des filets d’eau. De nombreux jets porphyriques
la traversent tout le long du bassin : la teinte
notre et déchirée de l’un, sur la teinte jaunâtre
et la coupe arrondie de l’autre, les rendent fa-
ciles à reconnaître.
En 1770, on vit pour la première fois, les
armes russes pénétrer jusque dans ces vallons.
Le célèbre Héraclius, roi de Géorgie, avait obtenu
des secours de la Russie contre les Turcs •
le général Totleben, traversant les Alpes caucal
siennes du Ratcha, était venu le rejoindre pour
une expédition contre le Sa-atabago. On remonta
la vallée de Bardjom, et on s’avança jusque dans
le voisinage d’Aspindsé, sur ces mêmes sommités
que je viens de décrire. Mais une brouille s’éleva
entre le général russe et Héraclius, au moment
meme où l’on était en présence de l’ennemi. Je
ne sais quelles étaient les prétentions du général
; il suffit de dire qu’il refusa de se battre,
croyant mettre Héraclius dans le plus grand
embarras et le forcer à plier sous sa volonté, ou
à être vaincu. Mais Héraclius n’était pas homme
a se laisser intimider ainsi ; il se passa bravement
des Russes, et fit de si bonnes dispositions qu’il
battit totalement les Turcs Sous les yeux mêmes
du général qui ne fut que simple spectateur.
En 1771, Héraclius fit une seconde expédition
contre Aspindsé, et emmena avec lui le célèbre
Güldenstâdt, qui visitait alors la Géorgie et l’Iméreth
; son journal s’est malheureusement perdu *
nous n’en avons que quelques fragments que
J. Klaproth a donnés pour siens dans son propre
voyage (1).
Atskour, espèce de bourg ouvert, est défendu
par une forteresse bâtie comme Akhaltsikhé et
Khertvis sur un pic porphyrique qui surgit sur
la rive droite du Kour, à l’entrée de la vallée de
Bardjom (2). C’est encore un reliquat de l’ancienne
domination géorgienne qui a laissé partout
tant de traces. Ici, la citadelle est telle que
les Géorgiens l’ont laissée, sanctifiée comme partout,
par une église : on lit même sur les plaques
de fer qui recouvrent la porte d’entrée, l’inscription
qu’y firent mettre les fondateurs. Les
lettres sont très-grossièrement ciselées, et ressemblent
à l’écriture courante des Géorgiens,
autrement dite main de guerre. La femme dit
capitaine commandant Gavronski, Géorgienne
de naissance, voulut bien m’aider à la déchiffrer
et à la copier ; nous fûmes plus d’une demi-
heure à genoux, et accroupis devant cette porte
basse. Madame Gavrongki n’y vit que du latare
au lieu de géorgien, tant le tout était barbare-
ment travaillé. M. Brosset jeune, auquel je l’ai
(1) Voyez, Güldenstâdts Reisen nach Géorgien und
lmerethi, éd. Klapr., p. 72, etc.
(2) Voyez Atlas, I I e se'rie, P itt., pl. 21.