les autres , là où les auteurs anciens
placent les Missimiens, c’est-à-dire aux sources de la Ték-
houri, de l’Abacha, etc., l’appelle du nom de Lytchou,
que je n’ai pu trouver chez aucun autre auteur. Il remarque
que ce petit peuple habite un pays pauvre et couvert de
rochers , et qu’une vallée profonde ou plutôt une longue
gorge dirigée du nord au sud le sépare des Souanes. U11
chemin serpente au fond de cette gorge et mène dans la
Grande-Kabai’dah à travei’s le pays des Souanes. Sur un
des rochers de cette vallée se trouve Kemme, non loin des
sources de l’Abacha. Une très-ancienne tradition raconte
que l’entrée septentrionale de celte gorge a été complètement
fermée et fortifiée ; on y voit même des traces de murailles,
et on prétend que cette forteresse avait été bâtie,sur
des pieux et sur des poutres de fe r , et que c’est pour cette
raison qu’on l’appelait la Porte de Fer. Les Géorgiens et les
Imirétiens font aussi mention de cette tradition. Voyez Rei-
neggs , Allgemeine histovisch (opographische Beschreibung
des Kauhasus, 11, p. 20 et 25.
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